expo shanghai 1(1).jpg" />Puissance, modernité, communication mais aussi compétition. 192 pays jouent des coudes sur les cinq kilomètres carrés du site. Un monde en miniature au milieu duquel trône, impérial, le gigantesque pavillon chinois. Trois fois plus haut que les autres pavillons, on ne voit que lui. 70 mètres de hauteur, des poutres rouge sang qui se dressent vers les cieux et un impressionnant toit terrasse.
Cette "couronne de l’Orient" est déjà le phare de Shanghai. A lui seul il résume les ambitions d’un pays qui entend faire de cette expo 2010, son exposition et le symbole d’une grandeur retrouvée. Il y a un siècle, ici même, sur les berges du fleuve Huangpu, les comptoirs occidentaux humiliaient l’Empire. Prostitution, corruption, drogue et guerre de l’opium. Une page sombre de l’histoire chinoise que le pays entend définitivement tourner. "Non ce n’est pas une revanche, mais le symbole d’une renaissance", précise Xu Bo. Le Commissaire adjoint de l’exposition s’exprime dans un Français parfait et multiplie les superlatifs pour décrire cette expo, "la plus grande de l’Histoire".
"Par nature la grandeur de cette exposition universelle dépasse toutes celles du passé. C’est un événement révolutionnaire qui marquera le 21eme siècle. Pour nous, la signification est grande : la chine émerge et nous traversons une période clef de notre histoire. Nous devons vivre avec le monde. Nous devons communier et communiquer avec le monde. Nous devons connaître le monde et le monde doit nous connaître. C’est ainsi que la chine contribue au dialogue des cultures", assure Xu Bo.
L'affirmation du "soft power" chinois
En parcourant les allées de cette incroyable exposition, on a du mal cependant à croire que la Chine ne poursuit pas là sa quête fiévreuse de reconnaissance. La mégalomanie du pavillon chinois qui semble sorti tout droit des rêves du célèbre empereur Qin qui unifia la Chine deux siècles avant Jésus Christ est là pour rappeler que l’Empire du Milieu a retrouvé sa place sur l’échiquier.
Dans la presse officielle et sur toutes les chaînes de télévision, on se gargarise de l’événement. "C’est l’affirmation du "soft power" chinois, une opération de diplomatie publique et la Chine attend de tous les pays qu’ils prêtent allégeance", analyse amusé un diplomate occidental. L’opération est d’ailleurs une réussite car tout le monde a répondu présent : 192 pays, soit l’intégralité des Nations unies, ont ici leur pavillon. Et pour ceux qui n’auraient pas les moyens de s’offrir un voyage à Shanghai, la Chine joue les grandes puissances invitantes : les pays africains ont ainsi reçu 80 millions d’euros pour construire leur gigantesque écrin aujourd’hui transformé en savane. Pour les autres, chaque pays a rivalisé d’imagination. Du pavillon en papier découpé polonais, au jardin à la française, en passant par le bol finlandais et le verre italien, sans oublier la tortue japonaise et le neurone belge… Tout y passe.
Et pour les accueillir, la Chine n’a pas mégoté : le budget officiel atteint les 3 milliards d’euros, intégralement financé par l’Etat. Sans compter les vingt-deux pavillons provinciaux chinois et ceux des grandes entreprises d’Etat ou encore le très hollywoodien centre culturel aux allures de soucoupe volante. Mais comme ce fut le cas lors des Jeux olympiques de Pékin en 2008, cet événement est également l’occasion pour la capitale économique de se refaire une beauté. Des travaux pharaoniques qui comprennent les constructions de cinq nouvelles lignes de métro, de cent lignes de bus, deux terminaux d’aéroport, trente et une voies rapides, des tunnels, des ponts et un lifting de l’emblématique Bund.
L’ancien quartier des concessions coloniales le long du fleuve a retrouvé une nouvelle jeunesse contre un chèque de 520 millions d’euros. On estime que plus de 10.000 ouvriers ont travaillé sur les chantiers de Shanghai 2010. 60.000 habitants ont été relogés, 272 usines déménagées. Selon les spécialistes, la facture doit avoisiner les 30 milliards d’euros !
Mais pour mieux goûter aux délices de cette mégapole qui vibre à 200 à l’heure, rien ne vaut de passer un voyage à bord du train à sustentation magnétique, le Maglev, qui vous transporte à 400 à l’heure du centre-ville à l’aéroport de Pudong. Shanghai a enfin retrouvé son rang de "perle de l’Orient". 70 millions de touristes, dont 3 millions et demi d’étrangers et un million d’Euopéens, sont attendus. C’est deux fois plus qu’à Aichi, en 2005 au Japon, lors de la dernière exposition universelle. Mais qui se souvient encore de Aichi ?
Reportage à Shanghai, Stéphane Pambrun