Une page blanche, sans publicité, au milieu de laquelle s’affiche le nom de l’entreprise : le style épuré de la fameuse page d’accueil Google s’est imposé sur Internet. Cette société de la Silicon Valley a installé la confiance dans sa marque : aujourd’hui, la grande majorité des internautes utilise ce moteur de recherche. Messagerie en ligne avec gmail, partage et diffusion de vidéos avec You tube, plates-formes de blogs, logiciels gratuits : Google propose un grand nombre de services dérivés qui connaissent pour la plupart un grand succès.
Cette success story a commencé à l’université de Stanford, aux Etats-Unis, en 1996 : les deux étudiants Larry Page et Sergey Brin travaillent sur un projet scientifique baptisé BackRub, concernant les moteurs de recherche. Ils imaginent un logiciel qui analyse les relations entre les sites web capables de rivaliser avec les logiciels concurrents. Les deux étudiants font le choix de mettre en évidence les sites ayant le plus grand nombre de liens. « Un document fréquemment cité est a priori plus intéressant qu’un document que personne n’a remarqué », avance Sergey Brin, cité dans un article du Monde daté de janvier 1999.
Les deux étudiants choisissent également de valoriser les sources les plus fiables: ils accordent davantage d’importance à un journal reconnu qu’à un fanzine étudiant. Ce système entraîne par exemple un renvoi vers le site de la Maison Blanche après une recherche avec les mots «Bill Clinton », alors qu’Altavista ne fait apparaître le site qu’après des dizaines de références. « Ce système de hiérarchie est l’une des clés du succès de Google, indique Daniel Ichbiah, auteur de Comment Google mangera le monde.
Une référence à « Gogol »
Larry Page et Sergey Brin ont par la suite dupliqué l’intégralité du web sur leurs ordinateurs ». Les deux étudiants arrivent à réunir un million de dollars et lancent la société Google Inc en septembre 1998. Ils choisissent ce nom en référence au mot Gogol, utilisé dans le traité Mathematics and the imagination, du mathématicien américain Edward Kasner, définissant un nombre formé du chiffre 1 suivi de 100 zéros. Edward Kasner avait demandé à son neveu âgé de neuf ans quel nom pourrait être donné à ce nombre, et l’enfant avait répondu « gogol », dont l’orthographe est devenue googol. Les deux étudiants ont légèrement déformé ce mot, pour obtenir Google. Ce nom possède également une similarité avec le mot anglais goggles signifiant lunettes, dont les deux O de la marque rappelle la forme. google illus 2.png" />
Le premier bureau de Larry Page et Sergey Brin sera un garage à Menlo Park, comme c’est souvent le cas dans la Silicon Valley. En février 1999, Google gère 500.000 requêtes par jour, puis 3 millions de requêtes en août de la même année. La société déménage à Palo Alto en mars.
En juin 2000, Google est le premier moteur de recherche à avoir référencé un demi-milliard de pages web. L’entreprise signe cette année là un partenariat avec Yahoo ! et commence à proposer de la publicité ciblée en fonction de mots clé. « Google prend le pas sur ses concurrents Altavista et Yahoo ! entre 2001 et 2002, paradoxalement au moment où le web va mal, et où les fonds de pension retirent leur argent des start-ups », explique Daniel Ichbiah. Google continue de grimper en popularité entre 2001 et 2004, et devient côté en bourse en août 2004. Juste avant cela, l’entreprise est en procès avec Microsoft, concernant la technologie Overture, conçu pour Ad Words, système gérant les publicités de Google. La marque finit par acquérir la technologie Overture sans que Microsoft ne reçoive de redevance.
Des critiques
En mars 2001, Larry Page et Sergey Brin font appel à Eric Schmidt, le PDG de Novell, pour prendre la direction de l’entreprise. En septembre 2001, Google obtient la validation de son brevet concernant PageRank, technologie permettant d’évaluer la fiabilité et la qualité des pages Internet pour sélectionner celles qui apparaissent en premier. Aujourd’hui, Google est le premier moteur de recherche sur Internet, particulièrement plébiscité en Europe et aux Etats-Unis.
Quelques critiques pointent cependant : certains accusent Google de détenir trop de données personnelles. « Il faudrait une loi pour que chacun puisse protéger sa liberté individuelle, notamment avec la possibilité de demander à voir les informations que Google possède sur chacun », opine Daniel Ichbiah. Par ailleurs, alors que la firme est habituée à connaître le succès, avec des applications comme Google earth ou Google maps, elle est confrontée à une légère difficulté pour son projet dans le secteur de l’édition. En France, les professionnels du livre ont refusé que les ouvrages soient diffusés gratuitement sur Internet, notamment pour des questions de droit d’auteur. « Le refus des éditeurs français est un détail, estime pourtant Daniel Ichbiah. Google a gagné la partie, car le projet marche bien dans le monde entier». La saga Google ne fait que commencer.