Philippe Waechter, directeur de la recherche économique de Natixis AM, attend la réunion du Conseil européen des 24-25 mars pour voir la concrétisation des objectifs du pacte pour l'euro.
BourseReflex : Que pensez-vous du pacte pour l'euro, voté ce we par les chef d'Etat européens, et prônant notamment le renforcement de la compétitivité, de l'emploi et la stabilité financière au sein de l'Europe?
Philippe Waechter : Cette réunion du 11 mars avait pour objectif de définir le cadre dans lequel l’économie européenne va fonctionner. Les objectifs avaient déjà été définis lors du pacte de stabilité début février. Ce pacte a pour vocation de trouver les règles qui permettront à l’économie européenne de fonctionner sur un mode qui soit proche de celui d’une zone monétaire optimale. Il faut donc éviter les dérèglements liés à la dette publique et aussi éviter que les situations passées de perte de compétitivité d’un pays par rapport à un autre ne se reproduisent plus. La question du pacte pour l’euro est d’essayer qu’il n’y ait pas de différence entre les pays européens. La mise en œuvre des objectifs est encore assez indéfinie. Nous sommes plus dans les orientations que dans des objectifs chiffrés.
BourseReflex : Etes vous favorable à une taxe sur les transactions financières comme cela est évoqué ?
Philippe Waechter : Je ne crois pas en cette taxe. Aujourd’hui on constate que l’euro n’est plus au cœur des préoccupations des investisseurs. Une taxe sur les transactions financières viendrait renforcer ce désintérêt des investisseurs pour l’euro. Nous sommes dans une situation compliquée car nous avons besoin de capitaux extérieurs pour financer notre économie. Auparavant, le principal attrait de la zone euro était sa stabilité financière. Aujourd’hui, c’est un peu moins vrai compte de l’ampleur de la crise des dettes souveraines. De plus, nous n’avons pas une croissance aussi forte que celle des pays émergents, ni la capacité de réaction de l’économie des Etats-Unis. En Europe, nous devons retrouver de l’attractivité.
BourseReflex : Le pacte pour l’euro n’a-t-il pas justement vocation à faire revenir les investisseurs sur l’euro ?
Philippe Waechter : Ce pacte est une bonne chose et crée les conditions pour une croissance forte et une cohérence entre pays européens. Néanmoins, ce pacte pour l’euro reste un mécanisme encore peu contraignant. On a l’impression que l’Europe se voile la face sur la problématique grecque. On renforce d’un côté le cadre dans lequel va évoluer la zone euro, ce qui est une bonne chose, mais d’un autre côté on reste flou sur toutes les problématiques de financement. Aujourd’hui la Grèce est l’économie qui est la plus en difficulté en Europe. A travers le pacte pour l’euro, dans lequel il est accordé une baisse du taux d’intérêt et un rallongement de la duration, on comprend que les européens ont la volonté de ne pas en faire une source de faiblesse trop importante pénalisant le reste de l’économie européenne. Il y a certainement des pressions supplémentaires à faire sur l’économie grecque afin qu’elle retrouve une dynamique plus proche de celle des pays de la zone euro.
BourseReflex : L’Europe et l’euro ne sont-ils pas un peu dépassés par rapport à l'attrait que représente les pays émergents, les Etats-Unis et le dollar ?
Philippe Waechter : On voit bien que l’Europe fait « vieille économie » vis-à-vis des pays émergents, mais l’enjeu est important. A nous de trouver les moyens d’être le plus réactif. Le cadre défini par le pacte pour l’euro en fait partie. Maintenant il faut aller au-delà : fixer des objectifs et des horizons pour que la situation devienne plus cohérente.
Lucie Morlot.