
La tension autour de la réforme des retraites est restée très vive vendredi, avec la paralysie d'un oléoduc alimentant les aéroports parisiens, le déblocage de dépôts d'hydrocarbures ordonné par l'Elysée et de nouveaux heurts entre lycéens et policiers, avant deux nouvelles journées de mobilisation samedi et mardi.
L'oléoduc approvisionnant en carburants les aéroports d'Orly et de Roissy, notamment, ne fonctionnait plus vendredi matin, n'étant plus approvisionné par la raffinerie Total de Grandpuits (Seine-et-Marne), en grève depuis plusieurs jours.
D'autre part, les autorités ont fait intervenir les forces de l'ordre pour libérer les accès de trois dépôts au petit matin, ceux de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), Bassens (Gironde) et Cournon d'Auvergne (Puy-de-Dôme), afin de prévenir le risque de pénurie de carburants.
Trois autres sites, bloqués depuis l'aube en Ille-et-Vilaine, près de Toulouse et à Ouistreham, près de Caen, ont été débloqués, également dans le calme.

"On ne peut pas se permettre une pénurie d'essence, il faut penser à toutes celles et tous ceux d'entre nous qui ont besoin de se déplacer", a justifié le secrétaire d'Etat aux Transports Dominique Bussereau.
La décision de déblocage a été prise jeudi soir lors d'une réunion autour du président Nicolas Sarkozy à l'Elysée.
Le secrétaire général de la CGT Bernard Thibault a réagi modérément, estimant que ce déblocage n'était pas la "méthode qui permettra de sortir de l'impasse sur la réforme des retraites". Il a accusé le gouvernement de "tendre le climat dans le pays".
De nouveaux dépôts ont été aussitôt bloqués par des manifestants, au Mans (Sarthe), à Caen, La Rochelle et Saint-Pierre-des-Corps, près de Tours.

Vendredi, dix des 12 raffineries de France métropolitaine étaient à l'arrêt ou en cours d'arrêt.
Dans une série de villes - Paris, Marseille, Lyon, Metz, Tours, Orléans, Versailles, Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne)... -, des manifestations de lycéens se sont poursuivies, rassemblant de quelques centaines à 2.000 jeunes. A Nantes, lycéens et salariés ont fait cause commune dans un même cortège.
A Lyon, jets de pierre sur les forces de l'ordre et dégradations diverses ont marqué le défilé. A Villeneuve-sur-Lot, un policier a été blessé, tout comme à Cannes. Même chose pour une proviseure adjointe tentant de s'opposer à l'intrusion d'éléments extérieurs à Bordeaux. Incidents aussi dans le Val-de-Marne: sept policiers légèrement blessés.
Plus de 150 "casseurs" ont été interpellés vendredi, a annoncé le ministère de l'Intérieur.
La multiplication des incidents, après ceux de Montreuil (Seine-Saint-Denis) et Caen la veille, ont conduit le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux à demander aux policiers de "limiter l'usage de la force".
Le préfet de police de Paris, Michel Gaudin, a ordonné de ne plus utiliser de flash-balls, comme à Montreuil, selon le préfet des Hauts-de-Seine. Une consigne donnée oralement, selon une source policière.
306 lycées étaient perturbés vendredi, soit 7,1% du total, un peu moins que la veille, selon le ministère de l'Education nationale. L'Union nationale lycéenne (UNL) avance 900 établissements concernés, dont 550 bloqués.

A la SNCF, le trafic s'est amélioré vendredi, mais l'entreprise conseille le report des voyages vers le sud ce week-end. Le nombre de grévistes continue de diminuer (15,5% selon la direction, 28,4% selon la CGT-cheminots).
Alors qu'une journée nationale de manifestations est prévue samedi, cette mobilisation multiforme pourrait, en l'absence de réponses de l'exécutif, se maintenir au moins jusqu'à mardi, nouvelle journée de grèves et de manifestations fixée par l'intersyndicale. Le Sénat doit voter le projet de loi mercredi.