
Les investisseurs avaient du mal lundi à croire que les Européens trouveraient cette semaine la solution tant attendue à la crise de la zone euro, devant l'ampleur de la tâche et sur fond de divergences persistantes.
Voulant voir dans les conclusions de dimanche des indices d'avancées, les Bourses asiatiques et européennes avaient ouvert en hausse. Mais à la mi-journée ces dernières ont viré au rouge, tandis que l'euro est reparti en baisse par rapport au dollar après avoir inscrit un plus haut depuis septembre en matinée.
A 11H40 GMT le Dax perdait 0,10% à Francfort, le CAC-40 lâchait 0,30% à Paris et à Milan, le FTSE Mib chutait de 1,26%.
La publication de l'indice PMI de l'activité privée en zone euro, qui s'est une nouvelle fois contracté en octobre, est venu rappeler la fragilité de la conjoncture européenne, et l'urgence d'endiguer la crise.
Or pour Carsten Brzeski, d'ING, "aucun nouveau fait, aucune nouvelle conclusion" ne sont sortis du sommet des dirigeants européens à Bruxelles dimanche, tandis que Barclays Capital n'y voyait "même pas une avancée partielle".
Les discussions du week-end ont tout juste dessiné les contours des composantes de "l'accord global" promis pour mercredi, date d'un prochain sommet: les banques européennes seront recapitalisées, le fonds de sauvetage européen FESF sera renforcé d'une manière ou d'une autre, et la dette grecque sera effacée dans une proportion beaucoup plus importante que prévu.
Sur ce point, les Européens sont "relativement proches d'un accord" avec le secteur bancaire, toujours censé apporter une contribution volontaire au deuxième sauvetage d'Athènes, a indiqué lundi le porte-parole du commissaire aux Affaires économiques Olli Rehn.
A la Bourse d'Athènes, les actions bancaires piquaient du nez, entraînant l'indice Athex dans une dégringolade de 5,01%. Le chiffre définitif de ce que la presse grecque décrit comme la "décote cauchemar" devrait tourner autour de 50%, et les banques grecques seront les premières touchées.
En Italie elle aussi en mauvaise posture, le chef du gouvernement Silvio Berlusconi, mis au pied du mur par ses partenaires, a convoqué pour 16H00 GMT ce lundi un conseil des ministres extraordinaire pour mettre sur les rails notamment une réforme des retraites.
La crainte d'une contagion de la crise à la troisième économie de la zone euro hante les dirigeants européens. Pour faire face à cette éventualité ils réfléchissent toujours fébrilement à un moyen d'augmenter la force de frappe du FESF, point central à régler d'ici mercredi.
La chancelière allemande Angela Merkel veut être en mesure de présenter mercredi matin les grandes lignes d'une solution au Bundestag, avant de partir pour Bruxelles.
Les députés allemands doivent dorénavant être impliqués dans toute utilisation ou modification du FESF, et contrairement à ce que prévoit le dispositif législatif, c'est toute l'assemblée qui devra se prononcer pour donner un mandat, et pas seulement la commission du Budget, a indiqué à l'AFP une source proche de la majorité conservatrice.
Sur le FESF, l'OPTION qui avait les faveurs de Paris, qui aurait vu le fonds se refinancer auprès de la Banque centrale européenne (BCE), a été écartée ces derniers jours. Berlin et la BCE elle-même la rejetaient catégoriquement.
L'évacuation de cette divergence majeure faisait d'ailleurs dire aux éditorialistes des deux côtés du Rhin lundi que Mme Merkel avait mis au pas le président français Nicolas Sarkozy.
Il reste deux options sur la table, éventuellement cumulables: un modèle qui le verrait agir comme assureur de la dette émise par les pays en difficulté; et une solution qui passe par des apports de fonds externes, d'investisseurs étrangers et du Fonds monétaire international (FMI).
Pour Gilles Moëc, de Deutsche Bank, cette variante, en impliquant d'autres puissances notamment la Chine dans le sauvetage de leur monnaie unique, représenterait un aveu de "défaite politique" pour les Européens.
Un constat qui n'est pas loin de s'imposer de toute façon, alors que les frictions augmentent de toute part. Non seulement le "moteur franco-allemand" a des ratés, mais les autres membres de la zone euro s'insurgent contre la main-mise de Paris et Berlin sur les processus décisionnels. L'attitude jugée moqueuse de Mme Merkel et M. Sarkozy à l'égard de Rome irritait lundi les Italiens.
Et les pays de l'UE hors euro, Royaume-Uni en tête, s'énervent des atermoiements et des apartés de leurs partenaires.