La sous-évaluation supposée du yuan est une question "techniquement difficile" qui reste à confirmer, a déclaré vendredi le directeur de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) Pascal Lamy sur France Culture.
M. Lamy a également indiqué que sur le long terme, il vaut mieux disposer d'une monnaie forte, parce qu'elle permet d'acheter "moins cher".
Tout en expliquant que le taux de change de la monnaie chinoise n'est pas du ressort de l'OMC, M. Lamy, interrogé sur la sous-évaluation supposée du yuan par rapport aux autres devises telles l'euro ou le dollar, a jugé ce débat de "court terme".
"C'est une question dont il faudrait que nous discutions techniquement", a commencé M. Lamy. "Regardez le yuan sur 15 ans, comparez-le au won, la monnaie coréenne, ou au yen, la monnaie japonaise, et vous verrez si cette idée extrêmement répandue dans la presse économique française, selon laquelle le yuan est sous-évalué, tient vraiment la route. C'est une question techniquement difficile", a-t-il poursuivi.
Selon lui, de façon générale, "on entend parler de sur-évaluation quand on a un problème de compétitivité, et quand la monnaie devient sous-évaluée on n'entend plus parler de ça. C'est un débat un peu intermittent, c'est une question de court terme", a-t-il affirmé.
La Chine est sous le feu de critiques de nombreux pays, notamment les Etats-Unis, qui l'accusent de maintenir la valeur de sa monnaie délibérément basse.
La question chinoise est de savoir si "compte tenu de sa puissance économique et de son insertion dans l'économie internationale", Pékin est "prêt" à une convertibilité totale de sa monnaie "sur des marchés où il y a de l'offre et de la demande", relève M. Lamy.
Pour l'instant, la Chine est "réticente pour des raisons qui tiennent", explique-t-elle, à la "fragilité de son système financier", a confié le patron de l'OMC.
M. Lamy est par ailleurs revenu sur la parité euro/dollar, actuellement en débat des deux côtés de l'Atlantique.
"Je ne crois pas que les Américains laissent filer leur monnaie, je pense seulement qu'il y a des anticipations de court terme qui sont fortement influencées par le niveau des taux d'intérêt et les arbitrages qu'on peut faire entre telle ou telle monnaie. Ce sont des comportements de marché", a-t-il indiqué.
Pour M. Lamy, "à long terme, il vaut mieux avoir une monnaie forte qu'une monnaie faible. Avec une monnaie forte vous achetez moins cher que si vous avez une monnaie faible, auquel cas vous achetez cher".
"Dans la mesure où l'Europe est extrêmement dépendante de ses exportations énergétiques et dans la mesure où à terme le prix de l'énergie montera, avoir une monnaie forte c'est importer de l'énergie moins cher", a-t-il par exemple fait valoir.
Selon le patron de l'OMC, "la question monétaire est une question de volatilité de court terme. A moyen et à long termes les parités s'alignent sur la force et la valeur des économies".