La série noire continue pour les équipementiers télécoms. Après les premières pertes de Nokia en 10 ans, les résultats inférieurs aux attentes d'Ericsson, c'est au tour d'Alcatel-Lucent (- 7,03% à 2,673 euros) de décevoir les investisseurs. La faiblesse des ventes de l'équipementier télécoms constitue la principale source de déception. Motif de satisfaction, la firme a renouvelé sa prévision d'un résultat d'exploitation ajusté aux alentours de l'équilibre sur l'ensemble de 2009. Malgré sa baisse, l'action affiche toujours l'une des plus fortes hausses du CAC 40 depuis le 1er janvier : +75%.
Au troisième trimestre, Alcatel-Lucent a réalisé un résultat d'exploitation ajusté, c'est-à-dire hors écarts d'acquisitions liés à sa fusion avec Lucent, de -11 millions d'euros, contre un bénéfice de 40 millions d'euros, un an plus tôt. Les analystes interrogés par Reuters visaient en moyenne une perte de 14,4 millions d'euros. L'équipementier télécoms se rapproche du point mort grâce à ses réductions de coûts. Sur les 750 millions d'euros annoncés pour cette année, 80% ont déjà été réalisés.
Le chiffre d'affaires du groupe s'est replié de 9,3% à 3,687 milliards d'euros, bien inférieur au consensus de 3,895 milliards. Cette performance décevante est le résultat de conditions de marché toujours difficiles : Les opérateurs télécoms réduisent leurs investissements pour défendre leurs marges tandis que la concurrence entre équipementiers télécoms reste vive.
Ce qui n'a pourtant pas empêché Alcatel-Lucent de réaffirmer sa projection d'une baisse de son marché adressable de 8% à 12% pour 2009, à taux de change constant. L'année prochaine, il envisage une hausse d'au moins 5% du marché. Une prévision qualifiée d'encourageante par Oddo.
(C.J)
AOF - EN SAVOIR PLUS
Performances et stratégie
Chiffre d'affaires
- Au 30/06/2009 : 7,503 milliards d'euros (-5,8%)
- Au 31/12/2008 : 16,984 milliards d'euros (-4,5%)
Résultats
- Au 30/06/2009, résultat d'exploitation : -316 millions d'euros, soit -4,2% des revenus; résultat net part du groupe : -302 millions (contre -317 millions au 1er semestre 2008);
- Au 31/12/2008, résultat de l'activité opérationnelle :-5,303 milliards contre -4,249 en 2007. Résultat net part du groupe : -5,215 milliards d'euros contre -3,518 en 2007.
Prévisions
Alcatel-Lucent a réaffirmé ses prévisions pour l'année 2009. Il prévoit toujours une baisse du marché global des équipements de télécommunications et des services de déploiement associés de 8% à 12% pour 2009, à taux de change constant. Le résultat d'exploitation ajusté (hors éléments exceptionnels) devrait atteindre l'équilibre en 2009.
Stratégie
A fin juin 2009, Alcatel Lucent estimait avoir atteint environ 35% de son plan annualisé de réduction de coûts. Ce plan vise (en rythme annualisé) 750 millions d'euros de réduction de coûts d'ici la fin du quatrième trimestre 2009. Des réductions d'effectifs sont prévues, notamment en France, ainsi que des réductions du nombre de sous-traitants, la rationalisation des sites, entre autres. A cela s'ajoute une stratégie de co-sourcing : le 18 juin dernier, Alcatel-Lucent et HP ont annoncé leur intention de mettre en oeuvre un projet d'une durée de 10 ans, qui devrait permettre d'améliorer l'efficacité de l'infrastructure informatique et de télécommunications d'Alcatel-Lucent. Des revenus devraient également être générés grâce à des offres commerciales conjointes.
Evènements financiers
Le groupe vient de lancer une émission d'obligations convertibles et/ou échangeables en actions nouvelles ou existantes (Océanes) pour 870 millions d'euros. Ce montant pourrait être porté à 1 milliard d'euros. L'objectif de l'émission est essentiellement de permettre le refinancement de l'endettement du groupe et le rallongement de sa maturité. La cession des titres Thales (20,8% du capital) à Dassault Aviation a été finalisée pour 1,566 milliard d'euros. L'entreprise étudie la possibilité de vendre d'autres actifs qui ne font pas partie de son coeur de métier.
Forces et faiblesses de la société
Forces
- Sur le second trimestre le chiffre d'affaires a progressé de 8,5 %, alors que le recul du marché était compris entre 8% et 12% à taux de change constants;
- Le groupe a publié un bénéfice net de 14 millions d'euros au deuxième trimestre. Il s'agit du premier profit depuis la fusion entre Alcatel et Lucent, survenue en 2006;
- Le nouveau management devrait faciliter la réorientation stratégique : le style direct du nouveau directeur général, Ben Verwaayen, et sa recherche de proximité avec les salariés, tranche avec l'équipe précédente;
- Le groupe est engagé dans un vaste plan d'économies, qui devrait améliorer ses performances opérationnelles. Il pourrait quitter son siège historique dans le VIIIe arrondissement de Paris;
- Le groupe a récemment réitéré ses objectifs financiers;
- L'équipementier vient de signer deux nouveaux contrats en Chine auprès de China Mobile et China Telecom, les deux autres opérateurs du pays. Le groupe est déjà le premier équipementier occidental en Chine, via sa coentreprise Alcatel-Lucent Shanghai Bell. La Chine constituerait un important relais de croissance car il bénéficie d'une hausse d'activité estimée de 5% alors que le marché mondial risque de chuter de 10% cette année.
Faiblesses
- La situation de trésorerie du groupe est tendue : à fin juin 2009, sa trésorerie opérationnelle était négative pour 330 millions d'euros tandis que le déficit de financement des retraites s'est creusé à 1,162 milliard d'euros;
- Le groupe ne cesse d'enregistrer des dépréciations d'actifs depuis sa fusion avec Lucent : l'an passé il a d- comptabiliser une perte de valeur sur actifs, plus importante qu'en 2007 et s'élevant à 4,725 milliards d'euros;
- Certains analystes considèrent que la stratégie n'est pas très claire et qu'elle doit encore faire ses preuves;
- Le groupe ne versera pas de dividende pour l'année 2008. Si distribuer des dividendes fait partie intégrante de la stratégie, les dirigeants ne peuvent dire quand l'entreprise pourra en verser.
La valeur et son secteur
Principales activités
Trois segments : opérateurs (68%), services (24%), entreprises (8%)
Le secteur
Les équipementiers télécoms sont pénalisés par les réticences des opérateurs à investir dans leurs infrastructures dans un contexte de crise. Ces derniers reportent leurs investissements pour préserver leurs marges. Les équipementiers doivent également affronter une concurrence accrue avec l'apparition de nouveaux acteurs. Les chinois Huawei et ZTE, qui ont renforcé leur compétence technologique, tirent les prix vers le bas.
La valeur dans son secteur
Leader mondial dans le secteur des équipements de réseaux d'opérateurs. Leader dans l'accès haut débit, en optique (terrestre et sous-marin), en CDMA (équivalent américain du GSM), et dans le secteur de la téléphonie d'entreprise en Europe occidentale.
Comment suivre la valeur
- Surveiller la santé des opérateurs télécoms est indispensable pour évaluer comment se porte la demande d'infrastructures auprès des équipementiers;
- Surveiller le développement en Chine, qui représente un enjeu majeur;
- Suivre l'amélioration des performances opérationnelles suite à la réalisation du plan de réduction des coûts.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Equipementiers télécoms
La technologie LTE («long term evolution») s'impose face au WiMax comme le standard de l'industrie pour les futurs réseaux de téléphonie mobile. Cette quatrième génération de téléphonie mobile représente une convergence au niveau mondial, aussi bien de la norme européenne (GSM-UMTS), que de la norme américaine (CDMA) et chinoise (TD-SCDMA). Néanmoins, si les équipementiers de réseaux affirment être prêts pour la LTE, il n'en est pas de même pour les fabricants de téléphones.