
Le groupe pétrolier Total a indiqué vendredi qu'il était "en discussions" concernant une vente de ses gisements historiques en France, tandis que les syndicats se sont inquiétés d'un projet de rapprochement de son raffinage et de sa pétrochimie attendu pour octobre.
"Total confirme son intention de cession de certains de ses actifs dans l?exploration et la production en France. Des discussions sont en cours, mais il est prématuré de fournir plus de détails", a déclaré à l'AFP une porte-parole de la "major" française.
Selon le Bulletin de l'industrie pétrolière (BIP) paru vendredi, Total est sur le point de réaliser cette vente, qui inclut l'emblématique champ de Lacq près de Pau, à deux petites compagnies.
Les champs de brut parisiens (Itteville, La Croix-Blanche, Vert-Le-Grand et Vert-Le-Petit) et aquitains (Vic Bihl, Lacq) seraient cédés au canadien Vermilion, le français Geopetrol devant, lui, reprendre les champs aquitains de Lagrave et Pécorade, selon le BIP.
En termes économiques, le retrait de Total serait négligeable: la France a représenté en 2010 0,4% de la production totale du groupe pour le pétrole (5.000 barils/jour) et 1,5% pour le gaz (85.000 pieds cubes par jour), selon la cinquième compagnie pétrolière mondiale.

Mais sa portée symbolique serait forte, le pétrole ayant été découvert à Lacq dès 1949 et ayant donné naissance localement à un important bassin industriel.
Cette cession d'activités "amont" de production interviendrait alors que se dessine une vaste réorganisation des activités "aval" (raffinage, pétrochimie et distribution) de Total.
Selon le quotidien économique Les Echos, le géant français projette de rapprocher ses activités de raffinage et de pétrochimie, tout en isolant les activités de distribution (stations-services). Interrogé par l'AFP, le groupe n'a pas fait de commentaire.
Mais les syndicats ont donné corps aux spéculations. C'est un "secret de polichinelle", a affirmé la CGT dans un communiqué.
"Au cours de l'été, le chef d'établissement de la raffinerie de Feyzin (banlieue lyonnaise) a dévoilé en comité d'entreprise la fusion prochaine des activités de raffinage et de pétrochimie du groupe Total", a expliqué le syndicat.
Selon deux sources syndicales interrogées par l'AFP, le projet devrait être présenté "au cours du mois d'octobre", probablement vers la fin du mois.
Il concernerait, selon les Echos, plus de 10.000 salariés sur les 36.000 que compte le groupe en France.
Raffinage et pétrochimie sont des activités complémentaires, la seconde fonctionnant à partir des grandes matières premières fournies par la première, et les usines sont souvent installées sur les mêmes sites.
"Un rapprochement des deux ferait effectivement sens et c'est ce que font déjà les autres compagnies européennes", a souligné Jean-Pierre Dmirdjian, analyste chez Oddo Securities.
L'immense partie des bénéfices de Total viennent désormais de l'exploration-production, le reste (raffinage, vente de carburants et pétrochimie) représentant moins de 20% des bénéfices totaux. Le raffinage en Europe souffre en outre de maigres marges et de surcapacités.
Pour François Pelegrina, représentant CFDT, le rapprochement de deux activités peu rentables pourrait être le prétexte à des restructurations. "Dans les fusions, 1 plus 1 n'ont jamais fait 2. Donc même s'il y a pas de suppressions d'emplois au moment de l'annonce, dans le temps forcément il y en aura", pense-t-il.
L'autonomie de la branche distribution pourrait, elle, préluder à une vaste réorganisation des 4.300 stations-service du groupe (dont un peu plus de 2.000 sous la marque Total), soit la moitié du parc français.
Le PDG Christophe de Margerie avait annoncé en juillet envisager d'étendre en France une expérience de stations-service à bas prix.
Souvent critiquée pour ses prix chers, même par les pouvoirs publics, la compagnie française souffre depuis plusieurs décennies de la forte concurrence des grandes surfaces.