Carrefour (+2,08% à 27 euros) figure parmi les plus fortes hausses du CAC 40. Le géant français de la grande distribution a reçu une proposition de la société brésilienne Gama visant à fusionner ses actifs brésiliens avec ceux de Grupo Pao de Açucar (GPA ou CDB), le numéro un local, déjà engagé dans un pacte d'actionnaires avec son rival Casino. A l'issue de l'opération, Gamma, détenue à 100% par le fonds BTG Pactual et soutenu par de la Banque nationale brésilienne de développement (BNDES), deviendrait un actionnaire de référence de Carrefour, avec une participation d'environ 18%.
"Cette opération serait a priori très profitable à Carrefour, dont les performances au Brésil sont décevantes et qui a perdu en 2010 sa place de leader dans la distribution alimentaire au profit de CBD", estime Aurel.
Et d'ajouter : "les synergies et les économies de coûts potentielles, couplées à la force de frappe du nouvel ensemble, devraient par ailleurs permettre d'améliorer la rentabilité de la nouvelle entité".
Sans surprise, Casino, qui détient 37% de CBD à travers une holding, Wikes, codirigée avec la famille Diniz, a rapidement réagi en s'opposant à ce projet de fusion. Le groupe dirigé par Jean-Charles Nouari avait déjà engagé fin mai une procédure d'arbitrage pour obliger Abilio Diniz, le président de CBD à respecter les termes du pacte d'actionnaires. L'homme d'affaires avait approché Carrefour pour étudier une éventuelle fusion de leurs actifs.
« Casino rappelle qu'elle a le pouvoir de s'opposer à ce projet au regard des accords existants et qu'aucune négociation concernant l'avenir de CBD ne peut être menée sans son accord et sans discussion préalable de ce projet au conseil d'administration de Wilkes, holding de contrôle de CBD », affirme le groupe.
« Contrairement aux termes du communiqué, il ne s'agit pas d'une proposition spontanée de Gama, véhicule d'investissement financier, mais d'un projet d'opération financière préparée de longue date et illégalement par Carrefour et Abilio Diniz», ajoute le distributeur, qui se dit déterminé à défendre au mieux l'intérêt de ses actionnaires.
L'enjeu est d'importance pour Carrefour et Casino. Le Brésil est le deuxième marché de Carrefour derrière la France (avec 12,3% de ses ventes totales) et représente 1/3 des 11,12 milliards de ventes que réalise Casino à l'international.
A la Bourse de Paris, les investisseurs semblent douter de la capacité de Casino à contrer l'offensive de son rival : l'action recule de 4,9% à 62,63 euros.
AOF - EN SAVOIR PLUS
Les points forts de la valeur
- Carrefour est le deuxième distributeur mondial, derrière l'américain Wal-Mart, et premier distributeur européen ;
- La marque Carrefour bénéficie d'une forte notoriété ;
- Lars Olofsson, à la tête de Carrefour depuis fin 2008, a imposé au groupe un virage stratégique majeur : recentrage sur la marque Carrefour et politique de prix plus bas et plus constants ; changement radical de management, avec notamment l'arrivée d'un ancien de chez Tesco à la tête de la division française ;
- Les activités internationales (50% du chiffre d'affaires) sont plus dynamiques et plus profitables en moyenne que celles des pays matures.
Les points faibles de la valeur/=
- La confiance des investisseurs a été entamée par deux avertissements sur résultats en deux mois au second semestre 2010 et la contre-performance persistante des hypermarchés au Brésil ;
- Les projets de cotation de Carrefour Property, le pôle immobilier, et d'indépendance de Dia, la branche discount, annoncés début mars 2011, suscitent la plus grande réserve de la part des analystes qui estiment que ces choix ne sont pas favorables au groupe : la 1ère opération risque d'entraîner des charges opérationnelles très lourdes pour les hypermarchés européens et de renchérir le coût du crédit pour le groupe tandis que la 2nde, avec une cotation prévue le 5 juillet à Madrid, fait sortir Carrefour d'une activité à très fort potentiel, notamment dans les pays émergents. Le fonds américain Knight Vinke, propriétaire de plus de 1% du capital de Carrefour, mènerait d'ailleurs une fronde contre le projet de cotation de Carrefour Property et tenterait de rallier d'autres investisseurs institutionnels à sa cause ;
- Le départ de Jean-Martin Folz de son poste d'administrateur et de vice-président est un indice de divergence également en interne, qui soulève une fois de plus les problèmes de gouvernance chez Carrefour ;
- Les difficultés dans les hypermarchés, du fait du changement des habitudes de consommation en France avec un attrait plus grand pour les magasins de proximité, restent l'une des principales préoccupations des investisseurs. Le nouveau format d'hyper « Carrefour Planet » peine à convaincre ;
- Les conditions de marché sont structurellement difficiles en France (forte présence des indépendants/franchisés), en Belgique (présence marquée des discounters) et en Italie (prédominance du commerce traditionnel), qui sont 3 des principaux marchés du groupe ;
- Certains se demandent également si la stratégie de pratiquer des prix plus bas ne va pas peser sur sa solidité financière. La dette nette du groupe s'est déjà nettement alourdie à près de 8 milliards d'euros en 2010 ;
- Le poids des pays émergents dans le chiffre d'affaires est beaucoup plus faible que Casino.
=/Comment suivre la valeur/=
- La consommation de produits alimentaires est traditionnellement peu cyclique mais les habitudes de consommation ont fortement évolué ces dernières années.
- Toutes les crises alimentaires auxquelles le public est de plus en plus sensible sont susceptibles de peser sur les ventes (vache folle, grippe aviaire, maîs transgénique) ;
- Le redressement de la rentabilité, objectif n