Safran (+ 2,27% à 26,595 euros) a confirmé la reprise des discussions avec Thales dans l'optique d'un échange d'actifs. Le premier se renforcerait dans les activités de navigation inertielle et de génération électrique et le second dans l'optronique (électronique appliquée à l'optique). Ces discussions ont lieu sous l'égide de l'Etat, qui en cette période d'austérité budgétaire souhaite optimiser l'outil national de défense. L'Etat possède 27% du capital de Thales et 30% de celui de Safran.
« Ce qui est certain, c'est que nous traitons actuellement le dossier de la rectification des frontières entre Thales et Safran sur le périmètre suivant : toutes les activités et compétences de navigation inertielle et de génération électrique chez Safran, et toutes celles d'optronique chez Thales », a déclaré Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement aux « Echos ».
Safran a officiellement confirmé ces discussions. « Dans l'évaluation des options possibles, Safran tiendra compte de ses objectifs stratégiques long terme de développement, notamment dans l'avionique », a précisé l'équipementier aéronautique.
Il y a un an, les discussions entre les deux groupes avaient échoué car elles comprenaient aussi l'avionique de Thales, à la demande de Safran, a indiqué Laurent Collet-Billon. Or, ni Thales, ni son actionnaire Dassault, n'y sont ouverts.
Safran a souligné qu'il n'était pas possible à ce stade d'évaluer la possibilité d'aboutissement de ces discussions ni de préciser les modalités de mise en oeuvre d'un éventuel accord. Le délégué général pour l'armement espère, lui, une décision de principe à l'été.
Dans l'optronique, une telle opération permettrait à Thales de devenir un leader mondial avec un chiffre d'affaires dépassant 1 milliard d'euros.
AOF - EN SAVOIR PLUS
Les forces de la valeur
- Safran est le troisième acteur de l'industrie européenne de l'aéronautique/défense (derrière EADS et BAE). Son potentiel de développement est substantiel ;
- Son désengagement de l'activité de communication a permis à Safran de poursuivre son recentrage sur son coeur de métier : la propulsion, l'aéronautique, la défense et la sécurité ;
- Le groupe vise à devenir un leader mondial dans les solutions d'identification basées sur la biométrie et dans la détection. Le marché de la sécurité est peu cyclique et dégage une croissance à deux chiffres. L'acquisition de l'américain L-1 Identity va renforcer ses positions ;
- Le groupe continue de bénéficier d'un effet mix entre les moteurs de première et seconde générations (soit environ 52% de la base installée) puisque 70% de ces moteurs ne sont pas encore passés en atelier de maintenance ;
- Le groupe génère des cash flows récurrents élevés et bénéficie d'une situation financière saine. Safran a donc les moyens de réaliser des acquisitions
Les faiblesses de la valeur
- La reprise des secteurs des hélicoptères et de l'aviation d'affaires reste fragile. Une hausse durable (plus de 6 mois, selon les analystes) du prix du pétrole pourrait venir peser sur le secteur ;
- Les plans de rigueur dans de nombreux pays européens visent notamment les dépenses militaires avec une baisse des crédits recherche ou encore une réduction de certains programmes transnationaux ;
- Le retard accumulé par le programme A400M est un handicap. Safran fait partie, via Snecma, du consortium européen chargé du développement du moteur de l'avion de transport militaire d'Airbus ;
- Safran est également dépendant du programme B787 de Boeing, sur lequel la visibilité reste faible ;
- L'étroitesse du flottant (39%) rend la valeur volatile.
Comment suivre la valeur
- Safran est sensible à l'évolution du secteur aéronautique civil et militaire ;
- Les négociations tarifaires avec les constructeurs, notamment Airbus et Boeing, sont à suivre ;
- Safran est une valeur très sensible au dollar puisqu'une variation de 10% de la parité aurait, toutes choses étant égales par ailleurs et hors couvertures, un impact de l'ordre de 315 millions d'euros au niveau de l'EBIT ;
- Les matières premières représentent environ 10% du prix de revient des produits de Safran ;
- L'un des principaux actionnaires de Safran est l'Etat avec 30,2% du capital, ce qui rend le dossier « politique » ;
- Le secteur aéronautique pourrait rapidement faire l'objet de grandes manoeuvres : l'Etat examine notamment le dossier de reprise de SNPE Matériaux Energétiques par Safran. Le groupe souhaite depuis plusieurs années mettre la main sur les actifs de propulsion solide de SNPE, notamment utilisée pour les fusées Ariane. Les discussions se poursuivent avec Thales en vue d'une correction de périmètre qui pourrait prendre la forme d'un échange d'actifs. De nombreux scenarii sont avancés ;
- Safran a toutefois tourné la page sur le dossier Zodiac. Le projet de rapprochement entre les deux groupes est abandonné. Cela devrait permettre aux investisseurs de se concentrer à nouveau sur les fondamentaux de Safran.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Aéronautique - Défense
Les analystes s'attendent à un rebond des fusions acquisitions dans le secteur, qui était jusqu'ici resté en marge du mouvement. La dernière opération a été réalisée fin octobre 2008, lorsque Finmeccanica a acquis DRS Technologies pour 5,2 milliards de dollars. Safran vient de boucler le rachat de l'américain L1 pour 1 milliard de dollars. Il aimerait également racheter Zodiac, alors que celui-ci tient à son indépendance. Plusieurs indicateurs soulignent la consolidation potentielle du secteur. Pendant la crise, les différents intervenants ont généralement géré leur trésorerie de façon prudente, ce qui leur permet aujourd'hui de bénéficier de liquidités abondantes. En outre, restructurés, ils bénéficient de finances assainies.