
Renault a proposé mardi des départs anticipés à la retraite pour pénibilité à 3.000 salariés sur trois ans, un dispositif réclamé par les syndicats, mais qu'ils interprètent comme un dégraissage alors que la direction n'a pas encore annoncé d'embauches en parallèle.
La mesure, dans le cadre de la gestion prévisionnelle des emplois et compétences (GPEC), serait ouverte aux ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise de la maison-mère et des filiales industrielles en France, âgés de 58 ans et plus début 2011, et ayant effectué 15 années de travail posté (travail en équipe par roulement) ou ayant une incapacité permanente d'au moins 10%.
Ils auraient la possibilité de partir en préretraite, financée par l'entreprise, jusqu'à l'âge légal de départ. Le salaire de remplacement pourrait s'élever à 75% du salaire brut.
Laurence Parisot (Medef) a aussitôt jugé "étonnant" ce choix pour les seniors de Renault, "dont un des actionnaires est l'Etat", y voyant un "signal contradictoire", alors que la réforme relevant l'âge de la retraite vient d'être promulguée.
Les syndicats du constructeur étaient demandeurs d'un tel dispositif, alors que la réforme des retraites a limité la prise en compte de la pénibilité aux salariés ayant un taux d'incapacité physique supérieur à 20% (10% dans certains cas) qui pourront continuer de partir à 60 ans.
D'autres entreprises comme Rhodia ont conclu des accords similaires à celui projeté par Renault. Le DRH du chimiste avait souligné que la réforme gouvernementale "ignore" le "travail posté", qui "a un effet indiscutable sur l'espérance de vie", sans se voir "forcément à 60 ou 62 ans".
Chez Renault, évalue la CFE-CGC, "au moins 95% des personnes éligibles vont y souscrire, c'est une demande forte". Mais "le souci est que l'on n'a pas eu le niveau des embauches en parallèle, donc pour l'instant tout ressemble à une diminution des effectifs", a dit un responsable.
La CGT dénonce également "un plan de réduction ou d'ajustement d'effectifs qui ne dit pas son nom". Le premier syndicat du constructeur s'inquiète aussi des conditions de travail de "ceux qui restent".
La direction donnera peut-être des éléments sur les recrutements lors d'une dernière réunion de négociation, le 7 décembre.

Mais d'après les syndicats, les embauches sur les sites industriels sont suspendues au plan stratégique Renault qui sera annoncé en février.
Sur la GPEC, "on ne donnera pas de chèque en blanc à l'entreprise si elle ne donne pas de visibilité industrielle", dit la CFDT.
Le deuxième constructeur français derrière PSA reconnaît qu'il doit "gérer une sous-activité" dans un ENVIRONNEMENT incertain en raison de la fin des primes à la casse, mais "il n'y a pas de licenciements et pas de plan planifié de départs".
Dans le cadre de la GPEC, Renault a aussi proposé des mesures de formation, de mobilité aidée vers d'autres sites Renault ou d'autres entreprises, via une suspension du contrat de travail durant 18 à 24 mois, avec à la clé une prime de trois mois de salaire.
"Il faut que nous soyons capables de mettre plus de fluidité dans la gestion des ressources et des compétences", a justifié Renault.
Autre souplesse dont profite Renault: le chômage partiel, qu'auront connu les usines en moyenne 15 jours en 2010. D'après les syndicats, celle de Sandouville, près du Havre, devrait être affectée en 2011 par 61 à 70 jours de chômage, et celle de Dieppe (Seine-Maritime), par neuf jours en décembre et janvier.
Le dernier plan social chez Renault remonte à 2008, avec 6.400 départs en Europe recensés jusqu'à mi-2009, dont en France 4.400, sur la base du volontariat.
Le groupe compte 55.000 salariés dans l'Hexagone.