Vivendi a enfin décroché son relais de croissance dans les pays émergents en s'assurant le contrôle de l'opérateur fixe brésilien GVT. Mais le prix proposé de 2,8 milliards d'euros pour la totalité du groupe, soit 33% de plus que sa première offre, est jugé trop élevé par les investisseurs. Résultat, l'action Vivendi (-2,09% à 19,395 euros) affiche la plus forte baisse de l'indice CAC 40. La surprise a été totale car GVT semblait promis à Telefonica qui avait renchéri deux fois sur Vivendi et était à même de réaliser des synergies plus importantes en raison de son implantation au Brésil.
Vivendi a acquis 57,5% du capital de GVT, dont 37,9% sous la forme d'actions et 19,6% sous la forme d'options d'achat irrévocables. Le groupe français a proposé 56 reals par action, à comparer avec sa première offre de 42 real et la dernière proposition de Telefonica de 50,50 reals. L'opérateur fixe brésilien est ainsi valorisé à 2,8 milliards d'euros.
Même si GVT est un actif de qualité en raison de sa croissance et de sa rentabilité élevées, la facture est trop salée pour les investisseurs. « Le prix payé nous paraît trop élevé », écrit ainsi CM-CIC Securities qui a abaissé sa recommandation d'Accumuler à Conserver. L'analyste souligne que Vivendi a payé GVT 9,1 fois son ebitda attendu en 2010 alors que les opérateurs émergents sont valorisés 6 à 7 fois l'EBITDA. Selon une source de marché, Natixis a également abaissé sa recommandation d'Achat à Accumuler. Les deux brokers regrettent que Vivendi ait abandonné sa discipline financière.
Conformément à la réglementation brésilienne, Vivendi va lancer une offre publique obligatoire à un prix de 56 real sur 100% du capital de GVT à la suite de l'achat du contrôle de la société.
(C.J)
AOF - EN SAVOIR PLUS
LEXIQUE
EBITDA : L'EBITDA (Earnings Before Interest, Tax, Depreciation and Amortization) est un concept anglo-saxon, proche conceptuellement de l'ebe français : Excédent Brut d'Exploitation. Il désigne le solde entre les produits et les charges d'exploitation, mais ne prend pas en compte les amortissements et les provisions.
Performances et stratégie
Chiffre d'affaires
- Au 30.06.2009 : 13 178 millions d'euros (+17%)
- Au 31.12.2008 : 25 392 millions d'euros (+17,2%)
Résultats
- Au 30.06.2009, Résultat opérationnel ajusté (EBITA) : 2,899 milliards d'euros (+12,9 %); résultat net ajusté : 1,467 milliard d'euros (+0,9 %)
- Au 31.12.2008 : Résultat opérationnel ajusté (EBITA) : 4 953 millions d'euros (+4,9 %) ; résultat net, part du groupe : 2 603 millions d'euros (-0,8 %)
Prévisions
Le groupe a récemment réaffirmé son objectif pour l'année 2009 avec une forte croissance du résultat opérationnel ajusté (EBITA). Le versement sous forme de dividendes d'au moins 50% du résultat net ajusté en 2009 a également été confirmé.
Stratégie
Elle consiste en trois points : dégager des moyens pour que Vivendi continue à se développer dans les contenus, les réseaux et l'innovation. Rémunérer les actionnaires en leur distribuant un solide dividende, tout en conservant la notation du groupe. Le troisième objectif consiste à trouver des relais de croissance, notamment à travers des acquisitions. A ce titre, Vivendi souhaite accélérer son développement dans les pays émergents.
Evènements financiers
Le groupe a lancé une OPA sur l'opérateur télécoms brésilien GVT pour 2 milliards d'euros. GVT bénéficie d'une forte croissance (+40% d'Excédent Brut d'Exploitation entre 2006 et 2008). Cette opération permet à Vivendi d'être présent en Amérique latine, alors qu'il en était absent jusqu'à présent. Par contre il a abandonné les discussions pour reprendre l'opérateur de télécoms koweîtien Zain car ce rachat n'aurait pas satisfait ses critères de discipline financière. En parallèle le groupe pourrait se désengager de certains actifs. Selon l'accord qui le lie à General Electric, il peut céder sa participation de 20% dans le groupe de médias américain NBC Universal, pour une valeur d'environ 4 milliards d'euros, entre le 15 novembre et début décembre.
Forces et faiblesses de la société
Forces
- Vivendi a publié des résultats semestriels solides, soulignant sa résistance face à la crise, même si les acquisitions ont dopé la croissance de l'activité ;
- Vivendi bénéficie de la prépondérance des abonnements dans ses recettes (près de 70%) du fait de ses activités de télécoms (SFR, Maroc Télécom) et de télévision à péage (Canal+). Il bénéficie ainsi de revenus récurrents qui offrent une bonne visibilité ;
- Sur le premier semestre, SFR, qui représente 47% du chiffre d'affaires total, a été très dynamique dans ses recrutements d'abonnés, surpassant même le leader Orange ;
- Un dividende en hausse est distribué au titre de l'année 2008 : à 1,40 euro par action, contre 1,30 euro au titre de l'exercice 2007. Il offre un rendement intéressant de 7%. Ce dividende ne devrait pas baisser à l'avenir ;
- Vivendi a une structure financière saine avec un ratio d'endettement net inférieur à 32% fin 2008 ;
- Le cours de l'action présente un potentiel de rebond car les fondamentaux sont bons. Avec un cours qui représente 9 fois les bénéfices attendus en 2009, la valorisation demeure attrayante.
Faiblesses
- Sur le premier semestre, le résultat opérationnel ajusté (EBITDA) de SFR, qui représente 45% de l'EBITDA total du groupe, a reculé de 3,3% ;
- Les positions concurrentielles de SFR, dont les marges sont déjà sous pression, seraient menacées dans le cas de l'attribution d'une quatrième licence mobile ;
- Le résultat net est amputé de la quote-part des intérêts minoritaires, qui constituent une part croissante du profit du groupe (39,5% au premier semestre 2009 contre 32,7% au 1er semestre 2008), notamment du fait des intérêts minoritaires d'Activision Blizzard ;
- Le cours de l'action a chuté de près de 10,5% depuis le début de l'année, se détériorant beaucoup plus que les cours des autres acteurs européens des médias et des télécoms ;
- Les investisseurs craignent la dilution qui surviendrait dans le cas d'une opération de croissance externe nécessitant une augmentation de capital.
La valeur et son secteur
Principales activités
- Télécoms (SFR+Maroc Télécoms) : 56% du chiffre d'affaires 2008
- Télévision payante (Canal +) : 18%
- Musique (Universal Music) : 18%
- Jeux vidéo : 8%
Le secteur
Les opérateurs adoptent plusieurs types de stratégie de croissance. Soit, à l'image de Vivendi, ils vont chercher leur croissance dans les économies émergentes, qu'il s'agisse de l'Afrique (avec le rachat finalement avorté de Zain) ou de l'Amérique latine (et l'OPA sur GVT au Brésil). Soit ils s'unissent pour consolider leurs positions sur un marché des télécoms européen saturé. Ainsi France Télécom et Deutsche Telekom se sont associés au Royaume-Uni. Ils vont fusionner leurs actifs britanniques et ainsi créer le premier opérateur mobile du pays, détenu à parité par chacun des intervenants.
La valeur dans son secteur
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