En tête du SRD, Air France-KLM bondit de 6,44% à 11,495 euros, soutenu par l'information de presse selon laquelle le groupe aérien s'apprête à profondément restructurer son activité cargo, lourdement déficitaire tout en relevant ses tarifs de façon spectaculaire (+20% à 30%). "Une telle annonce serait bien évidemment une excellente nouvelle", commente Oddo. Elle "démontrerait que le management est capable de prendre des mesures drastiques". Effectivement, en abandonnant son cargo au modèle "low cost", Air France tire un trait sur l'époque révolue où l'activité fret faisait la fierté du groupe.
Selon "Les Echos", la compagnie aérienne aurait en effet décidé de confier la majeure part de son activité dans le fret à sa filiale néerlandaise à bas coûts Martinair.
Il reviendra à cette petite compagnie, rachetée à 100 % l'an dernier par KLM, le soin d'assurer le coeur de métier : le tout-cargo à la demande. A l'exception de quatre appareils tout-cargo, Air France Cargo se recentrera, pour sa part, sur le transport de palettes dans les soutes de ses appareils passagers.
Cette redistribution des rôles s'accompagnera d'une réduction drastique de l'offre, destinée à compenser la baisse du trafic cargo, d'environ 20 % depuis le début de l'année (contre 5 % à 10 % pour le trafic passagers.
Cette spécialisation s'accompagnera également d'importants efforts de productivité au sein d'Air France Cargo, dont les effectifs (3.200 salariés) ont déjà fondu de 10% l'an dernier, grâce aux départs naturels et au transfert d'une partie des sureffectifs vers l'activité passagers.
Enfin, les tarifs devraient être réajustés à la hausse de 20% à 30% dès le mois prochain. Le quotidien souligne que cette restructuration devrait coîncider avec l'annonce par la Commission Européenne de l'amende pour entente tarifaire dans le fret et dont le montant est estimé à 305 millions d'euros.
A l'image du marché, Oddo se réjouit de cette nouvelle. Selon l'analyste, l'activité cargo d'Air France-KLM devrait représenter 10,9% du chiffre d'affaires 2009/2010 et enregistrer une perte opérationnelle de 347 millions d'euros après une perte de 207 millions en 2008-2009.
Le broker estime "que l'ENVIRONNEMENT actuel permet de lancer de telles réformes structurelles". Pour autant, l'analyste relève "deux incertitudes".
En premier lieu, le courtier s'inquiète des "tensions sociales" qui pourraient accompagner cette restructuration significative. En outre, il redoute que la hausse des tarifs ne conduise à une perte de parts de marché importante. "Toutes choses égales par ailleurs, une hausse des tarifs de 20% apporterait près de 500 millions d'euros de recettes supplémentaires sur une année pleine".
(P-J.L)
AOF - EN SAVOIR PLUS
Performances et stratégie
Chiffre d'affaires
18 956 millions d'euros (+3%) sur les neuf premiers mois de l'exercice 2008/2009 (à fin décembre 2008)
Résultats
Résultat d'exploitation courant : 445 millions d'euros (-69,3%) sur les neuf premiers mois
Résultat net part du groupe : perte de 309 millions d'euros (contre 1,29 milliard d'euros au 31 décembre 2007)
Prévisions
Pour l'exercice plein, clos fin mars, le résultat d'exploitation devrait être négatif de l'ordre de 200 millions d'euros. Pour l'exercice 2009-2010, du fait de la réduction de ses capacités tant dans le secteur passagers (-3,4%) que dans le cargo (-13%), le groupe anticipe une baisse de son chiffre d'affaires d'environ 6% (à change et périmètres constants).
Stratégie
Réagissant à une dégradation de son environnement, ses capacités pendant l'été ont été revues à la baisse, avec une offre en sièges kilomètres offerts (SKO) inférieure de 3,4% à celle de la saison d'été 2008. Air France-KLM a également annoncé des réductions d'effectifs et le gel des embauches. Il prévoit de supprimer entre 2 500 et 3 000 postes - sans licenciement - au cours des deux prochains exercices 2009-2010 et 2010-2011. Les investissements vont également être revus à la baisse. La livraison d'une demi-douzaine d'avions a été repoussée.
Evènements financiers
La fusion avec la société néerlandaise KLM, en 2004, a considérablement renforcé les positions concurrentielles du groupe. Elle lui a aussi permis de générer des synergies de 685 millions d'euros au 31 mars 2008. Le groupe vient de racheter 25% du capital d'Alitalia pour 323 millions d'euros à travers une augmentation de capital réservée. Le groupe est intéressé par une prise de participation au capital de la compagnie tchèque CSA, en cours de privatisation. L'acquisition de cette société lui permettrait de se renforcer en Europe de l'Est après que son concurrent allemand Lufthansa a récemment repris Austrian Airlines.
Forces et faiblesses de la société
Forces
- Avec la reprise d'Alitalia, Air France-KLM confirme sa suprématie en Europe devant son concurrent allemand Lufthansa;
- Le groupe joue un rôle moteur dans SkyTeam, créée en 2000, deuxième alliance mondiale avec 19% de part de marché, qui lui assure un avantage commercial certain;
- L'attractivité des « hubs » (plateforme de correspondance) d'Air France à Paris-Charles-de-Gaulle et de KLM à Amsterdam-Schiphol lui permet de mieux résister que ses principaux concurrents et de pâtir d'un moindre recul de son trafic;
- Le groupe est réactif face à la crise en adaptant à la fois sa politique de coûts et d'offre;
- Sa situation financière est solide avec une trésorerie de 4,3 milliards d'euros au 31 décembre 2008, des lignes de crédit disponibles de 1,4 milliard et un ratio d'endettement net de 0,48;
- Ses dépenses pétrolières devraient fortement baisser pour 2009-2010 grâce à la diminution des volumes de carburant couverts (43% environ contre plus de 90% en 2008-09).
Faiblesses
- Le secteur, qui traverse une forte crise, n'offre pas une visibilité suffisante;
- Le fret, qui représente 15% de l'activité totale du groupe, est particulièrement affecté;
- Le groupe n'a pas pu bénéficier pleinement de la diminution récente du prix du carburant sur son exercice 2008/2009 en raison du poids de ses couvertures pétrolières;
- Sur le troisième trimestre de son exercice (octobre à décembre 2008), le groupe a enregistré une perte opérationnelle de 194 millions d'euros, qui reflète l'accentuation de la crise économique.
La valeur et son secteur
Principales activités
- le transport de passagers
- le transport de fret
- les services de maintenance et d'entretien aéronautique
Le secteur
Selon l'Iata (association internationale du transport aérien), les chiffres d'affaires cumulés des compagnies internationales devraient reculer de 12% cette année et le trafic passagers devrait baisser de 5,7%. La perte nette est désormais estimée à 4,7 milliards de dollars pour 2009 contre un déficit de 2,5 milliards de dollars précédemment prévu. Elle devrait néanmoins rester inférieure à celle de 2008 (8 milliards) et au record de 2001 (13 milliards), grâce à la baisse du prix du pétrole.
La valeur dans son secteur
Air France-KLM est le premier groupe mondial en termes de trafic international de passagers et pour l'activité Cargo, et un des premiers fournisseurs mondiaux de services de maintenance. Il est le premier transporteur aérien en Europe.
Comment suivre la valeur
Son trafic passager est à suivre après un repli de 9,4% au mois de mars dernier et malgré une réduction de 3% du nombre de sièges proposés. Le revenu par siège/kilomètre offert et le coefficient moyen de remplissage des avions, tous deux en baisse, sont des indicateurs clés. L'évolution du prix du pétrole est également à suivre car le groupe est un grand consommateur de carburant, même s'il met en place des couvertures pour en atténuer l'impact.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Transport aérien
Le trafic aérien devrait subir un recul sans précédent en 2009 : selon l'Iata, le trafic mondial devrait reculer de 8% cette année, soit l'équivalent de 180 millions de passagers. C'est la plus forte baisse jamais enregistrée. Entre 2000 et 2002, suite aux attentats du World Trade Center, le trafic n'avait diminué « que » de 33 millions de passagers sur 2 ans. Le chiffre d'affaires des compagnies devrait lui, chuter de 15% cette année, ce qui correspond à une perte d'activité de 80 milliards de dollars. Quant aux pertes cumulées, elles devraient atteindre 9 milliards de dollars en 2009, contre 10,4 milliards l'an dernier. Ces pertes sont bien inférieures aux 13 milliards de dollars affichés en 2001 par les acteurs du secteur. Cet écart s'explique par une meilleure adaptation des compagnies à leur environnement dégradé : elles ont su réduire leur offre. Le secteur ne devrait pas connaître de grande faillite car les groupes bénéficient d'une meilleure trésorerie qu'en 2001. Néanmoins les pertes en 2009 pourraient être revues à la hausse compte tenu de la récente remontée du prix du baril de pétrole. En effet, le montant estimé par l'Iata ne tient pas compte d'éléments exceptionnels, comme des dépréciations liées aux couvertures pétrolières.