
Le feu vert donné vendredi à la reprise par Lufthansa de l'autrichienne Austrian Airlines sonne encore le glas d'un fleuron national du secteur aérien en Europe, dans un contexte d'une crise qui pourrait décimer nombre de petits opérateurs.
La compagnie autrichienne en difficulté a échappé à la faillite grâce à l'autorisation de la Commission européenne de son rachat par l'allemande Lufthansa, à certaines conditions négociées depuis des mois pour éviter que la concurrence ne soit biaisée.
Lufthansa, très intéressée par le marché d'AUA vers les pays de l'est de l'Europe, l'a acquis pour une somme modique (366.268 euros), l'Etat autrichien octroyant de son côté une aide publique de 500 millions d'euros pour éponger un tiers des dettes de la compagnie.
Mais en passant dans le giron d'un grand groupe, elle vient ajouter son nom à la liste des petites et moyennes compagnies qui perdent leur indépendance.
La crise amorcée il y a un an dans le secteur aérien mondial s'avère "bien plus sévère que celle suscitée par les attentats anti-américains du 11 septembre 2001, concentrée sur quelques mois", explique Fabio Gamba, secrétaire général adjoint de l'Association des compagnies aériennes européennes.
Quelque 80 compagnies ont disparu dans le monde l'an dernier.
Selon certaines estimations non officielles, 32 petites compagnies européennes auraient déjà fait faillite au cours des six premiers mois de 2009, un chiffre qui pourrait doubler d'ici à la fin de l'année, selon M. Gamba. L'Europe compte environ 180 compagnies aériennes.
Dans ce contexte morose, la concentration du secteur aérien devrait se poursuivre, mais peut-être en grand partie via la disparition pure et simple des petites sociétés les plus fragiles.
"Toute l'industrie souffre massivement et la consolidation va se poursuivre", note Robert Herberger, un analyste allemand de la banque Merck Finck.

Les compagnies à bas coûts sont les mieux armées contre la crise, suivies des grandes compagnies régulières, mais les plus petites souffrent énormément, résume-t-il.
C'est le cas par exemple de la portugaise TAP ou de la première compagnie aérienne espagnole, Iberia, qui a annoncé vendredi être passée dans le rouge au deuxième trimestre, en raison d'une "chute de la demande sans précédent". Iberia est en train de mener depuis un an un processus de fusion avec le transporteur britannique British Airways.
L'époque où chaque pays brandissait l'étendard national d'une compagnie aérienne, trop petite pour survivre, est finie.
SAS, Sabena, KLM, Swiss, BMI et désormais AUE, ont disparu ou sont passées dans le giron d'un groupe plus solide. Une autre moitié de survivants pourraient leur emboîter le pas dans les prochaines années, juge M. Herberger.
Il reste très peu de compagnies détenues entièrement par un Etat, la plupart se situant en Europe de l'Est. C'est le cas de petite a compagnie aérienne nationale tchèque CSA (Czech Airlines), en cours de privatisation, dont Air France-KLM vient de décider de se retirer de l'appel d'offres.
A partir des années 90, nombre de pays ont commencé à privatiser progressivement leurs fleurons aériens, comme Air France. Pour autant, la nationalité de leurs propriétaires reste un motif de fierté nationale.
Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi s'est battu bec et ongle pour que la compagnie aérienne Alitalia, en déroute, se retrouve sous le contrôle de grands patrons italiens, même si elle est adossée à Air France-KLM (25%).