Alcatel-Lucent gagne 0,88% à 3,995 euros alors que son président sur le départ, Serge Tchuruk, monte au créneau pour défendre son bilan à la tête de l'équipementier télécoms, qui été sévèrement critiqué par les investisseurs. Dans un entretien accordé au «Figaro», Serge Tchuruk a déclaré être «très fier» de laisser à la nouvelle direction un groupe «assaini», numéro un mondial dans les réseaux de télécommunications fixe et numéro trois mondial dans le mobile. Plus important, il a indiqué que son successeur et celui de la directrice générale, Patricia Russo devraient être nommés rapidement.
«La connaissance du métier des télécoms sera primordiale car la nouvelle direction devra être immédiatement opérationnelle», a précisé Serge Tchuruk. Des noms ont rapidement circulé à la suite de l'annonce du départ des numéros un et deux de l'équipementier télécoms. Les nouveaux dirigeants devraient être recrutés à l'extérieur du groupe.
Parmi les candidats potentiels, Ben Verwaayen, l'ancien patron de l'opérateur télécoms britannique BT aurait décliné l'offre. Les autres noms cités sont : Thierry Breton, Philippe Germond, actuellement président d'Atos et Stephen Burke, directeur opérationnel du câblo-opérateur américain Comcast.
Concernant la fusion entre Alcatel et Lucent, le président du groupe a affirmé que le problème des différences de culture avait été surmonté. Serge Tchruk a également considèré que même s'il ne «faut jurer de rien», la situation «s'équilibre en termes d'emplois». Depuis sa création fin 2006, la société a supprimé 16500 postes.
Son successeur va se trouver à la tête d'un groupe qui a affiché six trimestres consécutifs de pertes. Alcatel-Lucent est fragilisé par un marché des équipements télécoms difficile. Dans la téléphonie fixe, il doit faire face à la concurrence de sociétés chinoises très agressives sur les prix, comme Huawei. Dans la téléphonie mobile, le groupe franco-américain est affecté par le déclin plus rapide que prévu de la norme CDMA (équivalente du gsm en Amérique du Nord) et il ne dispose pas d'une taille suffisante dans la 3G (téléphonie mobile de troisième génération).
Pour rebondir, Alcatel-Lucent doit continuer à se développer dans les services aux opérateurs, c'est-à-dire dans la gestion des réseaux, estiment les spécialistes. Le groupe devra également étoffer sa division spécialisée dans la vente d'équipements et de services destinés aux entreprises.
(C.J)
EN SAVOIR PLUS
FORCES ET FAIBLESSES DE LA VALEUR
Les points forts de la valeur
- Dans une industrie très concurrentielle, Alcatel Lucent apparaît comme un acteur global disposant d'un portefeuille complet de produits et de services destinés aux opérateurs mais aussi aux autres types d'entreprises. La force du groupe est de détenir un portefeuille de technologies et de services permettant de proposer aux opérateurs des solutions de bout en bout.
- La diversité des activités permet une meilleure répartition des risques.
- Sur le "triple play" (voix, données et TV), à fort potentiel de croissance, l'offre d'Alcatel apparaît comme l'une des meilleures du marché.
- L'équipementier de télécoms cherche toujours à réduire ses dépenses, en recourant de plus en plus aux marchés émergents dans les domaines de la production, la R&D, les fournisseurs et les sous-traitants.
Les points faibles de la valeur
- La visibilité sur l'activité d'Alcatel est faible, le groupe a déçu les investisseurs à répétition.
- Alcatel souffre de son exposition à la technologie de téléphonie mobile CDMA, équivalent américain du GSM, en perte de vitesse.
- La baisse du dollar pénalise le chiffre d'affaires du groupe.
COMMENT SUIVRE LA VALEUR
- Il est indispensable de surveiller attentivement l'évolution du marché des télécommunications, en particulier la santé des opérateurs, pour apprécier l'évolution de la demande en équipements.
- Confrontés à la concurrence des opérateurs alternatifs, des fournisseurs d'accès à internet ou des câblo-opérateurs, les opérateurs perdent des abonnés, tandis que les revenus issus de la voix sont inexorablement amenés à s'effriter. Pour remédier à cela, les opérateurs n'ont d'autre choix que de se lancer dans le "triple play", c'est-à-dire de proposer des offres couplées d'accès au téléphone, à l'Internet haut débit et à la télévision.
- Les pays émergents représentent 45% du chiffre d'affaires d'Alcatel, et même 75% de ses revenus dans les réseaux mobiles. Ils pèsent déjà 45% des investissements des opérateurs dans le monde, part qui passera à 55% en 2008.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Equipementiers télécoms
Les ventes mondiales de téléphones mobiles ont continué d'enregistrer une croissance à deux chiffres (13,6%) au premier trimestre 2008, à 294,3 millions d'unités. Néanmoins des disparités apparaissent selon les régions. Ainsi, le cabinet Gartner souligne le recul de 16,4%, sur un an, des ventes en Europe de l'Ouest. Cette baisse serait liée au ralentissement économique de cette zone, auquel s'ajoute la maturité de la région en termes d'équipement mobile. Par contre la croissance dans les pays émergents ne se dément pas : en Asie-Pacifique, les ventes ont bondi de 26,6% sur un an, tandis qu'elles sont en hausse de 25,8% dans les pays d'Europe de l'Est. Parmi les fabricants, le Finlandais Nokia a consolidé sensiblement sa place de leader sur le premier trimestre, laissant loin derrière lui ses concurrents. Sa part de marché s'élève fin mars à 39,1% contre 35,5% un an plus tôt (avec 115,2 millions d'appareils vendus). Le Sud-coréen Samsung est le numéro 2 du marché avec 42,4 millions de téléphones. Motorola a conservé la troisième place mais sa part de marché chute de plus de 8 points à 10,2%. Sony Ericsson a subi également une baisse de sa part de marché et a cédé sa place de numéro quatre au Sud-coréen LG, dont la part de marché a progressé de 1,8 point.