Areva (+13,36% à 23,58 euros) a enregistré lundi la plus forte hausse du sbf 120 après l'annonce largement attendue du retrait de Siemens du nucléaire. Le géant de l'industrie allemande aurait pu être un concurrent dangereux d'Areva dans un marché nucléaire mondial aux perspectives néanmoins dégradées par la catastrophe japonaise. En effet, la principale conséquence de cette volte-face est l'abandon d'un projet d'entreprise commune avec le groupe public russe Rosatom dans le nucléaire.
Lorsque Siemens, en 2009, avait annoncé, à la surprise générale, son retrait d'Areva NP, la coentreprise avec le groupe français dont il détenait 34%, le groupe allemand avait affiché d'ambitieux projets avec son nouveau partenaire russe. A l'époque, Siemens visait la construction de 400 centrales nucléaires dans le monde dans les vingt années suivantes. Depuis, l'ENVIRONNEMENT a radicalement changé.
La décision de Siemens est la conséquence logique de l'abandon de l'atome annoncé en juin par le gouvernement Merkel à la suite de la catastrophe de Fukushima qui a choqué l'Allemagne.
Désormais, le conglomérat allemand entend profiter du tournant énergétique décidé par Berlin, que le PDG, Peter L&*#8221;scher, a qualifié de "projet du siècle". Siemens entend notamment axer son développement sur les turbines à gaz, les éoliennes et de nouvelles lignes haute tension capables de transporter de l'électricité sur de longues distances, avec un minimum de déperdition.
Des analystes relativisent la portée de la nouvelle pour Areva et souligne que le titre est peu liquide. A la mi-journée, il s'échangeait moins de 60 000 titres (1,36 million d'euros).
AOF - EN SAVOIR PLUS
=/Les points forts de la valeur/=
- Le groupe public (détenu à 83% par le CEA et l'Etat) se répartit désormais entre les Mines d'uranium, l'Amont (enrichissement, fabrication du combustible), les Réacteurs et Services, l'Aval (traitement et recyclage des déchets nucléaires) et les Energies Renouvelables ;
- Areva bénéficie d'un modèle économique intégré unique (amont / aval), résilient (fondé sur des contrats long terme pour les activités Mines/Amont, Enrichissement et Recyclage) et récurrent à plus de 80% pour la fourniture de produits et services à la base installée ;
- Les grandes puissances économiques sont devenues dépendantes du nucléaire. Hormis l'Allemagne et la Suisse, aucun tat engagé dans le nucléaire ne pense à une remise en cause de l'atome comme source de production d'électricité, malgré l'accident de Fukushima ;
- Areva jouit aussi d'une présence dans les énergies renouvelables (éolien, solaire, biomasse) qui complète l'offre d'énergie propre du nucléaire et qui bénéficiera de la forte hausse des investissements dans le renouvelable ;
- La cotation, depuis fin mai 2011, sous forme d'actions ordinaires (en remplacement des certificats d'investissement - CI) va accroître significativement le flottant et renforcer, avec l'attribution de droits de vote contrairement aux CI, l'attrait du titre pour des investisseurs stratégiques.
=/Les points faibles de la valeur/=
- Le débat sur la s-reté nucléaire après le dramatique séisme au Japon et ses conséquences sur les centrales de l'archipel pèse sur la valeur ;
- Le recul du carnet de commandes, les revenus en baisse et les premières estimations de dépréciations d'actifs post Fukushima ont conduit Areva à décaler en fin d'année l'annonce du nouveau plan stratégique ;
- La relance nucléaire tant attendue sera quelque peu différée, le temps de pratiquer les audits de s-reté ;
- La participation dominante de l'Etat français dans le capital social d'Areva reste une source d'incertitudes considérables pour les investisseurs ;
- Il n'existe pas de comparable coté ce qui rend le dossier parfois peu visible pour les investisseurs ;
- L'activité d'Areva nécessite de très importants investissements, notamment en amont ;
- La situation financière de l'industriel reste contrainte ;
- La construction de réacteurs n'est pas rentable. Cette activité était en perte opérationnelle, même avant les provisions du chantier finlandais. Le groupe propose des réacteurs de troisième génération appelés EPR, qui sont encore des prototypes ;
- Depuis le début du chantier de l'EPR, le groupe a été contraint de passer des provisions supplémentaires (et conséquentes) à de nombreuses reprises. Les analystes en attendent de nouvelles d'ici à l'achèvement du chantier. La visibilité reste donc faible sur ce dossier.
=/Comment suivre la valeur/=
- Le débat sur la s-reté nucléaire est à suivre ; la dimension politique de la valeur s'en trouve encore renforcée ;
- Areva peut encore être considérée comme une valeur de restructuration ;
- Anne Lauvergeon, l'emblématique présidente d'Areva depuis l'an 2000 et à l'origine de la fusion entre Framatome et Cogema, est remplacée par le numéro deux du groupe, Luc Oursel ;
- Le projet de filialisation de la branche minière est à suivre ;
- Areva et EDF sont historiquement imbriquées. Areva est le premier fournisseur d'EDF et EDF son premier client. Mais leur relation n'est plus exclusive et les deux groupes sont en désaccord sur deux contrats. L'une des brouilles, dans le traitement du combustible usé, a été résolue. L'autre, l'enrichissement d'uranium, est encore en discussion.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Services aux collectivités
Le deuxième acteur mondial dans le domaine de l'électricité est né. Deux ans après la fusion entre Gaz de France et Suez, GDF Suez vient de reprendre le britannique International Power. Il est ainsi propulsé du neuvième au deuxième rang des producteurs mondiaux d'électricité, derrière EDF. Il devient également le leader mondial des groupes de services aux collectivités (utilities) en tenant compte de la production de gaz. Toutefois, cette opération va accroître la dette de GDF Suez, qui va passer de 33,5 à 42,4 milliards d'euros. Le groupe français compte donc lancer des cessions de 4 à 5 milliards d'euros.