Yves de Chaisemartin a vécu vendredi 10 juin 2011 ses dernières heures à la tête d'Altran. Le verdict des actionnaires réunis en assemblée générale est sans appel. Philippe Salle et Monique Cohen, les deux représentants d'Altrafin Participations, le premier actionnaire de la société de conseil en technologie, ont été élus respectivement avec 91,52% et 83,42% des voix. En revanche, la nomination des trois administrateurs indépendants, proposée par Yves de Chaisemartin, a été rejetée.
Altrafin Participations, contrôlée par le fonds d'investissement Apax Partners, qui a le soutien des deux fondateurs d'Altran, dispose désormais de six voix sur un total de dix, contre quatre sur huit dans la précédente configuration.
Conséquence, le conseil d'administration, convoqué dans la foulée de l'assemblée générale, devrait obtenir la nomination de Philippe Salle au poste de PDG en remplacement d'Yves de Chaisemartin.
"Les jeux sont faits", a commenté l'actuel PDG d'Altran qui avait refusé de céder aux appels à la démission d'Altrafin.
L'assemblée générale s'est tenue sous haute tension. "Vous avez voulu me faire partir comme on fait partir un voleur de poules", a lancé Yves de Chaisemartin, en accusant Apax Partners de vouloir prendre le contrôle du groupe.
"Malgré les efforts colossaux faits par l'entreprise, force est de constater que les résultats ne sont pas au rendez-vous", a répondu Maurice Tchenio, fondateur d'Apax et présent au conseil.
En Bourse, les investisseurs n'ont guère réagi à cette chronique d'un départ annoncé. Le titre Altran a cèdé 0,94% à 5,246 euros.
AOF - EN SAVOIR PLUS
Les points forts de la valeur
- Le groupe de conseil en technologie est parvenu, grâce à son plan de restructuration, à alléger nettement sa structure de coûts ainsi que sa dette. Le groupe a réglé son problème de respect de covenants bancaires ;
- La marge opérationnelle courante devrait s'améliorer grâce aux économies liées aux plans de départs volontaires et à la poursuite de la réduction des coûts indirects ;
- Des mesures pour restaurer la confiance de la communauté financière ont été prises, comme la création d'un comité d'audit et la nomination d'administrateurs indépendants ;
- Le groupe a annoncé, fin juin 2010, une nouvelle organisation visant à accélérer son développement et à « créer de la valeur pour ses actionnaires ». Cinq groupes d'offres ont été définis avec un responsable « mondial » pour chacun. Le but est de transformer le groupe de simple développeur en « un véritable architecte, un maître d'oeuvre dans les projets qu'il mène pour ses clients » et donc de doper la croissance.
Les points faibles de la valeur
- Le plan de sauvetage n'est pas jugé suffisant pour résoudre les problèmes structurels du groupe. Certains analystes ont le sentiment que les multiples d'Altran valorisent déjà le rebond attendu des marges dans un ENVIRONNEMENT toujours morose ;
- Le groupe subit la pression sur les prix, imposée par ses clients. Parallèlement, l'inflation des salaires des ingénieurs du groupe est à surveiller ;
- Certains analystes estiment que le groupe va mettre du temps à s'adapter au changement de configuration dans l'automobile, qui est l'un de ses secteurs de prédilection ;
- La mise en oeuvre de la nouvelle organisation va être progressive et nécessitera 12 à 18 mois avant d'être complètement opérationnelle ;
- Les analystes attendent également une amélioration de la communication financière ;
- Altran ne verse aucun dividende et n'a pas pour projet d'en verser un.
Comment suivre la valeur
- Altran est une valeur très volatile en Bourse ;
- Le titre reste soumis à la capacité du groupe à confirmer son redressement ;
- Les catalyseurs sur le titre sont : l'accélération de la croissance organique, la cession des entités qui sous-performent (le Brésil et surtout ADL), et la poursuite de l'amélioration du taux de facturation ;
- Dans une société de conseil, l'essentiel des charges d'exploitation réside dans les salaires des consultants. A ce titre, le taux d'utilisation des consultants de l'entreprise par rapport à celui du secteur est un indicateur important à suivre. Lorsqu'il diminue (c'est-à-dire que le nombre de consultants sans mission augmente), les charges de l'entreprise pèsent davantage sur la rentabilité ;
- La qualité des solutions mises en place pour favoriser la mobilité des ingénieurs est décisive dans les périodes de difficultés conjoncturelles ou sectorielles.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Informatique - SSII
Les professionnels estiment que 2010 devrait être une année de transition car les carnets de commandes des sociétés françaises sont à nouveau remplis et que les clients dégèlent progressivement les prises de décision. Ils prévoient donc que le marché des logiciels et services devrait croître de 2,2% en France comme au niveau mondial, après un recul d'un peu plus de 3% en 2009. La reprise sera moins vigoureuse en Allemagne où elle n'atteindra que 1,6% et au Royaume-Uni où elle s'établira à 1,4%. La relance de l'emploi du secteur en France, qui a été entamée à la fin du second trimestre, devrait donc se poursuivre.