Sans surprise, les actionnaires du numéro un mondial du pneumatique, le groupe français Michelin, ont placé vendredi Jean-Dominique Senard en pole position pour en prendre la direction d'ici deux ans, tout en renforçant la gouvernance.
"Je tiens à vous exprimer toute ma reconnaissance pour la confiance que vous venez de me témoigner. Je ferai tout pour porter et maintenir au plus haut les valeurs de cette entreprise emblématique", a déclaré M. Senard après l'approbation de sa nomination en tant que gérant commandité de Michelin.
Il a également rendu un hommage appuyé à Edouard Michelin qui l'avait appelé à ses côtés en 2005, et qui est décédé accidentellement en 2006 à 42 ans, laissant seul aux commandes son co-gérant, Michel Rollier.
Mais M. Rollier, 66 ans, a fait savoir en février en présentant un résultat annuel record pour 2010 --1,05 md EUR-- qu'il comptait quitter son poste dans les deux ans, soit bien avant la limite statutaire des 72 ans, et passer la main à M. Senard, 58 ans.
Ce dernier est entré chez Michelin en 2005 en tant que directeur financier, après avoir travaillé chez Total, Saint-Gobain et Pechiney. Il avait été nommé gérant non commandité en mai 2007.
Il sera le premier patron du Bibendum à ne pas appartenir à la famille d'André et Edouard Michelin, fondateurs de l'entreprise en 1889.
Interpellé par un actionnaire à ce sujet, M. Senard a déclaré: "Je n'appartiens pas à la famille Michelin et j'en suis bien désolé", soulignant qu'il en portait néanmoins les valeurs.
"Le groupe Michelin va bien. Il a été modifié en profondeur mais a su conserver ses valeurs", a souligné pour sa part M. Rollier. "Le groupe est sorti de l'étau financier qui a contraint son développement pendant près de 20 ans".
Environ 1.900 actionnaires du groupe étaient rassemblés vendredi matin à quelques encablures du siège historique de Michelin à Clermont-Ferrand. Ils ont adopté l'ensemble des résolutions, qui visaient notamment à clarifier et à renforcer la gouvernance du groupe.
Ils ont approuvé l'introduction d'un mandat de 4 ans renouvelable pour la fonction de gérant commandité --au lieu d'une nomination jusqu'à 72 ans-- et pour celle de gérant non commandité (5 ans actuellement), ainsi que la création du poste de président de gérance. Avec, nouveauté, possibilité de révocation et de démission.
Une rémunération fixe pour les gérants commandités a été validée. Jusqu'à présent, ils étaient rémunérés uniquement en fonction des résultats, pouvant ne rien percevoir comme c'est arrivé à plusieurs reprises.
L'AG a également approuvé le versement d'un dividende de 1,78 euro, contre 1 euro l'année précédente.
En préambule de l'AG, un porte-parole du syndicat CGT a pris la parole devant les actionnaires pour évoquer les conséquences de la fermeture du site de Toul en 2009, et évoquer les problèmes de rémunération.
"M. Rollier a perçu une rémunération de 4,5 millions d'euros l'année dernière", a relevé auprès de l'AFP Jacques Chambon, responsable CGT, déplorant les suppressions d'emplois en France.
Lors d'un point presse à l'issue de l'AG, M. Senard a prévenu de nouvelles hausses tarifaires du fait de l'inflation des matières premières (caoutchouc naturel, pétrole).
Michelin a estimé le surcoût à 1,8 milliard d'euros pour 2011, "plus que notre résultat opérationnel l'an dernier", et une poursuite du renchérissement des matières premières aura désormais un "impact sur 2012".
Le prix des pneus, toutes les gammes sont affectées, devrait augmenter "entre 2 et 5% en année pleine mais nous n'avons pas encore pris de décision sur leur mise en oeuvre", a précisé M. Senard.