
Soin hydratant ou sérum anti-âge, de plus en plus d'hommes en Chine soignent leur apparence pour survivre dans la jungle professionnelle, un jeune marché à la robuste croissance qui intéresse au plus haut point les multinationales des cosmétiques.
L'homme chinois a moins de préjugés contre les soins de peau que l'homme occidental, et crèmes hydratantes, mais aussi exfoliants et même fonds de teint ou crèmes blanchissantes commencent à conquérir les citadins.
Allouant des budgets de plus en plus gros à la publicité et à la distribution, les groupes tels L'Oréal ou Beiersdorf (Nivea) se livrent une concurrence acharnée pour dominer ce marché prometteur pour lequel ils vont jusqu'à créer des produits spécifiques de grande consommation.
"La Chine devrait représenter environ 50% de la croissance mondiale attendue en soins de peau pour hommes entre 2009 et 2014", a estimé Euromonitor en novembre 2010, ajoutant que Procter & Gamble devrait aussi se jeter dans la bataille.
Sur ces cinq années, la croissance du marché devrait atteindre 28,7%, contre seulement 5,7% en Amérique du Nord et 7,9 % en Europe de l'Ouest.

Avec 206 millions d'euros, devant l'Amérique du Nord, les ventes de produits de soins de peau masculins ont enregistré en Chine une croissance supérieure à 30% en 2010, indique Euromonitor, qui note qu'"en quelques années seulement (on est passé) des simples produits nettoyants ou hydratants à "des lignes plus sophistiquées incluant les anti-âge, exfoliants et soins énergisants".
"C'est un marché très dynamique", se félicite Jackson Zhang, vice-président de L'Oréal Chine, précisant qu'environ 10% des Chinois utilisent des soins pour homme. Le client type est un homme des villes, mais pas seulement des mégapoles telles Shanghai ou Pékin, aussi des villes moyennes.
"Quand leur revenu augmente, les Chinois commencent par s'acheter une belle montre, ensuite de l'équipement informatique, puis ils vont vers les vêtements de marque et enfin vers les soins de peau", explique M. Zhang à l'AFP.
"Les hommes pensent que les soins de peau leur donnent un avantage concurrentiel pour leur emploi... ou pour les filles", ajoute-t-il.
Le désir de réussite sociale dans un pays qui voue désormais un culte décomplexé à l'argent et où le monde du travail est devenu très compétitif pousse de plus en plus de Chinois à prendre soin de leur apparence.
"Nos clients sont plutôt des cols blancs, des entrepreneurs, des gens dont le salaire est plus élevé que la moyenne", explique Ouyang Jiale, gérant d'un salon de beauté pour hommes de Pékin.
Les mentalités ont évolué par rapport à ces "dushi yu nan", ces "hommes de jade dans les villes" --version chinoise du "métrosexuel"-- qui se bichonnent. "Quand j'ai ouvert le salon, les hommes qui venaient étaient parfois mal perçus", dit le gérant. "Aujourd'hui les gens commencent à penser que les hommes, tout comme les femmes, ont besoin d'être beaux".
A tel point que le spa de Ouyang ne peut plus satisfaire la demande. "En septembre nous allons ouvrir un autre salon plus spacieux, plus un autre spa", explique-t-il.
Dans l'une des cabines du salon, après un nettoyage de peau, Wang, un ingénieur de 45 ans, se fait poser un masque.
"Avant je ne mettais pas de crème. Mon niveau de vie a augmenté et je prête de plus en plus attention aux soins de la peau", dit-il.
Plusieurs groupes étrangers ont sorti des produits spécifiques pour le marché chinois, comme des crèmes pour blanchir la peau.
L'un des produits phare de L'Oréal, qui indique, sans vouloir communiquer son chiffre d'affaires, être leader, avec près d'un tiers du marché (Biotherm, Men expert, Lancôme, Vichy et Garnier) a été l'an dernier une "mousse de charbon de bois". Un produit moussant, nettoyant et hydratant, spécialement développé pour le marché des hommes chinois.
Un produit attractif au prix de 39 yuans (4,5 euros) mais dont la couleur vert-de-gris aurait été rédhibitoire en Occident.
"Il y a une grande marge de croissance", assure Jackson Zhang, "il y a encore 90% des hommes en Chine qui n'utilisent pas de soins spécifiques pour hommes".