Confronté à des graves difficultés financières, le fournisseur alternatif d'électricité Poweo a choisi de céder ses activités de production pour "survivre" en attendant la mise en place effective de la loi Nome, qui doit stimuler la concurrence sur un marché ultra-dominé par EDF.
"On ne le fait pas de gaieté de coeur, mais c'est la seule solution pour survivre", a déclaré mercredi à l'AFP le président de Poweo Charles Beigbeder, évoquant la cession pour 120 millions d'euros du solde des activités de production du groupe à son actionnaire de référence, le groupe public autrichien Verbund, qui en possédait déjà 40%.
"Poweo considère que cette opération lui permettra de dégager les ressources de trésorerie appropriées au regard de ses engagements financiers pour l?ensemble de l?année 2011 a minima", précise le groupe.
Cette décision concerne la centrale au gaz en activité de Pont-sur-Sambre (Nord), et plus généralement, l?ensemble des actifs de production d?électricité du groupe, "qu?il s?agisse de centrales thermiques de type CCGN (cycle combiné au gaz naturel) en service ou en construction, ou d?actifs basés sur les énergies renouvelables".
Poweo conserve jusqu'au 30 juin 2013 la possibilité de racheter au même prix ces actifs auprès de Verbund, qui contrôle le fournisseur alternatif d'électricité à hauteur de 46%.
Face à ses importantes difficultés financières -- le groupe s'attend en 2010 à une perte opérationnelle, avant provisions, de 40 à 50 millions d'euros --, Poweo avait un temps étudié un retrait partiel du marché des particuliers.
Selon M. Beigbeder, cette OPTION n'est plus à l'ordre du jour et le groupe, qui étudiera "toute opportunité de consolidation du secteur" pour accélérer son redressement, conserve ses activités commerciales.
Mais il reste suspendu, comme tous les acteurs du secteur, à la mise en place effective de la loi sur la nouvelle organisation du marché de l?électricité (Nome), attendue dans les prochains mois, qui oblige EDF a céder jusqu'à un quart de la production de ses centrales nucléaires à ses concurrents pour stimuler la concurrence.
En cause, l'épineuse question du prix auquel EDF cédera sa production nucléaire.
"Il faut que le prix de cession soit le plus équilibré possible, proche de 35 euros par mégawattheure (MWh)", juge M. Beigbeder: "Nous ne demandons pas la lune, nous demandons à être tous sur la même ligne de départ".
Mais aux yeux de l'électricien public, ce prix ne doit pas descendre en-dessous de 42 euros par MWh.
"Nous sommes des entrepreneurs et des dirigeants pragmatiques, nous avons quand même pris ces décisions (de cession des actifs de production) sur la base d'un prix hélas un peu plus élevé" que 35 euros/MWh, souligne M. Beigbeder.
Le nouveau venu de l'électricité pâtit de l'écrasante domination d'EDF sur le marché français. L'électricien public dispose notamment de coûts de production imbattables grâce à son parc de 58 réacteurs nucléaires.
Le gouvernement a confié à Paul Champsaur, déjà auteur d'un rapport sur le marché français de l'électricité, la mission de faire des propositions sur le prix de cession de la production nucléaire d'EDF.
"On en est là, on attend", résume le sénateur UMP Ladislas Poniatowski, président du groupe d'études sur l'énergie et rapporteur de la loi Nome, rappelant qu'aucune échéance n'avait été fixée à Paul Champsaur.
"Je pense que le choix sera au milieu, entre un choix technique et un choix forcément politique. Ce n'est pas innocent, le prix auquel EDF devra vendre son électricité à ses concurrents", conclut M. Poniatowski.
Le titre Poweo gagnait vers 12H18 1,18%, à 5,12 euros, dans un marché parisien stable. Depuis le début de l'année, l'action Poweo a perdu plus de 60% de sa valeur.