
Après 10 ans de présence Outre-Rhin, EDF va sortir du marché allemand en vendant sa participation dans le groupe allemand EnBW, une décision "politique" imposée par les autorités régionales du Bade-Wurtemberg que l'électricien français n'a pas pu refuser.
Le Land du sud-ouest de l'Allemagne, région où est basé EnBW, va racheter au groupe d'électricité français sa part de 45,01% pour 4,7 milliards d'euros.
EDF s'est félicité d'une offre qui représente "une prime de 18,6% par rapport au cours de Bourse d?EnBW" et une plus-value avant impôts "d?environ 500 millions d'euros".
A cette plus-value, s'ajoutent 984 millions de dividendes perçus par EDF depuis sa première prise de participation dans EnBW en 2001.
En outre, la vente va permettre à l'électricien public, qui a réalisé de nombreuses acquisitions ces dernières années, de réduire sa dette "d?environ 7 milliards d'euros". A la fin juin, la dette nette d'EDF s'élevait à 44,1 milliards d'euros fin juin.
Malgré tous ces avantages, le groupe dirigé par Henri Proglio, se serait cependant bien passé de réaliser cette opération, dictée par des impératifs politiques.
"Le Land a exprimé récemment sa volonté de recentrer les activités d'EnBW exclusivement sur le territoire du Bade-Wurtemberg et de doter EnBW d'un actionnariat régional fort", a expliqué M. Proglio, au cours d'une conférence téléphonique avec des journalistes.
"C'est à l'évidence une décision politique contre laquelle il y avait des raisons de ne pas se battre", a-t-il ajouté.

Interrogé sur les raisons ayant pu motiver cette décision, il a refusé d'élaborer plus avant, se contentant de préciser qu'une opposition d'EDF "aurait pu coûter cher" au groupe public.
"Le conseil d'administration a jugé raisonnable d'accepter l'offre pour préserver les intérêts de notre groupe", a indiqué le PDG.
"Nous n'étions pas dans une position de force", a indiqué une source proche d'EDF à l'AFP, qualifiant le geste allemand de "repli populiste lié à des enjeux locaux".
L'annonce du Land intervient alors que des élections régionales sont prévues l'an prochain et que l'actuel gouvernement, dominé par une coalition entre les conservateurs de la CDU et les libéraux du FDP, est à la peine dans les sondages.
"La direction d'EDF a été lucide et courageuse en prenant la décision de sortir de ce marché à un moment où les fondamentaux se détérioraient" a estimé Bertrand Lecourt, analyste à la Deutsche Bank, qualifiant la proposition du Land d'offre qu'EDF "ne pouvait pas refuser".
A l'appui de sa décision, M. Proglio a mis en avant des "perspectives de développement assez peu porteuses" sur le marché allemand.
Les négociations avec OEW, groupement de communes allemandes, avec lequel EDF a un pacte d'actionnaires, rendaient impossible la prise de "contrôle de l'entreprise", a-t-il indiqué.
Et des "évolutions récentes du contexte économique, réglementaire et législatif" menaçaient d'affecter "sensiblement" les performances économiques d'EnBW, a-t-il ajouté.
Citant la surcapacité du marché de l'électricité, et un "impôt nucléaire assez significatif", M. Proglio a évalué à 500 millions d'euros les "charges additionnelles pour EnBW sur 2011-2016".
Toutefois, "l'Allemagne est un grand pays et je ne vois pas pourquoi on tournerait le dos à l'Allemagne", a-t-il assuré, sans plus de précision.
EDF, qui a réalisé 51% de son chiffre d'affaires hors de France sur les neuf premiers mois 2010, va voir cette part tomber à 44% en sortant d'EnBW.
L'électrien pourrait être tenté de se renforcer au Royaume-Uni, en Italie (où il détient 19,36% de l'électricien Edison), ou en Europe centrale, selon M. Lecourt.
L'opération EnBW "n'aura pas de conséquence sur la stratégie internationale du groupe autre que de renforcer ses moyens", a affirmé M. Proglio.