La banque franco-belge Dexia, en pleine transformation après être passée à deux doigts de la faillite en 2008, veut se recentrer d'ici 2014 sur la banque de détail et le marché turc en forte croissance, une stratégie accueillie sans réel enthousiasme à la Bourse mardi.
Il y aura d'ici 2014 "un changement profond dans l'ADN du groupe", a annoncé son administrateur délégué, Pierre Mariani, en marge d'une présentation stratégique à Bruxelles.
Victime de la crise financière, Dexia avait été sauvée de la faillite à l'automne 2008 par une intervention conjointe des Etats belge, français et luxembourgeois.
Pour compenser, la Commission européenne, gardienne de la concurrence dans l'UE, lui a imposé une restructuration passant notamment par l'abandon ou la cession d'activités risquées.
Aujourd'hui, Dexia doit trouver des relais de croissance pour remplacer les revenus tirés avant la crise des activités financières.
L'un des axes de transformation sera "un rééquilibrage des activités vers la banque de détail", selon Pierre Mariani.
La banque de détail devrait représenter en 2014 environ 60% des revenus du groupe, contre 36% avant la crise, en 2007. Cette montée en puissance permettra au groupe d'élargir sa base de dépôt et de réduire sa dépendance vis-à-vis du financement à court terme, révélée douloureusement en 2008.
L'autre grand axe, c'est "un rééquilibrage entre des marchés très matures, comme la Belgique et le Luxembourg, et un marché à forte croissance qui est la Turquie", a encore dit M. Mariani.
Dexia est présente en Turquie depuis l'achat en 2006 de DenizBank, appelée à devenir "le premier moteur de développement du groupe".
DenizBank devrait ainsi dégager en 2014 un bénéfice imposable d'environ 600 millions d'euros, un tiers de celui visé pour l'ensemble du groupe. Et sur les 10 millions de clients espérés à cette date par Dexia dans la banque de détail, 6 millions seront turcs, soit 50% de plus qu'aujourd'hui.
Pour y arriver, DenizBank mise sur des créneaux attractifs comme la collecte de dépôts et les services dédiés à l'agriculture. Elle compte notamment accélérer ses ouvertures de nouvelles agences dans les grandes villes et les zones rurales. Son objectif: 800 agences en 2014.
La Turquie n'est pas épargnée par les cessions d'actifs imposées par la Commission européenne. Dexia doit notamment vendre ses assurances-vie et compte "lancer dans les prochains jours la procédure" en ce sens, selon M. Mariani.
Mais DenizBank continuera de proposer dans ses agences les produits d'assurance d'un partenaire qui reste à trouver.
Dexia n'est pas la seule à s'intéresser à la Turquie. Le groupe français BNP Paribas a aussi fait de ce pays un de ses grands axes de développement avec la Pologne.
Jean-Pierre Lambert, analyste chez KFW, a jugé les pronostics de Dexia en Turquie meilleurs que prévu.
Mais cela n'a pas enthousiasmé la Bourse: l'action Dexia, qui avait il est vrai bondi de près de 7% à Bruxelles lundi avant la présentation stratégique, rechutait de 2,97% à 3,27 euros à 14H05 GMT.
Les annonces de mardi "ne changent pas grand chose fondamentalement", a relevé un analyste sous couvert de l'anonymat.
La direction de Dexia s'est notamment montrée très peu diserte sur un éventuel partenariat avec la Banque Postale française, qui diversifierait un peu plus les sources de financement de la banque franco-belge.
"On discute ensemble", a confirmé M. Mariani.
"Je n'ai jamais fait mystère de mon intérêt pour diversifier les sources de funding (financement) du groupe", a-t-il souligné, mais "nous ferons une annonce quand ce travail aura abouti. Tout le reste à ce stade, ce sont des spéculations".