Après une décennie de rêves américains déçus au sein du géant Ford, le fleuron de l'automobile suédoise Volvo a officiellement entamé lundi une nouvelle ère chinoise avec la finalisation de sa vente au constructeur Geely, avec cette fois le cap vers l'Orient.
Saluant "un jour historique" pour la plus grande acquisition à l'étranger d'un constructeur chinois, le président de Geely et nouveau président du conseil d'administration de Volvo a promis la continuité mais a clairement affiché l'objectif d'une Chine en plein boom automobile.
"La célèbre marque suédoise restera fidèle à ses valeurs de sécurité, de qualité, de souci environnemental et de design scandinave moderne, tout en renforçant les marchés européen et nord-américain et en augmentant sa présence en Chine et sur les marchés émergents", résume Li Shufu.
En déboursant 1,5 milliard de dollars (1,15 milliard d'euros) --quatre fois moins que le prix payé par Ford en 1999-- le chinois met la main sur une marque haut de gamme connue pour la sécurité et la robustesse de ses modèles --le talon d'Achille des constructeurs chinois.
L'acquisition ne manque pas de paradoxes, Geely et ses 13 ans d'expérience sur le marché automobile d'entrée de gamme s'emparant de Volvo, une marque octogénaire qui vend plus de voitures que lui, et surtout à des prix sans commune mesure.
Les deux firmes resteront néanmoins bien séparées, et Volvo gardera ses usines suédoises et belge sous le contrôle d'une direction autonome, selon Geely.
"Geely reste Geely et Volvo est toujours Volvo. Les deux sociétés entretiennent une relation fraternelle, pas une relation de parent à enfant", a souligné lundi Li Shufu.
Une page se tourne aussi pour Ford: Volvo faisait partie avec Jaguar et Land Rover de la grande offensive de l'américain au tournant des années 2000 sur le haut de gamme, une conquête qui s'est achevée en capilotade avec la vente désormais des trois constructeurs.
Exit les cadres Ford: le Britannique Stephen Odell, reparti chez l'américain comme directeur pour l'Europe est remplacé par l'Allemand Stefan Jacoby, ancien patron de Volkswagen aux Etats-Unis.
Les Suédois ont eux droit aux seconds rôles, avec Hans Oscarsson comme directeur financier, et l'ancien patron de Volvo Hans-Olov Olsson comme vice-président, mais l'attelage a le satisfecit des syndicats.
"Volvo va avoir une direction avec des capacités industrielles et internationales fortes. Avec la production, la recherche, le développememnt et le siège qui restent en Suède et avec la Chine comme le marché automobile avec la plus forte croissance au monde, nous espérons des effets positifs sur l'emploi", a réagi Stefan Löfven, le président du principal syndicat industriel suédois IF Metall.
Après des années difficiles, avec des ventes en forte baisse en 2008-2009 et des pertes annuelles depuis 2005, Volvo Automobile espère profiter de l'éclaircie économique pour confirmer le rebond de 20% de ses ventes cette année.
"Volvo devrait être dans une bien meilleure position sur le marché mondial au vu sa qualité, de sa technologie, de ses capacités de recherche et développement et de la valeur de sa marque", tranche Li Shufu, qui avait comparé en mars Volvo à un "tigre", qu'il faut sortir du "zoo à la forêt".
Geely a promis 900 millions de dollars d'investissements en plus du prix de l'acquisition.
Mais pour le vice-président de l'Association chinoise des constructeurs automobiles, Dong Yang, maintenir l'image de marque et la qualité des produits de Volvo tout en adaptant la marque européenne au marché chinois ne sera pas chose facile.
"Tout ceci devra être réalisé pas à pas en travaillant dur", selon M. Dong.