Imprimantes à plein régime, manutentionnaires mobilisés: les constructeurs aéronautiques Boeing et Airbus s'apprêtent à soumettre leurs propositions rivales pour le méga-contrat des avions ravitailleurs destinés à l'armée de l'Air américaine.
C'est au plus tard vendredi à 14H00 (18H00 GMT) que la base aérienne Wright-Patterson de l'US Air Force, à Dayton (Ohio, nord), devra avoir pris livraison de l'offre officielle des deux avionneurs, qui se présentera sous forme de cartons entiers de documents, a-t-on appris de sources proches des deux groupes.
Airbus a déjà soumis sa proposition au Pentagone jeudi, devançant de 24 heures son concurrent, et après avoir obtenu un délai de 60 jours pour soumettre son offre à la suite du retrait de son ancien partenaire américain Northrop Grumman.
La réception des offres marquera le début officiel de leur examen, qui devrait se poursuivre jusqu'à la fin septembre ou la mi-octobre, avant l'attribution par le Pentagone de ce contrat d'achat de 179 avions, évalué à quelque 35 milliards de dollars.
Vu la quantité de détails exigés par les militaires américains, qui cherchent depuis le début de la décennie à renouveler une flotte vieille d'une soixantaine d'années, les avionneurs doivent fournir plusieurs milliers de pages, illustrations et schémas compris, en six exemplaires.
Déjà lues, relues et vérifiées dans les moindres détails, ces propositions, résultat de millions de dollars de travaux, étaient en phase d'impression et d'emballage en début de semaine.
Chez Boeing, les documents seront chargés dans une voiture pour faire le trajet de Saint-Louis (Missouri, centre), site de la division de l'avionneur chargée du projet, à Dayton. Il y seront remis en main propre.
Chez Airbus, certains exemplaires ont voyagé en avion, d'autres en voiture, pour parer à tout éventuel délai d'acheminement.
Une troisième société, US Aerospace, a annoncé vendredi à la dernière minute son intention de remettre une proposition en partenariat avec le constructeur russo-ukrainien Antonov. Mais sa capacité à répondre aux exigences des militaires américains restait incertaine. Et Antonov n'a pas confirmé sa participation au projet.
A partir de vendredi, les experts de l'armée de l'Air étudieront les offres, poseront des centaines de questions et se rendront sur les sites industriels prévus pour évaluer la fiabilité des promesses des avionneurs.
Airbus propose une version militaire de l'A330, le KC-45, en assurant que plusieurs contrats déjà passés lui permettront d'être plus rapidement opérationnel que l'avion de Boeing, un 767 modifié.
Mais l'avion d'Airbus, plus grand que son rival, pourrait coûter plus cher en carburant, et nécessiter de plus grands hangars, faisant augmenter son coût.
D'après une source proche du dossier, les experts de la Défense "feront de leur mieux pour en terminer à la fin septembre" avec leur enquête.
S'ouvrira alors une "période silencieuse" d'un mois à six semaines, avant que l'armée de l'Air annonce son choix vers la mi-novembre - pour la troisième fois.
En 2003, c'est Boeing qui avait remporté ce juteux contrat, mais la décision avait été annulée après la révélation d'un conflit d'intérêt entre le Pentagone et l'avionneur: une responsable des achats du ministère de la Défense négociait son embauche chez Boeing durant l'examen des propositions.
A l'issue d'un deuxième appel d'offres, c'est Airbus, allié à l'américain Northrop Grumman, qui avait remporté le contrat en 2008. Mais la décision avait une nouvelle fois été annulée, la Cour des Comptes américaines (GAO) ayant soulevé des erreurs d'analyse des offres.
Cette fois, Airbus se lance sans partenaire majeur, en faisant équipe avec 200 fournisseurs, dont plusieurs grands noms de l'industrie américaine comme General Electric, Honeywell, Hamilton Sundstrand ou encore Goodrich.
Chacun des deux rivaux fait valoir que son projet, s'il est retenu, permettra de créer plusieurs dizaines de milliers d'emplois aux Etats-Unis.