L'avionneur européen Airbus a soumis jeudi au Pentagone sa proposition pour fournir 179 avions ravitailleurs, espérant battre son concurrent américain Boeing et décrocher ce contrat "du siècle", qu'il évalue à une quarantaine de milliards de dollars.
EADS North America, filiale américaine de la maison-mère d'Airbus EADS, a annoncé que six exemplaires d'un projet détaillé de 8.819 pages, résultat de deux mois et demi de travail et de millions de dollars de frais, avaient été remis en deux livraisons (par voie aérienne et par la route) à la base aérienne Wright-Patterson, à Dayton (Ohio, Nord).
"Nous sommes là pour gagner", a lancé le président d'EADS North America, Ralph Crosby, en annonçant cette offre lors d'un déjeuner de presse à Arlington, près de Washington.
Il a évalué le montant de la commande du Pentagone, qu'il a qualifiée de "première tranche", aux "alentours de 40 milliards de dollars".
Airbus a devancé de 24 heures la date limite fixée par le Pentagone, après avoir obtenu un délai de 60 jours pour soumettre son offre à la suite du retrait de son ancien partenaire américain Northrop Grumman.
Boeing devrait soumettre sa proposition vendredi.
Airbus propose à l'armée de l'Air un appareil qu'il a baptisé KC-45. Il s'agit d'une version modifiée d'un modèle de ravitailleur déjà choisi par les militaires australiens, britanniques, saoudiens et émiratis.
Ces appareils sont en cours de production et ont déjà accumulé 650 heures de vol, ce qui fait dire à Airbus qu'il peut livrer au Pentagone un produit éprouvé dans les meilleurs délais.
"Nous ne savons pas ce que la concurrence va proposer, mais elle n'aura pas les heures de vol" déjà accumulées par l'appareil Airbus, a souligné M. Crosby
Le KC-45 est une version modifiée de l'A330, plus grande que le 767 modifié que devrait proposer Boeing, et donc plus gourmand en carburant.
"Des questions de prix se posent", a concédé la direction d'EADS North America, mais "ce qu'on obtient par litre de carburant", autrement dit les performances de l'appareil, va plus loin avec l'appareil européen qu'avec son concurrent américain, a assuré M. Crosby. "Nous faisons une vraie proposition en valeur".
M. Crosby a également mis en avant 48.000 emplois qu'Airbus, partenaire de 200 sociétés américaines dans cette entreprise, prévoit de créer aux Etats-Unis, notamment dans l'usine d'assemblage de Mobile (Alabama), faisant valoir qu'il s'agit d'une aubaine pour une région à l'économie ravagée par la marée noire.
Les propositions d'Airbus et Boeing vont désormais faire l'objet d'un examen très approfondi du Pentagone, pendant environ trois mois, une période durant laquelle les avionneurs s'attendent à devoir répondre à des centaines de questions, et accueillir des visites des spécialistes dans leurs sites.
Le Pentagone devrait annoncer son choix vers le 12 novembre, selon M. Crosby, ce qui devrait mettre un point final à une saga qui dure depuis le début de la décennie.
Les ravitailleurs actuels remontent aux années 1950 et sont de plus en plus obsolètes. Le Pentagone avait accordé le contrat pour les renouveler en 2003 à Boeing, avant que ce contrat soit annulé pour conflit d'intérêt. Lors d'un deuxième appel d'offres, Airbus avait remporté la mise avec Northrop Grumman en 2008, mais cette décision avait été annulée quelques mois plus tard, la Cour des comptes américaine ayant relevé des erreurs d'appréciation.