Les investisseurs ont réservé un bon accueil au chiffre d'affaires du premier trimestre de Capgemini. L'action affiche la plus forte hausse du CAC 40 avec un gain de 3,68%. Ils ont apprécié la décroissance organique moins forte que prévu et le plus grand optimisme du groupe de conseil et de services informatiques sur ses perspectives. L'Agence option Finance a interviewé Nicolas Dufourcq, directeur général adjoint et directeur financier du groupe Capgemini.
Quels sont vos commentaires sur votre activité au premier trimestre ?
Nous avons réalisé au premier trimestre 2010 une performance meilleure qu'attendu. Des signes tangibles de stabilisation voire de reprise se sont en effet matérialisés au cours du trimestre. J'en veux pour preuve l'évolution séquentielle de notre chiffre d'affaires : en légère baisse par rapport au 4ème trimestre 2009, il est parfaitement conforme à la saisonnalité habituelle que nous observons entre un 4ème et un 1er trimestre. Nos deux métiers les plus cycliques - le conseil et Sogeti - redémarrent après avoir été les plus touchés par la crise au 2ème semestre 2009.
Je souligne d'ailleurs que le 1er semestre 2009 constitue une base de comparaison élevée puisque notre secteur n'a été touché par la crise que tardivement par rapport à d'autres secteurs d'activité. De ce fait et comme nous l'avions anticipé, nous enregistrons encore une baisse de notre chiffre d'affaires au 1er trimestre par rapport à la même période en 2009.
Dans votre communiqué, vous annoncez constater les « premiers signes tangibles de reprise ». Pourriez-vous apporter des précisions ? Qu'en est-il de la situation en Europe ?
Au nombre des premiers signes tangibles de reprise, nous constatons avant tout un regain de dynamisme sur certains segments du marché. La reprise se confirme au Etats-Unis avec un nombre important de signatures ce trimestre, et l'intégration de systèmes dans le secteur des services financiers croît de 3,3% par rapport au 1er trimestre 2009. Deuxième constat, globalement NOS prix se stabilisent et nous parvenons même à les augmenter marginalement sur certains segments même si quelques poches de pressions subsistent. Troisième point, nos prises de commandes atteignent quasiment le même niveau qu'au 1er trimestre 2009.
Et surtout, les cinq offres globales que nous avons lancées sur les segments les plus prometteurs du marché nous ont permis de générer un tiers de ces prises de commandes. Face à cela, nos managers ont repris intensément leurs campagnes de recrutements sur le terrain. En Inde, où nous prévoyons de recruter 3 500 personnes au 1er semestre, mais aussi dans les pays occidentaux comme la France.
La situation en Europe s'est nettement améliorée par rapport au trimestre précédent. Toutes les géographies enregistrent des niveaux de prises de commandes satisfaisants, à l'exception du Benelux qui est encore très touché par la crise. Je souligne que le Royaume-Uni continue d'afficher une bonne résistance.
Vous êtes un peu plus optimistes sur vos perspectives. Quels éléments pourraient vous conduire à les réviser à la hausse ?
Pour rappel, nous avons annoncé en février les prévisions suivantes pour l'ensemble de l'année 2010 : un chiffre d'affaires en légère rétraction de -2 et -4% à taux de change et périmètre constants avec un taux de marge opérationnel entre 6 et 6,5%.
Si notre performance du 1er trimestre nous conduit à déplacer nos attentes vers le haut de ces fourchettes de prévisions, il est cependant trop tôt aujourd'hui pour les modifier. Nous devons en effet prendre en compte deux paramètres : le temps de signatures des opportunités que nous avons en portefeuille et la vitesse de nos recrutements.
Ce que nous indiquons aujourd'hui, c'est que nous sommes plus optimistes sur nos chances d'afficher une croissance positive au second semestre.
On rappellera que les cinq offres globales du groupe sont la gestion des données (Business Information Management) et le développement et la maintenance des applications (application Lifecycle Services) lancés dès 2009 ; le test applicatif (Testing), les compteurs et réseaux intelligents (Smart Energy Services) et l'accompagnement des clients dans l'ère de la virtualisation et du cloud computing (Infostructure Transformation Services) mis en place au 1er trimestre 2010.
Propos recueillis par Christophe Jégu.
AOF - EN SAVOIR PLUS
Performances et stratégie
Chiffre d'affaires
Au 31.12.2009 : 8.371 millions d'euros (-3,9% en publié et -5,5% à périmètre et taux de change constants)
Au 31.12.2008 : 8.710 millions d'euros (stable mais en croissance de 5% à périmètre et taux de change constants).
Résultats
Au 31.12.2009, résultat opérationnel : 333 millions d'euros (-43,2%) - Résultat net part du groupe : 178 millions (-60,5%)
Au 31.12.2008, résultat opérationnel : 586 millions d'euros (+18,9%) - Résultat net part du groupe : 451 millions d'euros (+2,5%)
Prévisions
En considérant que le premier semestre 2009 constitue une base de comparaison encore élevée, le groupe prévoit qu'il affichera un chiffre d'affaires en recul au premier semestre 2010. Néanmoins il devrait renouer avec la croissance sur la seconde partie de l'année 2010. Pour l'ensemble de l'exercice 2010, Capgemini anticipe une légère rétraction (comprise entre - 2 et - 4% à taux de change et périmètre constants) de son taux de marge opérationnelle. Ce dernier devrait donc être compris entre 6 et 6,5%. Pour 2011, le groupe prévoit néanmoins de significativement améliorer sa marge avec un objectif de 8%.
Stratégie
Le groupe a pu préserver sa rentabilité en réduisant ses coûts, notamment ses dépenses de personnel. Plusieurs plans de restructuration ont été mis en oeuvre. Les effectifs sont passés de 91.621 personnes à la fin de l'exercice 2008 à 90.516 au 31 décembre 2009, soit une réduction de 1.105 salariés. Le recours à la sous-traitance a également été accentué : localisés essentiellement en Inde mais aussi en Pologne, en Amérique latine, en Chine, au Maroc et au Vietnam, les effectifs « offshore » représentaient 31% de l'effectif total du groupe (soit 28.000 personnes) au 31 décembre 2009, contre 27,5% un an plus tôt. Il prévoit d'employer environ 34.000 ou 35.000 salariés en "offshore" en 2010.
Evènements financiers
Le groupe vient d'acquérir la société suédoise IBX, spécialisée dans la gestion d'achats destinée aux grands comptes. Le chiffre d'affaires de cette petite société a atteint 30 millions d'euros en 2009, contre 31,46 millions d'euros en 2008. Le prix de cette acquisition, payée en cash, serait compris entre 40 et 50 millions d'euros. Capgemini espère ainsi réaliser des synergies et diversifier son offre.
Forces et faiblesses de la société
Forces
- Capgemini est parvenu à contenir la baisse de son chiffre d'affaires grâce à la stabilité de son activité infogérance, et à sa présence récemment renforcée dans le secteur public et dans celui de l'énergie et des « utilities », où la demande est restée plus soutenue;
- La marge opérationnelle a très bien résisté l'an passé, représentant 7,1% du chiffre d'affaires consolidé 2009, conforme à l'objectif annoncé. L'activité du Conseil affiche même le taux de marge particulièrement élevé de 11,4% ;
Capgemini recourt de façon croissante à l'offshore, ce qui lui permet de proposer des prestations à moindre coût en améliorant ses marges;
- Son bilan est solide avec, à fin 2009, une trésorerie nette de 1,269 milliard d'euros, plus élevée que ce qu'attendait le marché;
- Certains analystes estiment que Capgemini est sous-valorisé. Le cours du titre bénéficie donc d'un potentiel de valorisation.
Faiblesses
- Le groupe a annoncé un objectif de marge opérationnelle limité à 6,5% pour 2010, contre 7,1% en 2009, même si cette évolution résulte de sa volonté de ne pas réduire ses investissements commerciaux;
- La présence du groupe dans les pays émergents est inférieure à celle des grands acteurs du secteur;
- Le groupe est très sensible à l'évolution de la livre sterling car il réalise une part importante de son activité en Grande-Bretagne;
- Du fait d'une détérioration des résultats, le dividende par action a été réduit de 20% à 0,8 euro.
La valeur et son secteur
Principales activités
Quatre métiers : Le Conseil en stratégie et transformation, l'Intégration de systèmes, l'Infogérance, et les Services informatiques de proximité.
Le secteur
Les ssii françaises se portent plutôt bien car elles ont su s'adapter à la crise. Face à une baisse moyenne de leur activité de 4% à 6%, elles ont géré efficacement leur trésorerie. Jouer sur les délais de paiement leur a permis de limiter leur besoin en fonds de roulement. Ainsi, la plupart des groupes affichent de saines performances, le champion sur le plan de la trésorerie étant Capgemini avec une trésorerie nette de plus de 1 milliard. Après avoir remboursé 169 millions d'euros, Atos Origin n'affiche plus qu'une dette nette de 135 millions. Grâce aux restructurations, les SSII ont également restreint leurs coûts. Ces sociétés préparent aussi l'avenir en proposant de nouvelles offres à leurs clients.
La valeur dans son secteur
Sixième acteur mondial du conseil, des services informatiques et de l'infogérance. Leader français des services informatiques.
Comment suivre la valeur
- Comme pour toute SSII, les performances de Capgemini sont sensibles aux dépenses informatiques engagées dans les entreprises, aux effectifs et au niveau d'intercontrats.
- Suivre les acquisitions, d'autant que le groupe a affirmé sa volonté de rester actif dans ce domaine.
Rémunération des actionnaires
Dernier dividende versé
0,80 euro par action sur résultats 2009
Taux de distribution des dividendes
non disponible pour résultat 2009
Taux de croissance du dividende par action
-20%
Rendement
2,4%
Estimation du prochain dividende par action
0,80 euro en 2010
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Informatique - SSII
L'association professionnelle indienne, Nasscom, estime que sur l'année fiscale 2009-2010 (achevée fin mars), le chiffre d'affaires réalisé à l'export par les SSII locales devrait progresser de 5,5% pour quasiment atteindre 50 milliards de dollars. Pour l'exercice 2010-2011, elles devraient bénéficier d'une progression de 13% à 15% du chiffre d'affaires à l'exportation. L'activité sur le marché domestique devrait également bien se comporter, avec une augmentation prévue entre 15% et 17%, pour un chiffre d'affaires d'environ 16 milliards de dollars. Dans ce contexte, le secteur indien de la high-tech va continuer à embaucher massivement. Après avoir créé 90.000 nouveaux postes en 2009-2010, les recrutements devraient atteindre au moins 150.000 sur 2010-2011. Le secteur bénéficie des efforts du gouvernement, en particulier du projet d'attribution d'un numéro d'identification unique à tous les citoyens pour utiliser les nouvelles technologies.