La Russie réduira ses livraisons de gaz à l'Europe via l'Ukraine si celle-ci en prélève illégalement sans régler sa facture, a averti mercredi le Premier ministre russe Vladimir Poutine.
"Si nos partenaires payent pour leur propre consommation, ils recevront du gaz, s'ils ne paient pas, ils n'en recevront pas, et s'ils n'en reçoivent pas ils se serviront dans les gazoducs destinés au transit. S'ils le font, nous réduirons les livraisons", a déclaré M. Poutine lors d'un point presse à l'issue d'une rencontre avec son homologue autrichien Werner Faymann.
"J'espère fortement que (...) l'Ukraine remplira bien toutes ses obligations contractuelles", a-t-il encore dit.
La semaine dernière, le chef du gouvernement russe avait mis en garde sur la possibilité que l'Ukraine, durement touchée par la crise économique, ne puisse payer sa facture pour le mois d'octobre, laissant planer la menace d'un nouveau conflit gazier entre les deux pays. Mais la facture a depuis été réglée.
Tout début de tension entre Moscou et Kiev est source d'inquiétude pour l'Union européenne, un quart du gaz consommé dans l'UE provenant de Russie, dont 80% transite par l'Ukraine.
Début janvier, les Européens avaient subi une longue interruption des livraisons russes au beau milieu de l'hiver, en raison d'un conflit entre Kiev et Moscou.
Alors qu'on lui demandait si la Russie pouvait garantir que l'Autriche recevrait bien du gaz en janvier, M. Poutine a répondu: "Aujourd'hui, ce n'est pas à nous qu'il faut poser la question de la fiabilité" des approvisionnements.
"Ils (Kiev) ont les moyens financiers, le Fonds monétaire international nous le confirme", a-t-il ajouté.
Le FMI a accepté en novembre 2008 d'accorder un prêt à Kiev de 16,4 milliards de dollars en plusieurs tranches.
Selon M. Poutine, le problème réside en réalité dans le fait que l'Ukraine est en campagne électorale pour la présidentielle du 17 janvier, à laquelle Mme Timochenko et le président sortant Viktor Iouchtchenko sont candidats, et qui s'annonce très disputée.
Il avait déjà accusé fin octobre le président Iouchtchenko de bloquer le paiement du gaz russe. De leur côté, les Ukrainiens soupçonnent Moscou de tenter par divers moyens d'influer sur la scène politique de leur pays.
Le Premier ministre russe a estimé que le projet de gazoduc South Stream, qui doit lui permettre d'exporter du gaz vers l'Europe en contournant l'Ukraine, "disciplinerait" Kiev.
"La diversification des livraisons de nos hydrocarbures accroîtra leur fiabilité. Cela disciplinera entre autres nos partenaires de transit", a-t-il dit.
Il a par ailleurs indiqué qu'un projet d'accord était en préparation entre la Russie et l'Autriche sur la participation de Vienne à South Stream.
"Actuellement un accord spécial de coopération entre nos pays sur la réalisation du projet est en préparation et nous avons convenu avec Monsieur le chancelier fédéral qu'il fallait que le travail sur ce document soit finalisé dans les plus brefs délais", a-t-il dit.
M. Poutine s'est aussi prononcé en faveur d'une prolongation de l'oléoduc russe Droujba, acheminant du pétrole russe en Europe centrale via l'Ukraine, en direction de l'Autriche.
"L'approfondissement de notre coopération énergétique répond entièrement à l'idée de prolonger l'oléoduc Droujba par une branche partant de Bratislava vers la raffinerie de Schwechat, en banlieue de Vienne", a-t-il déclaré.