Publicis gagne 4,3% à 25,97 euros ; les investisseurs saluent son « coup » stratégique : le rachat du spécialiste de la communication numérique Razorfish. Il s'empare de cette filiale de Microsoft au nez et à la barbe des autres grands groupes publicitaires, comme Dentsu et WPP, pour 530 millions de dollars (380 millions d'euros). Grâce cette opération, il atteint avec un an d'avance son objectif de réaliser 25% de son activité dans le numérique. Certaines zones d'ombre demeurent cependant : les détails de l'alliance stratégique avec Microsoft et un possible conflit d'intérêt.
Cette transaction sera réalisée par le versement de 6,5 millions d'actions auto-détenues et le solde sera réglé en numéraire. Le numéro un mondial des logiciels détiendra ainsi 3% de Publicis, dont il deviendra l'un des plus importants actionnaires derrière Elisabeth Badinter et Dentsu.
Razorfish continuera de fonctionner sous son nom et rejoindra VivaKi, une entité transversale spécialisée dans la publicité numérique qui comprend Digitas, Denuo, (publicité numérique), Starcom MediaVest et ZenithOptimedia (agences médias).
Razorfish va apporter à Publicis les compétences technologiques pour lesquelles il est reconnu, tandis que son intégration dans le groupe français lui permettra de réaliser des économies de coûts, mais aussi d'élargir sa base de clientèle et son assise géographique.
L'autre aspect de cette opération concerne l'alliance stratégique nouée entre les deux parties. Publicis s'est en effet engagé sur un certain volume d'achats de publicités en ligne et de liens publicitaires sur les sites de Microsoft. Razorfish demeurera, lui, le fournisseur préférentiel de l'américain en matière de services de communication numérique.
C'est la signature de ce partenariat stratégique qui a permis à Publicis de ramasser la mise tout en obtenant un prix jugé raisonnable, voire faible par les analystes, étant donné la qualité de la cible. « Cela soulève en retour des questions à propos de la nature des engagements promis par Publicis à Microsoft dans le domaine publicitaire », écrit ainsi Citigroup.
Pour sa part, CM-CIC Securities s'inquiète d'un éventuel conflit d'intérêt, « les agences médias de Publicis ayant intérêt pour satisfaire les minimums garantis à privilégier les supports médias de Microsoft...».
(C.J)
AOF - EN SAVOIR PLUS
Activité de la société
Publicis Groupe est le troisième groupe mondial de communication.
Publicis Groupe, est organisé autour de 3 piliers stratégiques :
- la publicité, avec 3 réseaux mondiaux (Publicis, Leo Burnett Worldwide et Saatchi & Saatchi), des 'multihubs créatifs' (Fallon Worldwide et Bartle Bogle Hegarty - détenu à 49 %), et des agences régionales à haute valeur créative.
- le conseil et achat média, où il détient la place de numéro deux mondial grâce à ses deux grands réseaux (Starcom MediaVest Group et ZenithOptimedia), ainsi qu'avec Médias & Régies Europe (vente d'espaces publicitaires),
- les Agences Spécialisées et Marketing Services (SAMS), avec en particulier le marketing direct, le CRM, la communication santé, les relations publiques...
En 2006, le groupe s'est renforcé dans la communication digitale en lançant une OPA amicale sur le géant américain Digitas. Publicis deviendra le premier groupe mondial dans le domaine de la communication digitale et interactive.
Les points forts de la valeur
- La qualité et la vision stratégique du management du groupe sont reconnues.
- Le groupe dispose de solides fondamentaux : exposition significative aux pays émergents et à la communication interactive.
Les points faibles de la valeur
- Le groupe, qui réalise plus de 40 % de son revenu en Amérique du Nord, est très exposé au dollar.
- Le risque lié à la succession de Maurice Lévy, président du directoire.
Comment suivre la valeur
- Le groupe est dépendant de l'évolution du marché mondial de la publicité, lui-même sensible à la conjoncture économique. A noter que le poste Revenu est plus significatif que le poste chiffre d'affaires dans le secteur de la publicité. Les analystes surveillent particulièrement le niveau de croissance interne. Il faut également surveiller le "new business net" qui correspond au budget publicitaire annuel estimé des gains de budgets (ce qui inclut à la fois les nouveaux clients, les clients conservés après remise en compétition du budget, et les nouveaux produits ou marques gagnés auprès des clients actuels) moins le budget publicitaire annuel estimé des pertes de budgets.
-Le cours du dollar est une donnée sensible à surveiller puisque Publicis est réactif à son évolution.
-A suivre également, les synergies issues du rachat de Digitas par Publicis.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Communication - Publicité
Même la publicité en ligne, qui a longtemps affiché une forte croissance, pâtit de la crise. Selon l'Interactive Advertising Bureau (IAB), aux Etats-Unis, les dépenses publicitaires sur internet ont chuté de 5% (5,5 milliards de dollars) au premier trimestre. Il s'agit de la première baisse depuis 2002 et l'explosion de la bulle Internet. Pour le bureau d'analyse IDC, la crise est encore plus sévère, avec un recul estimé, sur la même période, de 6,9% aux Etats-Unis et de 4,3% sur le marché mondial. Même les liens sponsorisés ont enregistré une baisse de leurs recettes (-2,1%), toutefois moindre que celles des petites annonces et des bannières publicitaires (respectivement -14,9% et -10,8%). Quant au marché publicitaire français, TNS Media Intelligence estime que son repli s'est poursuivi en avril (-4%). Sur les quatre premiers mois de l'année, la baisse atteint 4,3% pour une valeur brute du marché de 7,5 milliards d'euros. Les revenus de la publicité extérieure se sont effondrés de 24,3% alors que ceux issus d'Internet ont continué à progresser.