
Malgré un léger rebond en début d'année, les grandes banques suisses sont loin d'être sorties d'affaire et sont toujours confrontées à des perspectives "sombres", a averti jeudi la Banque nationale suisse (BNS), balayant les espoirs d'un rétablissement rapide.
"En matière de profitabilité, 2008 a été la pire année jamais enregistrée", estime l'institut d'émission dans son rapport sur la stabilité financière.
Les quelque 327 banques de la Confédération ont ainsi vu leurs bénéfices fondre de 40,3% à 8,4 milliards de francs suisses (5,6 milliards d'euros). Le nombre d'établissements ayant enregistré une perte l'année dernière est passé de 11 en 2007 à 43 l'année suivante.
Loin d'être sorties du bourbier du "subprime", les perspectives à court et moyen terme demeurent "sombres" pour les banques, avertit la BNS.
Les deux géants bancaires de la Confédération sont pourtant revenus de loin au premier trimestre.
UBS, qui a subi l'année dernière une perte abyssale de 20,9 milliards, a redressé la barre avec une perte nette ramenée à 1,975 milliard au premier trimestre, contre 11,6 milliards sur les trois premiers mois de 2008.
Quant à Credit Suisse, le numéro deux a renoué avec les bénéfices au premier trimestre, avec un profit net de 2 milliards contre une perte de 2,1 milliards un an plus tôt.
"En dépit de la réduction des positions à risque et de la taille globale de leur portefeuille de négoce, l'exposition (...) des grandes banques continue d'être importante", explique la banque centrale.
Cette exposition "est non seulement importante en termes absolus, mais aussi par rapport à leur capacité à absorber de futures pertes", selon la BNS.

La récession mondiale risque d'entraîner les banques, non seulement suisses, encore plus dans la tourmente, en raison de la hausse des défauts de paiement de crédits privés et d'entreprises.
Un retour à la normale dépendra des mesures gouvernementales de relance. Dans le cas d'une récession profonde mais brève, les grandes banques suisses devront provisionner environ 15 milliards sur la durée de la crise pour faire face à d'éventuelles pertes, estime la BNS.
Mais dans le cas d'une récession plus profonde, les pertes seraient par contre "considérablement plus élevées" et la stabilité du système financier suisse pourrait se détériorer "encore plus", prévient-elle.
L'agence de notation Moody's s'est jointe à ces prévisions moroses, en annonçant lundi qu'elle pourrait revoir à la baisse de "plus d'un cran" la note de dette à long terme d'UBS, actuellement à "Aa2".
A l'échelle européenne, le nettoyage des bilans "va dominer les résultats des banques" pendant plusieurs années, en dépit d'un bref rétablissement des marchés en début d'année, pronostiquent les analystes de l'agence de notation Standard & Poor's (SP).
Face à la hausse des défauts de paiement, qui risquent d'affecter le secteur bancaire, les 50 premières banques européennes pourraient provisionner au moins 50 milliards d'euros cette année, note SP.
"Nos prévisions sont négatives pour les notations de plus de la moitié des plus grands groupes bancaires en Europe", préviennent encore les analystes de l'agence.
Et les gouvernements ne pourront pas voler indéfiniment au secours des établissements, prévient SP, les ressources étatiques n'étant pas "illimitées".