Moins de deux mois après son arrivée à la tête d'Arcandor, Karl-Gerhard Eick a annoncé lundi une énième restructuration en profondeur du groupe de tourisme et de distribution allemand en déroute.
Le groupe, qui pèse près de 20 milliards d'euros de chiffre d'affaires, va se concentrer sur la vente en ligne et par correspondance, via Primondo et les catalogues Quelle, sur 81 de ses grands magasins Karstadt et 27 de ses magasins de sport, et sur le tourisme avec Thomas Cook.
Il va en revanche placer dans une structure à part 1.500 points de vente de Quelle et 115 centres techniques. Il fera de même avec huit magasins Karstadt et avec ses fleurons, les luxueuses enseignes centenaires que sont le KaDeWe à Berlin, l'Alsterhaus à Hambourg (nord) et Oberpollinger à Munich (sud).
Vente, joint-venture... les options sont "multiples", a précisé M. Eick lors d'une conférence de presse téléphonique. Arcandor va également revoir son approvisionnement et son assortiment. Avec ces mesures, le groupe espère revenir à un flux de trésorerie positif.
Sa situation financière est en effet catastrophique: Arcandor a subi en 2007/08 une perte de 746 millions d'euros, est lourdement endetté, et son avenir est suspendu au renouvellement d'une ligne de crédit de 650 millions qui court jusqu'en juin.
Et pour mettre en place sa restructuration, il aura besoin de 900 millions supplémentaires au cours des cinq prochaines années.
Les conséquences pour les salariés (environ 70.500 postes en tout, dont 23.200 chez Karstadt et 15.600 chez Primondo) restent incertaines. M. Eick n'a pas exclu des suppressions d'emplois chez Quelle et Karstadt mais "le moins possible".
M. Eick, un ancien de Deutsche Telekom, rompt ainsi avec la stratégie de son prédécesseur, Thomas Middelhoff, chassé du groupe à cause de sa gestion catastrophique. Il avait été chargé en 2005 par l'actionnaire principale Madeleine Schickedanz de redresser l'entreprise, qui avait déjà frôlé la faillite. Il avait alors cédé les murs des magasins, la vente par correspondance Neckermann et pris la majorité du voyagiste Thomas Cook.
Mais la situation d'Arcandor ne s'est pas améliorée. Et l'arrivée récente d'un nouvel actionnaire de référence, la banque Sal Oppenheim, n'a pas suffit à assurer son avenir.
Du coup, le groupe va "examiner très attentivement" la possibilité d'une hausse de capital, a indiqué M. Eick lors d'une conférence de presse à Düsseldorf (ouest).
Arcandor pourrait aussi appeler l'Etat à l'aide. Son patron s'est déjà informé des modalités pour profiter du fonds de garanties publiques mis en place par le gouvernement pour aider les entreprises à lutter contre la crise.
Pour Christian Hamann, analyste chez Hamburger Sparkasse, ces mesures vont dans le bon sens. "Sans l'assainissement de ses activités principales, le groupe ne peut pas survivre", a-t-il déclaré à l'AFP.
A la Bourse de Francfort, les investisseurs se montraient toutefois peu convaincus: le titre plongeait de 10,56% à 1,61 euro vers 10H26 GMT sur un indice MDax en baisse de 3,74%.
"La question est de savoir si ce programme est suffisant" et il n'est pas certain qu'Arcandor trouve un acheteur pour ses enseignes de luxe s'il voulait les vendre, explique M. Hamann. Selon le quotidien Bild Zeitung, le français Galeries Lafayette serait intéressé, et le milliardaire égyptien Mohamed Al-Fayed, propriétaire du magasin de luxe Harrods à Londres, serait aussi un repreneur logique.
La premier a dit tout ignorer d'un tel projet, le second n'avait pas commenté en milieu de journée.