Le bonheur des uns fait le malheur des autres. Et les puissantes compagnies pétrolières n'y peuvent rien. La saison des résultats confirme l'évidence : les temps heureux d'un pétrole au-dessus des 100 dollars le baril sont révolus. Dans le sillage de l'effondrement des cours de l'or noir, les bénéfices des majors ont marqué le pas au quatrième trimestre 2008. Après l'américain ConocoPhillips hier, c'est au tour de l'anglo-néerlandais Royal Dutch Shell de présenter au marché un bénéfice trimestriel en repli.
Ajusté des coûts courants d'approvisionnement (sa mesure préférée), le profit de la deuxième compagnie pétrolière du monde par la capitalisation boursière accuse une baisse de 28% à 4,785 milliards de dollars. Sur l'année, soutenu par un prix du brut supérieur à 100 dollars durant trois trimestres, le profit ajusté ressort en hausse de 14% à 31,36 milliards de dollars.
L'angoisse née de la crise ne ronge cependant pas les administrateurs du groupe. Soucieux de flatter ses actionnaires et de réaffirmer sa confiance dans un rebond du pétrole à moyen terme, Shell a relevé de 5% son premier acompte sur dividende sans réduire ses investissements (environ 32 milliards de dollars en 2009).
Le groupe n'oublie pas que l'avenir des majors passe inéluctablement par une production de brut suffisante dans un marché soutenu par une demande contrainte par l'offre. L'an dernier, sa production a d'ailleurs reculé de 2% à 3,248 millions de barils équivalent pétrole par jour. Une raison suffisante pour ne pas serrer les cordons de la Bourse.
A Londres, le marché a accueilli dans une relative indifférence cette publication. Le titre RDS "A" cède 0,06% à 1775 pence tandis que le titre RDS "B" grappille 0,35% à 1712 pence.
(P-J.L)
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LE SECTEUR DE LA VALEUR
Pétrole et parapétrolier
Les compagnies pétrolières sont limitées dans leurs investissements par le regain de nationalisme pétrolier (notamment en Russie, au Venezuela, et en Iran). Après avoir investi 258 milliards de dollars dans des projets pétroliers au cours des trois dernières années, les groupes trouvent aujourd'hui moins de pétrole qu'ils n'en extraient. Depuis deux ans, aucun d'entre eux n'a réussi à renouveler la totalité de ses réserves. Certains groupes envisagent déjà « l'après-pétrole ». Ainsi, Total s'est associé à Suez et Areva pour développer un projet nucléaire à Abu Dhabi.