Eramet progresse de 1,75% à 123,82 euros. L'avertissement sur résultat du groupe minier était prévisible. Depuis le dernier point d'activité d'octobre, la conjoncture mondiale s'est violemment dégradée, provoquant le net fléchissement des cours des matières premières. Après une année 2007 record, le cours du nickel s'est effondré de 65% en 2008. Depuis quelques semaines, les brokers ne cachaient plus leurs inquiétudes, réduisant de façon drastique leurs prévisions sur le secteur. Concernant Eramet, les investisseurs redoutaient manifestement un profit warning d'une plus grande ampleur.
Le début de l'année 2008 avait été exceptionnel pour les actionnaires d'Eramet. Fin mai, le titre a atteint un plus haut historique de 669,98 euros. L'attrait spéculatif du groupe conjugué à la demande vigoureuse justifiaient pleinement cette valorisation. Aujourd'hui, le titre a perdu ces deux catalyseurs de croissance.
La crise économique et financière a plongé les économies occidentales en récession et a ralenti nettement la croissance des pays émergents. Conséquence, Eramet a révisé à la baisse sa prévision de résultat 2008. A périmètre comparable, c'est-à-dire hors contribution positive de Tinfos, le groupe minier table sur un résultat opérationnel courant du même ordre de grandeur, voire légèrement supérieur à celui de l'année 2007. Il visait auparavant une progression "significative" de ce résultat. En 2007, le résultat opérationnel courant avait atteint 1,2 milliard d'euros.
"Dans la conjoncture actuelle, notre situation de trésorerie nette élevée constitue un atout important. Le groupe restera, en adaptant ses productions à l'évolution de la demande, en mesure de pouvoir réagir rapidement à une reprise de ses marchés, tout en conservant ses objectifs à moyen et long terme", a déclaré Patrick Buffet, Président-directeur général d'Eramet.
Le groupe minier a perdu également une grande partie de son attrait spéculatif. Alors que le pacte d'actionnaires liant la famille Duval (37%) et Areva (26%) arrive à échéance fin décembre, la famille Duval a fait part de son intention de renouveler ce pacte sur une période de deux ans, a rapporté "L'Agefi". Les Duval auraient décidé de rester au capital d'Eramet en raison de la chute du cours de Bourse. "Il est évident qu'à 120 euros l'action, la pression pour sortir chez les Duval est moins forte qu'à 600 euros", a commenté une source proche du dossier au quotidien.
Cependant, a ajouté "L'Agefi", Areva ne serait pas désireuse de répondre au souhait de la famille Duval. Le groupe nucléaire, peu satisfait de sa participation, n'aurait pas envie de se lier durablement. Par ailleurs, l'Elysée serait peu favorable à un renforcement d'Areva dans Eramet qui compliquerait une fusion future entre Areva et Alstom. De quoi alimenter encore un peu un brin de spéculation.
Ce matin, Fortis a réitéré sa recommandation Réduire sur Eramet et confirmé son objectif de cours de 140 euros. Le broker a réduit de 10% son estimation de bénéfice par action 2008.
(P-J.L)
EN SAVOIR PLUS
ACTIVITE DE LA SOCIETE
Exploitant des mines de nickel depuis plus d'un siècle en Nouvelle-Calédonie, Eramet est un groupe minier et métallurgique intégré, qui produit des métaux non ferreux et leurs dérivés chimiques, des aciers spéciaux à hautes performances, alliages de nickel et superalliages, et des pièces à hautes caractéristiques pour l'industrie. Ses produits : métaux de haute pureté, ferroalliages, pièces forgées et matricées, billettes et barres, tôles, fils, dérivés chimiques... sont utilisés dans l'industrie aéronautique et spatiale, la sidérurgie, les aciers inoxydables, la production d'énergie, l'outillage, la chimie, les transports, le médical...
FORCES ET FAIBLESSES DE LA VALEUR
Les points forts de la valeur
- Le groupe occupe des positions fortes sur le plan mondial dans ses trois activités : les alliages et aciers spéciaux à hautes performances, le manganèse et le nickel.
- Grâce à la forte hausse du prix des matières premières, Eramet a engrangé d'importantes liquidités.
- Le groupe dispose d'une marge de manoeuvre financière pour procéder à d'éventuelles acquisitions.
Les points faibles de la valeur
- En tant que premier employeur de Nouvelle-Calédonie, Eramet est très impliqué dans le climat social du territoire.
- Les trois activités de groupe sont cycliques, ce qui peut entraîner une certaine volatilité des résultats.
COMMENT SUIVRE LA VALEUR
- A suivre particulièrement l'évolution des cours du nickel, qui entre dans la composition de l'acier inoxydable, et du manganèse.
- On s'intéressera également à la situation politique du Gabon, où Eramet est présent pour le manganèse, et celle de Nouvelle-Calédonie pour le nickel.
- La structure du capital et le pacte d'actionnaires entre la famille Duval (37,2 %) et Areva (26,2 %), encourage les rumeurs spéculatives sur le marché. Areva ne cache pas son intérêt pour le dernier groupe minier français. La famille Duval, quant à elle, veut lui céder sa part pour racheter Aubert & Duval, l'entreprise familiale qu'elle avait apporté à Eramet en 1999.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Produits de base - Métaux
La Chine consomme toujours plus de métaux. Ce pays consomme déjà un tiers de la production mondiale d'aluminium, d'étain, de zinc, de plomb et un quart de la production de cuivre ou de nickel. Selon les analystes, en extrapolant les tendances actuelles (en termes de consommation, et d'équipement), la Chine devrait consommer 60% des métaux dans le monde dans dix ans. C'est pourquoi plusieurs mesures ont été prises pour sécuriser ses approvisionnements. Face à l'envolée des cours des matières premières, la Chine a décidé de constituer des stocks stratégiques de minerais et métaux. Les autorités ont également interdit l'exploitation de certains gisements d'or, de cuivre et de charbon du sous-sol national, et ont fixé des quotas d'exportation de certains minerais rares. Les entreprises nationales sont incitées à investir dans les gisements à l'étranger. Le fonds souverain CIC, doté de 200 milliards de dollars, a été créé pour mener des prises de participation dans des entreprises occidentales.