Trop c'est trop. GDF Suez (-7,24%) ne mérite pas une telle chute : -25% entre lundi et vendredi. Deux brokers se sont jetés au secours du géant de l'électricité déstabilisé par les menaces que fait peser le gouvernement belge sur les prix. Certes, concèdent les analystes, réguler et plafonner les prix de l'électricité du plat pays affectera le chiffre d'affaires de GDF Suez, très présent en Belgique à travers sa filiale Electrabel. Mais cette mesure est loin d'être adoptée. Reste un risque : confrontés à l'échec du libéralisme, les Etats pourraient remettre en cause la loi du marché.
Selon le ministre belge de l'Energie Paul Magnette, la Commission européenne ne serait pas opposée à son projet d'instaurer un tarif régulé de l'électricité à l'échelle européenne. Dans un contexte de baisse du pouvoir d'achat, la flambée des prix de l'énergie est un sujet de préoccupation des citoyens et de leurs dirigeants. Ainsi, soulignait "Les Echos", le régulateur britannique de l'énergie Ofgem s'est ému d'écarts de prix "injustes" d'un fournisseur à l'autre.
En Belgique, le prix de l'électricité s'est apprécié de 21,2%. La hausse du gaz s'approche, quant à elle, des 50%. Ainsi, Paul Magnette souhaite que son projet se retrouve dans un discours du Premier ministre le 14 octobre. Mais rien n'est joué. "Pour replacer ces déclarations dans leur contexte (...). Nous pensons qu'il s'agit du point de vue d'un ministre et pas de celui du gouvernement. Nous estimons qu'il y a très peu de chances que l'on revienne aux prix régulés", a indiqué un trader parisien à l'agence Reuters.
Selon une source de marché, Oddo Securities a d'ailleurs relevé sa recommandation sur GDF Suez d'Accumuler à Achat, tout en réduisant son objectif de cours à 40 euros contre 46 euros auparavant. Le broker a jugé excessive la baisse du titre hier. Il estime également que la volonté du gouvernement belge de réglementer les tarifs de l'électricité ne se traduira pas par des baisses de tarifs significatives.
Credit Suisse a intégré GDF Suez au sein de sa "focus list". Le bureau d'études a donc logiquement confirmé son opinion de Surperformance avec un objectif de cours de 46 euros. Le broker réagit à la chute de 25% du titre lors des quatre dernières séances. Credit Suisse estime que l'évaporation de 14 milliards d'euros de capitalisation n'est pas justifiée par les fondamentaux du groupe. Au prix actuel, GDF Suez est une opportunité d'investissement très attirante, a-t-il souligné.
(P-J.L)
EN SAVOIR PLUS
ACTIVITE DE LA SOCIETE
GDF Suez est issue de la fusion réalisée le 22 juillet 2008, après deux ans et demi de longues fiançailles, entre Gaz de France et Suez. Le groupe présidé par Gérard Mestrallet, secondé par Jean-François Cirelli, constitue le leader européen dans le secteur de l'électricité et du gaz en termes de chiffre d'affaires : 74,3 milliards d'euros en 2007, contre 69 milliards pour E.ON et 60 milliards pour EDF. Le groupe compte 196 500 collaborateurs. Coté à Bruxelles, Luxembourg et Paris, GDF SUEZ est représenté dans les principaux indices internationaux : CAC 40, BEL 20, DJ Stoxx 50, DJ euro Stoxx 50, Euronext 100, FTSE Eurotop 100, msci Europe et ASPI Eurozone.L'Etat français est le premier actionnaire du groupe avec 35,7% du capital devant le Groupe Bruxelles Lambert (5,3% du capital).La capitalisation boursière de GDF Suez au moment de sa première cotation (96 milliards d'euros) lui garantissait la deuxième place du CAC 40 derrière Total mais devant EDF.
FORCES ET FAIBLESSES DE LA VALEUR
Les points forts de la valeur
-GDF Suez bénéficie de perspectives de croissance intéressantes sur un marché porteur et bénéficie d'une structure financière saine.
- Selon les investisseurs, le groupe incarne une stratégie énergétique gagnante bâtie sur la convergence du gaz et de l'électricité.
- La fusion devrait permettre à la société dé dégager à terme 1 milliard d'euros d'économie par an.
-La fusion permet à GDF Suez de prendre du poids dans certains grands indices boursiers, ce qui entraîne l'achat du titre par les fonds dont la gestion réplique la composition de ces indices.
-Un ambitieux programme d'investissement -10 milliards d'euros par an- afin d'atteindre les 100 gigawatts se capacités électriques installées.
Les points faibles de la valeur
-Le positionnement domestique de GDF le rend vulnérable aux tendances de l'activité économique française.
- La tarification de GDF est pour l'instant toujours régulée et dépend des décisions de l'Etat. Or, le groupe achète la vaste majorité du gaz qu'il vend et toute hausse de ses coûts d'approvisionnement non répercutée dans ses prix de vente ampute ses profits. Et, le prix du gaz est indexé sur le prix du pétrole.
COMMENT SUIVRE LA VALEUR
- Pour les analystes, le nouvel ensemble GDF-Suez offre une action intéressante. GDF-Suez combine en effet une croissance à deux chiffres des résultats, des multiples inférieurs à ceux du secteur, un faible taux d'endettement et un Ebitda qui s'appuie à près d'un tiers sur des activités réglementées et donc peu risquées.
- La perspective que les tarifs réglementés du gaz deviennent inférieurs aux prix du marché effraie régulièrement les investisseurs. Les hausses de prix du gaz décidées par l'Etat sont donc à surveiller.
LE SECTEUR DE LA VALEUR
Services aux collectivités
Selon la Commission de régulation de l'énergie (CRE), un an après l'ouverture du marché de l'énergie, seulement 300000 particuliers et petits professionnels ont changé d'opérateur. Ce chiffre est très faible comparé aux 29,5 millions de consommateurs d'énergie. Le maintien des tarifs réglementés et la possibilité de revenir à ces tarifs pour les Français qui ont testé d'autres opérateurs, permettent à EDF de limiter la concurrence. Gaz de France doit, en revanche, affronter des nouveaux entrants, fournisseurs alternatifs dans le gaz. L'entreprise a mené une politique commerciale dynamique visant à fidéliser ses 11 millions de clients. Il s'agit de leur garantir un service de qualité et une offre duale électricité-gaz qui soit intéressante. Cette politique lui a permis de gagner 290000 clients dans l'électricité selon ses dirigeants. Néanmoins la nouvelle entité, GDF-Suez, dispose encore de capacités de production limitées dans l'électricité. Détenir ses propres capacités de production dans l'électricité de pointe (avec les centrales à gaz ou hydrauliques par exemple) est pourtant un atout non négligeable pour pouvoir procéder à des échanges contre de l'électricité de base (nucléaire). Les nouveaux entrants, comme l'opérateur Poweo, qui a conforté sa place de troisième opérateur français à fin juillet, mènent déjà cette politique.