La banque britannique Barclays a conclu mercredi un accord avec Lehman Brothers qualifié d'opportunité unique par son président, qui va lui permettre de devenir pour presque une bouchée de pain le numéro trois de la banque d'investissement aux Etats-Unis.
Barclays, après avoir renoncé ce week-end à racheter l'ensemble des activités viables de Lehman Brothers, va pouvoir en effet adjoindre à sa filiale d'investissement Barclays Capital (BarCap) un joyau, les activités américaines de Lehman, qui s'était placée lundi sous la protection de la loi sur les faillites aux Etats-Unis, et racheter son siège new-yorkais.
La troisième banque britannique par la capitalisation va ainsi payer 250 millions de dollars seulement pour récupérer des actifs commerciaux de Lehman Brothers de 72 milliards de dollars, assortis de passifs commerciaux de 68 milliards de dollars. Elle va aussi racheter le siège de la 7ème avenue et deux centres de traitement de données dans le New Jersey pour 1,5 milliard de dollars, une somme "proche de leur valeur de marché", selon elle.
Elle récupère aussi dans la transaction la moitié des 20.000 employés de Lehman Brothers dans le monde, des équipes à la qualité très réputée sur les marchés.
Robert (Bob) Diamond, le président de Barclays, et qui dirige BarCap, a qualifié immédiatement ce rachat "d'opportunité qu'on ne rencontre qu'une fois dans sa vie" pour Barclays.
Le directeur général de Barclays John Varley a estimé pour sa part que l'acquisition proposée "accélère l'exécution de la stratégie de diversification (de Barclays, ndlr) par zones géographiques et par activités, en augmentant en particulier le pourcentage des revenus de Barclays en Amérique du nord".
Le britannique, qui manquait jusqu'à présent un peu d'épaisseur aux Etats-Unis, le plus grand marché mondial de la banque d'investissement, se retrouve propulsé à la troisième place avec ce rachat.
M. Varley a observé que le rachat "respectait les stricts critères financiers de Barclays".
Pour sa part, le directeur d'exploitation de Lehman Brothers, Herbert McDade, s'est félicité que Lehman puisse ainsi poursuivre ses activités aux Etats-Unis.
Le geste de Barclays, seule banque européenne pour l'instant à s'être mêlée à la tourmente financière américaine, peut paraître osé alors qu'elle-même a dû avoir recours en juin à une augmentation de capital de 4,5 milliards de livres (5,6 milliards d'euros) et que de toutes parts, on lit que le Royaume-Uni est déjà entré en récession.
WestLB a indiqué que ce rachat était positif pour Barclays, "surtout vu à long terme". JPMorgan Cazenove a estimé que le rachat pourrait être de nature à "transformer" Barclays.
Si l'intégration se passe bien, Barclays aura de l'avis général réussi un coup de maître qui fera en partie oublier son échec, l'an dernier, dans le rachat de la néerlandaise ABN Amro. Les deux banques s'étaient mises d'accord sur un rachat à 67 milliards d'euros, mais l'offre de Barclays a été dépassée par celle d'un consortium composé de la britannique Royal Bank of Scotland, de l'espagnole Santander et de la belge Fortis.
De surcroît, Barclays pourrait, selon une source proche de la banque, engager d'autres employés de Lehman Brothers en Europe ou en Asie. Le cabinet PriceWaterhouseCoopers (PWC), chargé du redressement des activités de Lehman Brothers en Europe, a d'ailleurs annoncé mercredi avoir reçu des "expressions d'intérêt" pour certaines d'entre elles. Le cabinet s'est dit par ailleurs en mesure de payer les salaires de septembre aux 4.500 employés de la filiale.
Pour parachever ces bonnes nouvelles la concernant, Barclays a en outre déclaré mercredi avoir reçu le soutien de "certains de ses actionnaires" pour le rachat de Lehman Brothers. Ceux-ci ont déclaré être prêts à participer à une augmentation de capital "d'au moins" 600 millions de livres, soit un milliard de dollars.
Le titre Barclays a été en hausse mercredi à la Bourse de Londres, gagnant 3,17% à 317,75 pence.