La Banque centrale européenne (BCE), qui a relevé son taux directeur jeudi, s'est montrée inflexible sur la Grèce, refusant de donner son aval à toute solution pouvant s'apparenter à un défaut de paiement de ce pays.
"Notre position n'a pas changé. Pas d'événement de crédit, de défaut ou de défaut partiel. Point", a déclaré son président Jean-Claude Trichet, lors d'une conférence de presse à Francfort (ouest), alors que marchés et économistes jugent une restructuration de la dette abyssale de la Grèce inéluctable.
Les agences de notation risquent de cataloguer comme "défaut" tout plan d'aide à Athènes impliquant les créanciers privés, soit les banques, les assurances et fonds d'investissement.
Or sous la pression de Berlin, qui en a fait une condition sine qua non, les créanciers privés sont appelés à contribuer à l'effort général, mais sous une forme que les responsables européens peinent à définir depuis des semaines.
Face à cet "imbroglio", il serait bon de trouver "un compromis" qui permettrait à chacun de sauver la face et jugulerait la contagion aux autres pays en difficulté de la zone euro, note Marie Diron, du cabinet Ernst and Young.
Or de ce point de vue les propos de M. Trichet, bien que sévères, laissent "une porte de sortie", constate Holger Schmieding de Berenberg Bank.
M. Trichet a souligné qu'il était de la "responsabilité des gouvernements de discuter avec les investisseurs privés" de leur participation au sauvetage d'Athènes, et non de celle de la BCE qui a un simple rôle de conseil.
Surtout, il a évacué les questions sur la menace brandie à plusieurs reprises par la BCE de refuser les obligations grecques si elles étaient dégradées en contrepartie des prêts qu'elle accorde aux banques, ce qui laisserait nombre d'établissements grecs sur le carreau.
"Il semble que même si Standard and Poor's dégradait la note de la Grèce mais pas les autres agences de notation, les obligations grecques continueraient à être acceptées comme collatéraux", estime Maire Diron.
"Trouver une solution est dans l'intérêt de tous", ajoute-t-elle, soulignant que les taux obligataires du Portugal et de l'Irlande, les deux autres pays de la zone euro à bénéficier d'un plan d'aide UE/FMI, avaient bondi.
Autre signe que la BCE pourrait se laisser infléchir, comme veulent le croire les économistes, elle a décidé jeudi d'accepter des titres de dette portugaise comme garanties alors même que l'agence Moody's vient de dégrader la note à long terme de la dette de Lisbonne dans la catégorie spéculative.
Le dilemme grec a relégué la hausse du taux directeur de la BCE au second plan, ce qu'a ouvertement regretté M. Trichet.
La BCE l'a relevé à 1,50%, contre 1,25% précédemment.
Jugeant la reprise économique en zone euro sur les rails et l'inflation préoccupante quant à elle, la BCE avait opéré sa première hausse depuis près de trois ans en avril, portant son taux de 1% à 1,25%.
L'inflation en zone euro a atteint 2,7% en juin, comme en mai, après 2,8% en avril. Soit bien au-delà de l'objectif de la BCE de la maintenir sous les 2% à moyen terme.
M. Trichet a toutefois signalé qu'une pause allait être observée, poussé à la prudence par le ralentissement de plusieurs indicateurs, dont celui de l'activité manufacturière.
Il a en effet déclaré que la BCE allait "continuer d'observer très étroitement" les développements de l'inflation, un langage synonyme pour les économistes qu'il n'y aura pas de nouvelle hausse avant l'automne.
"C'est la même formulation utilisée après la hausse d'avril, ce qui signifie que la BCE semble viser une nouvelle hausse des taux en octobre", décrypte Marco Valli, chef économiste pour la zone euro chez UniCredit.