Les entreprises du secteur marchand en France ont créé au premier trimestre 2011 un volume d'emplois record depuis 2007, près de 60.000 selon l'Insee, sans toutefois effacer les stigmates de la crise, ni garantir une baisse significative du chômage dans l'année, soulignent les économistes.
58.200 nouveaux emplois dans le secteur marchand, cela n'avait plus été vu depuis les 64.000 du troisième trimestre 2007 recensés par l'Insee, juste avant la plongée en 2008 dans le marasme économique et ses destructions massives d'emploi - jusqu'à la timide reprise de fin 2009.
Qui plus est, la hausse de 0,4% de l'emploi a été portée par l'emploi hors intérim, où les créations ont été "deux fois plus fortes que le trimestre précédent" (52.300 nouveaux postes contre 25.700 au quatrième trimestre 2010), souligne l'Insee.
Et pour la première fois en dix ans, l'industrie n'a pas perdu d'emplois sur le trimestre.
Sur un an, l'emploi salarié dans les secteurs principalement marchands a progressé de 1,1% (+181.700 emplois), selon la même source.
Egalement publiées jeudi, des données de Pôle emploi confirment une hausse de 0,4% de l'emploi salarié au premier trimestre contre des évolutions de l'ordre de 0,1% ou 0,2% en 2010.
Selon ces statistiques, établies à partir des données des seules entreprises affiliées à l'assurance chômage, cela représente 64.000 créations nettes d'emploi, là encore essentiellement hors interim, l'autre "bonne nouvelle" saluée par le directeur des études de Pôle emploi, Bernard Ernst.
"Le ralentissement de l'emploi intérimaire peut être le signe que l'emploi devient plus stable", a estimé le directeur général de Pôle emploi Christian Charpy, lors d'une conférence de presse.
"Ce sont de bons chiffres par rapport à l'année dernière, cohérents avec ceux de la croissance économique et les différentes prévisions", a commenté pour l'AFP Marie-Claire Carrère-Gée, la présidente du Conseil d'orientation pour l'emploi, organisme placé auprès du Premier ministre.
Mais si les signes des dernières semaines semblent tous encourageants, les effets de la crise ne sont pas encore estompés: il y avait toujours au premier trimestre 227.000 salariés de moins que début 2008, selon Pôle emploi, "et quelque 700.000 chômeurs de plus qu'avant la crise", souligne Mme Carrère-Gée.
"L'enjeu c'est de confirmer et d'amplifier le rythme de décélération des chômeurs", affirme-t-elle.
Or, selon Mathieu Plane, économiste à l'OFCE, du fait de la démographie française et des premiers effets de la réforme des retraites dès le second semestre, il y aura, en 2011, 150.000 actifs de plus sur le marché du travail -- autant d'emplois supplémentaires à créer.
"Pour cela, il faut une croissance économique soutenue, alors que l'on n'attend pas une croissance aussi forte" après un premier trimestre à +1%, note-t-il.
Jeudi, la Banque de France a estimé que la croissance devrait ralentir à 0,4% au deuxième trimestre.
"On peut se réjouir (des dernières statistiques) mais il faut rester prudent" d'autant qu'"avec une croissance de 1%, à d'autres moments, on créait 100.000 emplois", résume M. Plane.
"Le taux de croissance de 0,4% est également faible, alors que le taux de croissance trimestrielle de la valeur ajoutée du secteur marchand a atteint 1,3%", note-t-il aussi en estimant que la différence tient au fait que les entreprises se sont mises à rattraper les gains de productivité perdus pendant la crise.
"Cette croissance n'est pas directement transmise aux ménages mais passe par des gains de productivité (...) On est dans une phase de croissance faiblement riche en emplois", conclut-il.