Le roi des Belges Albert II a demandé lundi au gouvernement sortant chargé de gérer les affaires courantes de prévoir davantage d'efforts budgétaires pour cette année, sur fond d'inquiétude croissante des marchés financiers concernant la situation politique du pays.
Albert II "a demandé au Premier ministre (Yves Leterme) que le gouvernement en affaires courantes prépare le budget 2011 avec comme objectif que le solde de ce budget soit meilleur que celui convenu avec les autorités européennes", a souligné le Palais royal dans un communiqué, sans donner d'indication chiffrée sur l'effort à accomplir.
Près de sept mois après les élections législatives du 13 juin, les divergences entre flamands et francophones sur l'avenir du pays bloquent toujours la formation d'un nouveau gouvernement.
Afin de rassurer les marchés, le ministre des Finances sortant, Didier Reynders, avait suggéré dès la mi-décembre que la Belgique réduise son déficit public plus que prévu.
"Dès le début de 2011, il faudra prendre des mesures pour répondre" au programme de stabilité de la Belgique, qui prévoit de ramener le déficit public à 4,1% du PIB contre 6% en 2010, avait indiqué M. Reynders.
"Ce que je propose, c'est qu'on aille plus loin et qu'on descende à 3,7%", avait-il ajouté.
M. Leterme plaide lui aussi pour une réduction du même ordre des déficits.
Mais les deux hommes divergent sur la capacité du gouvernement sortant, qui dispose de pouvoirs limités, à mettre ce programme en oeuvre.
M. Reynders souhaite la constitution d'un "gouvernement provisoire" jusqu'à l'été, le temps de prendre les mesures budgétaires à même de rassurer les marchés et d'éviter qu'ils ne fassent trop grimper les taux d'intérêt de la dette publique belge.
Le roi --dont les déclarations nécessitent l'aval du Premier ministre-- a confié clairement dans son communiqué la tâche à l'équipe en place d'Yves Leterme.
L'annonce d'une réduction plus rapide du déficit "pourrait apaiser les marchés financiers à court terme", a réagi un économiste de la banque ING, Philippe Ledent.
"Il sera toutefois difficile pour le gouvernement en affaires courantes de prendre les mesures structurelles réclamées par les marchés pour assurer une trajectoire stabilisée de la dette à moyen terme", a-t-il ajouté.
Les taux d'emprunt obligataire belges à 10 ans continuaient à se tendre lundi, montant à 4,247% vers 14H25 (13h25 GMT) contre 4,128% vendredi à la clôture.
Par rapport à d'autres pays de la zone euro, les fondamentaux de l'économie belge restent pourtant relativement bons.
La situation politique, en revanche, inquiète de plus en plus.
Le FMI a conseillé au pays d'assainir "sans délai" sa situation budgétaire et l'agence de notation Standard and Poor's a annoncé qu'elle pourrait baisser la note de la Belgique d'ici six mois si elle n'avait pas "bientôt" un gouvernement.
Le milliardaire Albert Frère (Total, GDF Suez) a prévenu samedi: "Les marchés seront impitoyables si le pays ne sort pas dans les meilleurs délais de cet enfer sans précédent".
Malgré ces pressions, la situation politique reste "complètement bloquée", selon l'entourage du sénateur Johan Vande Lanotte, chargé en octobre par Albert II d'une mission de conciliation entre néerlandophones et francophones et qui a demandé le 6 janvier à en être déchargé.
M. Vande Lanotte poursuivait néanmoins ses contacts lundi, le roi n'ayant jusqu'ici pas accepté sa démission. Les deux hommes se reverront mardi à 17H00 (16H00 GMT).
Personne ne sait s'il poursuivra au-delà sa mission, si un autre médiateur sera nommé ou si de nouvelles élections seront organisées.
"Aujourd'hui, la Belgique court comme une poule sans tête", estimait lundi le quotidien La Libre Belgique.