Si les nouvelles technologies offrent un potentiel important de réduction des émissions de gaz à effet de serre, la multiplication des équipements et des usages liés aux TIC engendre de lourds impacts sur l'environnement. Le secteur vient de s'engager avec le ministère de l'écologie dans la maîtrise des consommations d'énergie et le recyclage des déchets électroniques.
Le secteur des Telecom est le 26ème secteur économique à signer avec le ministère de l’écologie une charte d’engagement pour le développement durable, dans le cadre du Grenelle de l’environnement. Les 3 opérateurs – Bouygues, Orange et SFR- s’engagent sur plusieurs enjeux clés de leur activité : maîtrise des consommations d’énergie malgré la croissance des usages, affichage environnemental de leurs produits, recyclage des mobiles et appui à plusieurs secteurs économiques – bâtiment, transport, travaux publics et énergie- pour réduire leur émissions de GES. De fait, les TIC offrent de formidables opportunités de réduction de certains impacts environnementaux, en proposant des solutions alternatives à certaines activités énergivores (visio conférence, télétravail, pilotage d’appareils consommateurs d’énergie dans le bâtiment, smart grid/ distribution intelligente d’énergie, etc.). Mais ces gains permis la dématérialisation sont néanmoins contrebalancés par la multiplication des équipements (ordinateurs, TV, mobiles, Wi-fi…) et des usages. Chez les particuliers, le développement des TIC est plutôt source d’augmentation des émissions de CO2 que de diminution aujourd’hui.
Les derniers chiffres disponibles, publiés en 2009*, estiment à 7,3% la consommation d’électricité du secteur sur l’ensemble de la consommation française. Cette consommation est passée de 4,6 TWh en 2005 à 6,7 TWh en 2008, l’essentiel de cette croissance étant liée au développement du haut débit. Les signataires de la charte continuent néanmoins de défendre les « avantages écologiques » offerts par leur secteur, et affirment que les solutions apportées par les TIC pourraient réduire les émissions de GES du pays à hauteur de 7% en 2020.
Allonger la durée de vie des équipements et modifier les comportements
S’agissant des téléphones portables, la France compte 50 millions de clients, et 20 millions de nouveaux mobiles chaque année… Aujourd'hui, les utilisateurs ont accumulé en moyenne 5 appareils. Or, très peu sont recyclés : seulement 485 000 en 2009, dont 57 000 pour Bouygues Telecom, et 116 270 chez SFR (voir article lié). Un phénomène mondial, car selon une étude diffusée en juillet 2008 et diligentée par Nokia, il apparaît que très peu d'utilisateurs (3%) recyclent leur mobile inutilisé. La plupart (44%) conservent leur téléphone en fin de vie, voire le donnent à un proche (25%) ou le revendent (16%). Seuls 4% le jettent à la décharge. Si les trois milliards de propriétaires de mobiles au monde retournaient ne serait-ce qu'un appareil, 240 000 tonnes de matières premières pourraient être économisées !
La charte prévoit d’améliorer cette contre-performance par l’information des consommateurs et des incitations financières. Mais, au-delà des questions environnementales et d’éthique, un nouvel élément pourrait bientôt les inciter fortement à améliorer ces chiffres. Les terres rares, minerais qui entrent dans la composition des portables, sont menacés, pour certains, de pénurie. D’ores et déjà, ces précieux métaux font l’objet d’une guerre stratégique : la Chine produit en effet 97% de ces terres rares et vient d’annoncer, en toute discrétion, qu’elle refuserait désormais de les exporter pour se concentrer sur son marché intérieur… (voir article lié). Chaque téléphone portable contient par ailleurs entre 500 et 1000 composants électroniques qui réclament l'extraction de l'or, du cuivre, de l'argent, et d'autres minéraux, dont certains toxiques, comme le coltan.
Affichage environnemental
Autre impact de la filière, l’énergie grise de chacun des appareils –celle qui est nécessaire à leur fabrication- est considérable. Pour un ordinateur, elle est même souvent supérieure à l’énergie consommée pour son usage. Or, ceux-ci ne sont pas conçus, aujourd’hui, pour durer... Idem pour les téléphones portables (remplacés en moyenne tous les 18 mois) et autres appareils électroniques. Leur durée de vie et leur réduction en nombre est donc là aussi un enjeu central, sur lequel les opérateurs se sont engagés en n’incitant plus leurs clients à changer de téléphone fréquemment et en proposant des forfaits sans mobiles. Par ailleurs, ils s’engagent à développer l’affichage environnemental de leurs produits, incluant l’ensemble de leur cycle de vie. Pionnier, Orange s’est lancé depuis 2 ans avec le WWF dans cet affichage, qui comprend 5 indicateurs - bilan CO2, performance énergétique, substances dangereuses, réduction des déchets et préservation des ressources-.
Enfin, bien que certains professionnels du secteur tentent de minimiser le problème, l’impact des data centers constitue un enjeu environnemental considérable. Un rapport publié par Greenpeace International estime que leur consommation d’électricité pourrait dépasser un milliard de kilowattheures par an. L’ONG alerte sur le recours massif au cloud computing, procédé grâce auquel les données sont diffusées directement vers les ordinateurs depuis un serveur plutôt que d’être stockées sur le disque dur des internautes. Le cloud computing concerne en effet toutes les données envoyées en temps réel : vidéos, photos et autres, accessibles de manière quasi instantanée, stockées dans les data centers. Une étude publiée par le GeSI (Climate Group and the global e-sustainability initiative)** estime également que les émissions de CO2 des datas centers devraient doubler entre 2007 et 2020. Greenpeace incite donc les entreprises telles que Google, Apple, Facebook et Yahoo, à implanter leurs data centers dans des zones de production d’électricité renouvelable. L’ONG souligne que Apple a lancé la construction d’un centre de données d’un milliard de dollars en Caroline du Nord, où 60% de la production d’électricité est issue du charbon… Idem pour Facebook dans l’Oregon. Seul Google a opté pour un autre modèle, en créant sa propre filiale « Google energy », lui permettant de choisir l’origine de son électricité, ajoute Greenpeace
* Impact environnemental de la filière TIC en France, IDATE Consulting & Recherche (janvier 2010)
**« Smart 2020 : Enabling the low carbon economy in the information age » (Rendre possible une économie à faible émission de CO2 à l’ère de l’information)