Ouganda, Tanzanie, Mozambique, Madagascar... L'Afrique de l'Est est devenue un terrain d'exploration nouveau et prometteur des chercheurs d'hydrocarbures sur le continent, provoquant des grandes manoeuvres entre les compagnies multinationales du secteur.
"Il y a encore des zones extrêmement peu exploitées, il faut faire des efforts majeurs en Afrique de l'Est", a relevé mardi Tiziana Luzzi-Arbouille, spécialiste de l'Afrique subsaharienne auprès du cabinet IHS, lors de la conférence CeraWeek consacrée à l'énergie, à Houston (sud des Etats-Unis).
Alors que la côte Atlantique, notamment au large du Nigeria ou de l'Angola, est déjà largement exploitée par les groupes pétroliers occidentaux, il a fallu attendre des décennies pour que l'industrie s'intéresse de plus près à la partie orientale du continent.
En 2006, de premières découvertes ont lieu en Ouganda, dans le bassin du Lac Albert. Depuis, une quinzaine de découvertes ont été confirmées, rapporte Mme Luzzi-Arbouille, qui estime les réserves pétrolières du pays à 700 millions de barils.
"Ce qui est arrivé en Ouganda a rendu l'accès aux financements plus facile pour les petites sociétés", raconte Tewodoros Ashenafi, PDG de la compagnie éthiopienne Southwest Energy, qui explore dans le bassin de l'Ogaden, dans l'est de son pays.
"De nombreuses personnes disaient qu'il n'y avait rien en Ouganda. De nombreuses personnes disent qu'il n'y a rien en Ethiopie. Je suis impatient de pouvoir proclamer, dans environ un an et demi: je vous l'avais dit!", poursuit-il.
Outre le pétrole en Ouganda, d'importantes découvertes de gaz naturel ont été faites au large de la Tanzanie et du Mozambique. L'Ethiopie et la Somalie font l'objet d'intenses recherches. Madagascar dispose "d'énormes réserves", selon Tiziana Luzzi-Arbouille. "La question, c'est ce qu'on va en retirer" vu la difficulté d'accéder aux ressources, nuance-t-elle. "10%, ce serait déjà bien".
Les grandes compagnies pétrolières se sont lancées dans la course. Le groupe français Maurel & Prom fore au large de la Tanzanie, l'américain Anadarko et le norvégien Statoil au large du Mozambique, dans le bassin de Rovuma.
"Au départ, de petites compagnies ont pris des risques. Tout d'un coup, on voit les gros poissons arriver", observe Mme Luzzi-Arbouille.
Le groupe britannique Tullow s'est livré à une véritable bataille contre l'italien Eni pour le contrôle des gisements ougandais du lac Albert, qu'il n'a remporté que début février. Tullow était associé jusque-là au canadien Heritage Oil, qui lui a cédé ses 50% dans deux blocs pétroliers.
Avec les actifs d'Heritage, Tullow s'assure le contrôle total de la partie ougandaise du lac, que se partagent l'Ouganda et la République démocratique du Congo.
L'arrivée des grands acteurs du secteur est aussi une nécessité, vu les investissements colossaux qu'exige l'exploitation de ces champs pétroliers, en matière de forage mais aussi d'infrastructures pour transporter les hydrocarbures.
Total est ainsi "en négociations avancées" avec Tullow pour s'assurer une place sur le lac Albert. Le chinois CNOOC pourrait s'associer à eux.
La région est particulièrement intéressante pour les Chinois, déjà très actifs sur le continent africain. Ouverte sur l'océan Indien, elle offre des ressources bien plus facilement transportables vers l'Asie que l'Afrique de l'Ouest.