
Le numéro un européen de la distribution, le français Carrefour, a annoncé mardi au moins 1.672 licenciements en Belgique et un gel des rémunérations du reste de ses salariés dans ce pays où il joue sa survie face à des concurrents aux politiques de prix agressives.
Les emplois supprimés, représentant 11% de ses effectifs en Belgique, sont ceux de 14 hypermarchés et de 7 supermarchés "structurellement en perte": Carrefour compte les fermer d'ici fin juin et procéder à des licenciements collectifs.
Les salariés de plusieurs hypermarchés devant fermer se sont mis en grève mardi après-midi, et les syndicats menacent d'étendre le mouvement à tout le pays.
Le patron de Carrefour Belgique, Gérard Lavinay, a en outre prévenu que "près de 3.000 emplois" supplémentaires voire "le maintien de l'activité en Belgique" dépendaient d'une série d'autres mesures à négocier avec les salariés.
Les coûts généraux doivent notamment baisser de 25 millions d'euros d'ici 2012, les salaires seront bloqués le temps d'être "ramenés au niveau de NOS concurrents", a-t-il expliqué.
Carrefour compte environ 15.000 salariés en Belgique, et environ 630 magasins sous les enseignes Carrefour, Carrefour Express (magasins de proximité) et GB.
Parmi eux, au total 27 hypermarchés et 25 supermarchés, employant 4.664 emplois, sont "structurellement déficitaires" depuis 2005.
Outre les 21 fermetures, Carrefour envisage de franchiser 7 magasins, et d'en transférer 20 autres au groupe concurrent Mestdagh, faute de quoi ils rejoindraient la liste des franchisés ou des fermetures.
Eric Mestdagh, administrateur délégué de ce groupe familial qui gère 69 magasins sous l'enseigne Champion en Belgique, a confirmé à l'AFP qu'il était "intéressé pour reprendre des magasins à Carrefour".
Mais "à ce jour il n'y a absolument rien de fait" et "il faut examiner les dossiers", a-t-il prévenu.
Le patron de Carrefour Belgique a fait valoir que son plan "extrêmement drastique" était rendu nécessaire par une situation "critique": son groupe accuse une perte d'exploitation cumulée de 40 millions d'euros sur les neuf dernières années et a "une structure de coûts anormale, qui ne nous permet pas de nous battre dans les mêmes conditions que nos concurrents".
Carrefour s'était implanté en Belgique en 2000 en rachetant le leader du marché GB, une des deux grandes chaînes historiques belges avec Delhaize.
Mais il a été détrôné en 2008 par le concurrent Colruyt, qui a bâti sa réputation en proposant des produits de grande marque à prix serrés, en économisant sur la décoration des magasins et la présentation des produits.
Pour y faire face, Carrefour lui-même propose depuis quelques mois dans ses magasins belges des produits moins chers sous la marque "Carrefour Discount".
Le numéro 3 belge Delhaize s'est lui aussi lancé dans une politique de prix bas pour reconquérir des parts de marché.
La concurrence des supermarchés à bas prix avait déjà poussé en 2007 Carrefour Belgique à supprimer 900 emplois et à franchiser 16 magasins GB. Mestdagh avait déjà tenté d'en reprendre une partie, sans succès.
Mais cela n'a pas enrayé l'érosion de la rentabilité et des parts de marché, qui alimentent des rumeurs récurrentes d'un départ de Carrefour du marché belge.
Le groupe lui-même a évoqué cette menace mardi: la restructuration "est la condition sine qua non pour que Carrefour continue de faire son métier en Belgique et préserve un maximum d'emplois", a indiqué M. Lavinay. Il espère "dès 2012" atteindre "le seuil de rentabilité nécessaire".