La Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) a tenu vendredi et samedi son assemblée générale annuelle à Londres, dans un contexte de crise qui a renforcé son rôle, mais posé la question de sa mission et de son financement à plus long terme.
Alors que certains pays donateurs étaient prêts récemment à quitter la BERD, estimant terminée sa mission de base - le passage de l'ex bloc-soviétique à l'économie de marché - cette question n'est plus à l'ordre du jour.
D'autant que le calendrier de la "graduation", la date à laquelle les pays de la zone pourraient se passer des investissements de la BERD, a été gelé pour la durée de la crise, seule la République tchèque ayant réussi jusqu'à présent.
L'Australie, en particulier, a accepté ce week-end de demeurer actionnaire, dans le cadre de l'engagement du G20 à voir les grandes institutions financières internationales jouer un rôle accru pour régler la crise actuelle.
"La mémoire collective retiendra qu'il vaut mieux ne pas abandonner trop tôt un instrument comme la BERD, parce que des temps plus difficiles peuvent survenir, durant lesquels on est content de la trouver", a remarqué Thomas Mirow, dont c'est la première année de présidence de la banque, lors de la conférence de presse finale.
M. Mirow a noté qu'au vu de la qualité des mesures prises par les 30 pays pays de la zone d'activité pour lutter contre la crise, il est clair "qu'on n'assistera pas à un retour aux anciens modèles de sociétés ou d'économies".
Mais, selon lui, la BERD a encore du travail "pour aider à rendre la future croissance "viable et durable". Il a donc assuré qu'elle restait "un partenaire fiable et déterminé", et qu'elle "le resterait sur le long terme".
"La BERD a maintenant un rôle à jouer en veillant à ce que (ses) succès chèrement acquis ne soient pas mis en péril par la crise actuelle", a pour sa part estimé Brian Lenihan, ministre irlandais des Finances et président cette année du conseil des gouverneurs.
La BERD anticipe pour 2009 une chute de 5,2% du produit intérieur brut (PIB) de sa zone d'activité, avant une maigre croissance de 1,4% en 2010.
Elle-même a connu en 2008 une perte de 602 millions d'euros, la première depuis dix ans.
M. Lenihan a considéré cette perte comme compatible avec "la prise de risques équilibrés et appropriés" attendue par les actionnaires.
"Bien que les résultats financiers aient leur importance, la valeur fondamentale de la Banque réside dans ce qu'elle peut faire pour améliorer la qualité de vie des habitants de la région", a-t-il souligné.
La nouvelle question est désormais celle d'un éventuel renforcement du capital de la BERD, dotée initialement de 20 milliards d'euros.
Le président Mirow a estimé qu'un investissement annuel de 7 à 8 milliards d'euros, un record, cette année et la suivante, constituait "un plafond" par rapport au capital.
Or les flux d'investissements privés, positifs à hauteur de 300 milliards de dollars en 2007, devrait être négatifs à hauteur de 129 milliards cette année, et certains actionnaires suggèrent que la BERD investisse 10 à 15 milliards d'euros par an sur les prochaines années.
Les 63 actionnaires (61 pays donateurs ou receveurs, la Commission européenne et la Banque européenne d'investissement) ne sont pas unanimes pour l'instant sur le principe d'une hausse du capital. D'autant, a souligné M. Lenihan, que certains font valoir qu'il n'y aura pas forcément une forte demande d'investissement dans la zone, une fois la crise passée.
Ce débat aussi bien politique que technique devrait trouver une réponse lors de la prochaine assemblée annuelle, en mai prochain à Zagreb en Croatie.