La Cour de justice européenne a rejeté jeudi un recours de la France contre l'interdiction de la pêche à la "thonaille", un filet controversé utilisé pour la capture de thons en Méditerranée, infligeant un revers au gouvernement et aux professionnels concernés.
L'Union européenne a banni cette pêche en 2002, considérée comme potentiellement dangereuse pour les cétacés, ce que les pêcheurs contestent. La France n'a pas respecté cette interdiction et demandait sa levée, ce qui a poussé la Commission européenne à saisir la justice européenne en 2007.
Jeudi, la Cour de Luxembourg a jugé que le recours de l'exécutif européen contre la France était "fondé".
"En s'abstenant de contrôler, d'inspecter et de surveiller de façon satisfaisante l'exercice de la pêche au regard de l'interdiction des filets maillants dérivants pour la capture de certaines espèces, et en ne veillant pas à ce que soient prises des mesures appropriées contre les responsables d'infractions à la réglementation communautaire (...), la République française a manqué aux obligations qui lui incombent", soulignent les magistrats dans leur jugement.
Ils condamnent en conséquence la France aux dépens et lui demandent de se mettre en conformité avec la réglementation européenne.
La Cour estime que les filets dénommés "thonailles" doivent être considérés comme des filets maillant dérivants et être en conséquence interdits car potentiellement dangereux.
La France avait tenté d'argumenter que les filets maillant dérivants, utilisés dans le Pacifique et qui avaient suscité l'indignation à la fin des années 1990, puis une interdiction, n'avaient aucun rapport avec la "thonaille", car ils se déroulaient sur des centaines de kilomètres contre environ 10 km maximum pour la "thonaille".
Mais sur ce point, la justice européenne a rejeté un recours de Paris sur la définition des filets dérivants.
Elle a rejeté en particulier les "arguments invoqués par la France selon lesquels la pêche à la thonaille serait une activité traditionnelle et artisanale qui ne présenterait pas de risque d'expansion incontrôlée de la pêche".
Les juges estiment que les filets maillants dérivants sont "insuffisamment sélectifs" et doivent donc être interdits.
"Dans la mesure où la thonaille est utilisée pour la capture du thon rouge, l'interdiction de son utilisation participe à l'objectif d'assurer la conservation et l'exploitation rationnelle des ressources halieutiques ainsi que la limitation de l'effort de pêche", soulignent-ils.
La pêche à la thonaille fait vivre encore un nombre estimé à 300 familles en France.
Plus largement, les contrôles sur la pêche au thon rouge, une espèce particulièrement prisée, ont été nettement renforcés depuis plusieurs années en Méditerranée. Les quotas baissent et les pratiques de pêches illégales sont durement sanctionnées.
Certaines organisations écologistes comme Greenpeace jugent l'espèce tellement menacée qu'elles demandent un moratoire sur la pêche au thon rouge en Méditerranée.