
L'annonce lundi d'une récession en zone euro en 2008 et d'une forte hausse du chômage d'ici 2010 a renforcé la prudence des marchés financiers, attentistes avant l'élection présidentielle américaine de mardi.
La zone euro devrait connaître une récession en 2008, avec un recul du produit intérieur brut (PIB) sur les trois derniers trimestres, puis une croissance au point mort en 2009, selon les prévisions d'automne publiées à Bruxelles par la Commission européenne.
Le taux de chômage devrait en conséquence grimper de plus d'un point d'ici deux ans (de 7,6% en 2008 à 8,7% en 2010), selon la Commission.
La crise financière "n'est pas terminée" malgré un début d'accalmie constaté sur les marchés, a mis en garde le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires Joaquin Almunia, pour qui la situation sur les marchés boursiers et financiers reste "précaire".
"Nous allons avoir une année très problématique", a reconnu le ministre allemand des Finances Peer Steinbrück en arrivant en fin d'après-midi à une réunion avec ses collègues de la zone euro, consacrée aux moyens de faire face à cette détérioration.

La mobilisation politique se poursuit mardi avec une réunion de l'ensemble des ministres des Finances de l'UE, avec en point de mire un sommet des 27 vendredi à Bruxelles. Mais lundi encore, les avis divergeaient sur l'opportunité d'un plan d'actions concertées au niveau européen.
Les banques centrales européenne et britannique devraient quant à elles procéder à un nouvel assouplissement de leurs conditions de crédit pour favoriser le financement des économies. Des mesures semblables au Japon et aux Etats-Unis la semaine dernière avaient cependant laissé les marchés de marbre.
En Europe, après des ouvertures hésitantes, les grandes places financières ont toutes fini lundi avec des hausses modestes: +1,51% à Londres, +1,17% à Paris, +0,62 à Francfort, +1,12% à Milan.
Comme pétrifiée avant l'élection présidentielle américaine, Wall Street hésitait depuis l'ouverture, avec un Dow Jones à +0,08% et un Nasdaq gagnant 0,27% peu avant 19H00 GMT.
Les investisseurs continuaient d'avoir l'oeil rivé sur l'élection, attendant avec fébrilité la levée de ce qu'ils redoutent le plus, l'incertitude.
Les places financières anticipent largement une victoire du candidat démocrate Barack Obama, en tête dans les sondages. Mais une victoire du républicain John McCain serait toutefois savourée à Wall Street, première place financière mondiale, car "le marché préfère généralement les républicains", rappelle Sam Stovall, stratégiste chez Standard & Poor's.
Dans la zone euro, la Commission européenne s'attend à un recul du PIB de 0,1% au troisième trimestre 2008 par rapport au trimestre précédent, puis de 0,1% au quatrième, après une baisse de 0,2% au deuxième.
Si cela se confirme, elle connaîtra dès le troisième trimestre 2008 une récession qui se traduit techniquement par deux trimestres consécutifs de recul du PIB, et ce pour la première fois depuis sa création en 1999.

Sur l'ensemble de 2008, la Commission européenne prévoit une croissance de la zone euro de 1,2%, contre 1,3% dans ses précédents pronostics.
Elle table ensuite sur un très net ralentissement de la croissance à 0,1% en 2009 soit, si cela se confirme, la pire performance de la zone euro depuis sa création. En 2010, la situation devrait s'améliorer avec 0,9% de croissance.
Bruxelles prévoit en 2009 une croissance nulle en Allemagne, en France et en Italie, et en recul au Royaume-Uni (-1,0%) et en Espagne (-0,2%).
De son côté, l'indice des directeurs d'achat (PMI) pour le secteur manufacturier en octobre est tombé à 41,1 points, sa plus forte baisse mensuelle et son plus bas niveau depuis sa création.
Chris Williamson, chef économiste de la société Markit, qui publie l'indice, a prédit "de nouvelles baisses de la production et de l'emploi pour les prochains mois".
Par ailleurs, les immatriculations de voitures neuves en Espagne ont chuté de 40% en octobre, et les ventes de véhicules ont baissé de 7,3% en France.
Un mois d'octobre qui a été catastrophique pour les Bourses du monde entier, qui ont perdu la somme record de 5.790 milliards de dollars, a rappelé l'agence de notation Standard & Poor's.
Les grands argentiers du G20 se retrouveront à Sao Paulo samedi, dans la perspective du sommet du 15 novembre à Washington, qui se donne pour objectif de réformer le système financier international.
La Maison Blanche a cependant minimisé les espoirs liés à ce sommet. "Je ne pense (...) pas que quiconque doive escompter que nous nous séparions la semaine prochaine et que tout soit réglé", a prévenu la porte-parole du président George W. Bush.
En Allemagne, Commerzbank va devenir la première grande banque privée du pays à se faire recapitaliser par l'Etat, à hauteur de 8,2 milliards d'euros, après avoir accepté lundi le plan d'aide gouvernemental.
L'Etat autrichien a quant à lui acquis, pour deux euros symboliques, 99,78% de la banque Kommunalkredit Austria. Premier établissement nationalisé du pays, il sera recapitalisé à hauteur d'au moins 100 millions d'euros par l'Etat.
La Norvège a de son côté proposé un prêt de 500 millions d'euros à l'Islande, dont le système financier s'est effondré. Le pays nordique s'apprête déjà à recevoir 2 milliards de dollars (1,6 milliard d'euros) du Fonds monétaire international.
Le FMI proposera également des prêts au Kirghizstan et au Malawi.