Les députés allemands se prononcent jeudi sur le mécanisme de sauvetage de l'euro, un vote perçu comme un test pour l'engagement européen du pays même si l'adoption du dispositif à une large majorité ne fait pas de doute.
Le Bundestag (chambre basse) doit avaliser l'élargissement de l'enveloppe et des compétences du fonds de secours européen créé en 2010 (FESF) pour venir en aide aux pays de la zone euro en difficulté.
Un certain nombre de pays, dont la France, ont déjà donné leur feu vert sans problème. D'autres, la Slovaquie par exemple, se font encore prier. Le processus nécessite l'aval des 17 membres de la zone euro, et les dirigeants européens espèrent le voir boucler d'ici à la mi-octobre, alors même que, sur fond d'extrême tension sur les marchés financiers, les discussions font déjà rage sur un nouveau renforcement éventuel.
L'Allemagne, première économie européenne, va apporter plus de 200 milliards d'euros de garanties au mécanisme, plus que n'importe quel autre pays.
Le renforcement du FESF va être adopté à une large majorité au Bundestag, les deux principaux partis d'opposition, sociaux-démocrates et Verts, ayant promis leurs voix.
La grande inconnue est le nombre de députés de la majorité -- Unions conservatrices (CDU/CSU) d'Angela Merkel et libéraux (FDP)-- qui vont voter non ou s'abstenir. Ce chiffre sera un baromètre de la marge de manoeuvre de la chancelière pour la suite des événements.
Si la coalition ne serre pas les rangs derrière son chef, ce sera "le début de la fin" du gouvernement, prédit le quotidien Tagesspiegel.
Ce serait aussi de très mauvais augure pour les autres étapes du sauvetage de la zone euro. Dans quelques semaines, le Bundestag devra se pencher sur un deuxième paquet d'aide pour la Grèce, à propos duquel les réticences des élus sont très fortes aussi, puis début 2012 sur le mécanisme d'aide permanent de la zone euro, le MES.
La grogne contre une politique européenne jugée trop laxiste a émergé dans les rangs du FDP il y a quelques mois, et gagné le camp conservateur.
Certains sont opposés au soutien même des pays les plus fragiles. L'existence de mécanismes de sauvetage tue toute incitation de ces pays à bien gérer leurs deniers, argumente le plus médiatique de ces "rebelles", le député FDP Frank Schäffler.
D'autres se sont irrités de la méthode, critiquant des procédures qui passaient outre les droits du parlement.
Depuis le projet de loi a été aménagé pour renforcer ceux-ci, et le nombre d'infidèles semble avoir chuté de 30 à 40 députés durant l'été, à une quinzaine. La majorité a une avance de 20 sièges sur l'opposition au sein d'une assemblée qui en compte 620.
Le président du FDP et ministre de l'Economie, Philipp Rösler, a assuré mardi que le nombre de partisans du fonds de secours européen était en hausse dans ses rangs, et qu'il ne restait "plus que quelques opposants peu nombreux".
Comme Mme Merkel, il s'est dit convaincu que le gouvernement obtiendra le feu vert du Bundestag avec sa propre majorité, sans recours nécessaire aux voix de l'opposition.
Mme Merkel a rappelé dimanche soir que soutenir ses partenaires était dans l'intérêt même de l'Allemagne, "parce que la stabilité de la monnaie est en jeu". Avec le FESF, "nous achetons du temps pour ces pays", a-t-elle dit.
Elle a promis de "partir en campagne cette semaine" pour rallier les derniers sceptiques. Une semaine qui sera "la plus importante de son mandat de chancelière", juge le quotidien Tagesspiegel.
Quelle que soit l'issue du vote de jeudi, "la politique allemande est partie pour être encore plus volatile qu'avant à cause des divergences croissantes entre les libéraux et les conservateurs", prédit Frank Engels, de Barclays Capital.