L'Europe se prépare à durcir sa discipline budgétaire face à la crise de la dette en imposant des sanctions financières aux pays trop laxistes, suite à un accord de principe conclu jeudi, qui toutefois ne va pas aussi loin que certains l'espéraient.
Après des mois de blocage, le Parlement européen et la présidence polonaise de l'Union européenne, représentant les Etats, ont annoncé avoir accepté les grandes lignes d'un compromis en ce sens qui vise à renforcer le Pacte de stabilité.
Le Parlement a indiqué dans un communiqué avoir "conclu un accord" avec la présidence polonaise. Le ministre polonais des Finances, Jacek Rostowski, a confirmé qu'"un paquet de propositions de compromis a été ficelé".
Il reste encore, toutefois, à voir si les gouvernements européens valideront l'ébauche. Elle sera soumise vendredi aux ministres européens des Finances réunis en Pologne. Les eurodéputés, de leur côté, passeront au vote formel fin septembre.
Le nouveau dispositif prévoit des sanctions financières sous forme de dépôt d'argent sur des comptes bloqués - pouvant se transformer en amendes - pour les pays qui laisseraient filer leurs déficits. Les punitions tomberont plus tôt et plus facilement que par le passé.
Ce "bâton" se veut la contrepartie de la "carotte": les mécanismes de solidarité financière mis en place au sein de l'Union monétaire pour aider les pays en difficulté comme la Grèce, l'Irlande et le Portugal depuis l'éclatement de la crise.
La réforme est composée de six textes législatifs - baptisée "6 Pack" - proposés il y a déjà un an par la Commission européenne pour tirer les leçons de la crise de la dette en Grèce. Le Pacte de stabilité, censé faire la police des déficits, s'est révélé largement inopérant car trop peu dissuasif, les gouvernements passant leur temps depuis dix ans à le contourner.
Les textes ont fait l'objet depuis le début de l'année d'âpres tractations entre le Parlement, qui insistait pour avoir un mécanisme de sanctions automatiques contre les mauvais élèves, et les gouvernements qui voulaient garder leur mot à dire. Une solution médiane de compromis a finalement été trouvée pour la procédure de déclenchement.
Certains parlementaires restent donc sur leur faim. En privé, des fonctionnaires européens estiment que les Etats auraient dû aller plus loin pour convaincre pleinement les marchés que les erreurs du passé ne se reproduiront pas.
Des changements importants vont néanmoins intervenir, dénoncés du reste par la gauche européenne qui y voit un carcan de rigueur excessif.
Si le projet est bien avalisé, les pays pourront être sanctionnés financièrement avant même d'avoir dépassé la limite européenne autorisée pour le déficit public annuel (3% du Produit intérieur brut), s'ils s'en rapprochent trop et ne font rien pour corriger le tir.
Il est aussi prévu de ne pas seulement sévir sur les déficits, mais aussi sur le niveau global de la dette publique. L'UE compte surveiller en outre les politiques économiques des gouvernements pour empêcher la formation de bulles immobilières par exemple, comme en Espagne ou en Irlande où leur éclatement a précipité les pays dans la crise.
Ce dispositif viendra compléter l'arsenal anti-crise déjà en place, avec notamment la surveillance en amont au niveau européen des projets de budgets nationaux.
Néanmoins, il est déjà "en partie dépassé" par la crise de la dette "car la vitesse des marchés financiers n'est pas celle du processus de décision politique", reconnaît l'eurodéputé conservateur français Jean-Paul Gauzès.
De nombreux pays réclament à présent un bond en avant dans l'intégration de la zone euro et le pilotage économique en commun.