
L'ex-Premier ministre islandais Geir Haarde a comparu lundi à Reykjavik devant un tribunal spécial pour sa responsabilité dans l'effondrement du système financier de l'Islande en 2008, quand il en dirigeait le gouvernement.
Vêtu d'un costume sombre et d'une cravate bleue, M. Haarde, 60 ans, est arrivé accompagné de son épouse et visiblement détendu à la maison de la Culture, choisie pour abriter la Landsdomur, unique Cour habilitée à juger ministres ou ex-ministres.
Après deux heures et demie d'une audience consacrée à une demande d'abandon des poursuites déposée par la défense, la Landsdomur qui n'avait jamais été convoquée avant cette affaire, a ajourné les débats. Elle doit rendre sa décision sur la poursuite ou non de la procédure d'ici quelques semaines mais à une date non précisée.
"Il va sans dire qu'il n'est pas amusant de se retrouver dans cette situation (...) Il ne reste qu'à attendre la conclusion de la Cour", a déclaré M. Haarde à l'AFP à l'issue de l'audience.
"Dans la mesure où il s'agissait d'une audience consacrée à une demande d'abandon des charges, je n'étais pas tenu d'y assister. Mais j'ai décidé d'être présent par respect pour la Cour et aussi pour en apprendre plus et entendre les différents arguments", a-t-il dit.
Sur décision du Parlement (Althingi), M. Haarde est le seul responsable politique islandais à comparaître devant la justice pour répondre de son éventuelle responsabilité au cours de la crise financière qui a conduit à l'effondrement des grandes banques islandaises.
Pour ses avocats, cela constitue une "absence d'équité face à la loi" qui doit mener à l'abandon des poursuites, selon un document transmis par la défense à l'AFP.
"En n'inculpant qu'une seule personne, sur des bases arbitraires, sans fondement objectif ni raison légale, nous affirmons que l'Althingi a enfreint (...) la Constitution islandaise qui prévoit un traitement équitable devant la loi", indique la défense. Elle rappelle qu'une commission parlementaire chargée de déterminer des responsabilités individuelles des membres du gouvernement avait en effet proposé "l'inculpation de quatre personnes".
La défense entend également disqualifier le procureur de l'Althingi et son enquête en soulignant notamment qu'il n'y avait "pas eu de réelle enquête criminelle" et que "l'acte d'accusation n'est pas clair et les charges pas suffisamment précises vis-à-vis de la loi".
"L'une des récriminations, et non des moindres, est que l'accusé Geir Haarde n'a jamais été interrogé en tant qu'accusé. On ne lui a jamais réellement posé de questions concernant les éléments à charge", a déclaré à l'AFP l'avocat Andri Arnason après l'audience.
Dans un entretien accordé à l'AFP en juillet, M. Haarde avait qualifié ce procès de "farce politique mise en scène par de vieux ennemis politiques".
"Le système banquier s'est bien effondré, mais l'économie réelle, l'ensemble des capacités productrices du pays sont restées intactes et fonctionnent toujours", avait-il souligné en insistant avoir "sauvé le pays de la banqueroute".
Quand le secteur financier islandais hypertrophié a implosé, les trois principales banques du pays détenaient à elles seules des actifs équivalents à 923% du Produit intérieur brut (PIB) de l'Islande.
Chef du Parti de l'Indépendance (droite) qui dirigeait le pays depuis le milieu de 2006, M. Haarde a dû quitter le pouvoir début 2009 pour apaiser la colère populaire liée à la crise et à la profonde récession qu'elle a provoquée.
Depuis, le pays a retrouvé une croissance et les observateurs estiment que l'Islande pourrait se passer des dernières tranches d'un prêt accordé par le FMI.