
Soucieux de rechausser les bottes du candidat "du pouvoir d'achat" à un an de la présidentielle, Nicolas Sarkozy a mécontenté tout à la fois le patronat et les syndicats en rendant "obligatoire" le versement d'une prime dans les entreprises de plus de 50 salariés.
Après plusieurs jours de tergiversations, Nicolas Sarkozy a finalement décidé d'imposer à ces entreprises le versement d'une prime, à la condition toutefois qu'elles versent des dividendes à leurs actionnaires et qu'ils aient augmenté.
En revanche, les entreprises de moins de 50 salariés seront simplement "incitées" à verser une prime.
Le chef de l'Etat espère ainsi ressusciter le "président du pouvoir d'achat" qu'il avait promis d'être lors de la campagne électorale de 2007, à un an de la prochaine présidentielle.

Le ministre du Travail Xavier Bertrand a justifié cette initiative en affirmant que "cela fait deux ans que les choses traînent" dans les négociations patronat/syndicats sur le partage de la valeur ajoutée.
Le ministre du Budget François Baroin a laissé entendre que la prime serait exonérée de charges sociales jusqu'à 1.000 euros. Ce n'est qu'"un ordre de grandeur", selon des sources proches du gouvernement.
L'exonération concernera les cotisations patronales et salariales. En revanche, le salarié acquittera la CSG et la CRDS et le montant de la prime sera imposable. L'employeur devra verser un "forfait social" de 6%.
Autre zone d'ombre du projet: la période de référence de l'augmentation des dividendes -une, deux ou trois années- n'est pas davantage fixée.
Le texte "sera voté avant l'été" et les décrets d'application "publiés au mois de juillet" pour que la mesure soit opérationnelle dès cette année, a cependant assuré François Baroin, porte-parole du gouvernement.
Patronat et syndicats ont réagi négativement, les seconds exprimant les plus vives critiques sur ce projet "inégalitaire".
Le Medef a parlé d'une "mesure néfaste", qui "risque de laisser entendre" que les employeurs "ne se comportent pas de manière responsable et équitable". L'initiative gouvernementale "méconnaît les besoins en capitaux" des petites entreprises, selon l'organisation de Laurence Parisot.

Pour la CGPME, "imposer le versement d'une prime aux entreprises de plus de 50 salariés empiète sur la liberté de gestion du chef d'entreprise".
François Chérèque, secrétaire général de la CFDT, a qualifié d'"erreur" le principe d'une prime obligatoire dans les grandes entreprises, affirmant que cela allait "diviser les salariés", limiter les hausses de salaire, tout en faisant un "cadeau" au patronat.
La CGT a accusé l'exécutif de "bricoler une réponse improvisée, à des fins électoralistes". Pour Bernard Thibault et les siens, "la seule vraie solution réside dans l'augmentation des salaires".
Mêmes critiques à FO, dont le patron Jean-Claude Mailly, a comparé la prime à une "usine à gaz" et aux "maisons à 15 euros" par jour de Jean-Louis Borloo: beaucoup de bruit, peu de bénéficiaires, selon lui. La CFE-CGC a qualifié le dispositif de "colmatage".
Moins négative, la CFTC "se félicite" du souci du gouvernement d'un "partage équitable de la richesse produite dans les entreprises" mais réclame que l'effort concerne "toutes les entreprises".
Le PS a qualifié de son côté cette annonce de "vaste supercherie" qui ne concernerait qu'une "poignée" d'entreprises.