Les Européens ont fait un pas supplémentaire mardi pour s'armer face aux crises d'endettement en se mettant d'accord sur un projet visant à renforcer leur discipline budgétaire, mais la Banque centrale européenne juge le dispositif largement insuffisant.
Les ministres des Finances de l'Union européenne, réunis à Bruxelles, se sont entendus dans les grandes lignes sur un projet prévoyant des amendes d'un nouveau type pour les mauvais élèves en matière de déficit et de dette.
Cette avancée "historique" est "une contribution cruciale pour les discussions des chefs d'Etat et de gouvernement sur la réponse européenne globale à la crise", qui sera finalisée au cours d'un sommet les 24 et 25 mars, a souligné le ministre hongrois des Finances, György Matolcsy, dont le pays préside l'UE.
Les Européens ont déjà réalisé des progrès.
Au cours d'un sommet de la zone euro vendredi, ils se sont mis d'accord pour augmenter la capacité de prêt de leur Fonds de soutien aux pays en difficulté, et pour lui permettre d'acheter directement de la dette publique. Ils ont également adopté un "pacte pour l'euro", afin de renforcer leur compétitivité.
Les mesures sur lesquelles ils se sont entendus mardi accompagnent la palette d'outils : elles prévoient de durcir le Pacte de stabilité, qui encadre les politiques budgétaires, en sanctionnant financièrement aussi le dérapage de la dette et plus seulement du déficit.
Les textes incluent de nouvelles sanctions, sous la forme de dépôts bloqués pouvant être transformés en amendes, contre les pays affichant des niveaux de déficits ou de dette trop importants. Ces sanctions s'appliqueront de manière plus rapide et plus automatique que jusqu'à présent.
Les propositions prévoient par ailleurs la possibilité d'infliger des amendes aux Etats "en situation de déséquilibre excessif" en raison de politiques économiques jugées dangereuses.
Ces réformes doivent cependant encore faire l'objet de négociations en vue d'un accord avec le Parlement européen. Et les tractations s'annoncent "intenses" en raison de certaines réserves des eurodéputés, a reconnu M. Matolcsy, qui vise un accord définitif en juin.
Le projet mécontente en outre fortement le président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, qui n'a cessé de critiquer ces derniers mois ces réformes. Et mardi à Bruxelles, il a de nouveau mis en garde les ministres.
"Nous continuons à penser que l'amélioration de la gouvernance qui est envisagée à présent est selon nous insuffisante pour tirer les leçons de la crise à laquelle nous avons été confrontés", a-t-il déclaré au cours de la réunion.
"Il nous semble (...) que nous avons besoin d'améliorations dans un certain nombre de domaines", a-t-il ajouté.
La BCE déplore notamment que les sanctions prévues ne soient pas plus automatiques.
Certains Etats voulaient au départ une plus grande fermeté, mais un compromis avait été dégagé à l'automne après d'âpres négociations, qui atténuait le degré d'automaticité des sanctions.
Dans un document publié en février, la BCE a appelé à "effacer les clauses qui permettent d'échapper" aux critères du Pacte de stabilité.
Ce nouveau sujet de mécontentement s'ajoute à une autre déception pour l'institution monétaire, lors du sommet de la zone euro de vendredi.
Les pays de l'Union monétaire ont prévu que leur Fonds de soutien puisse acheter directement de la dette émise par des Etats en difficulté, mais pas sur le "marché secondaire", là où les obligations publiques sont négociées entre investisseurs après leur émission. Au grand dam de la BCE, qui le souhaitait.