Axel Weber a annoncé vendredi qu'il quittait la présidence de la Bundesbank, portant un coup sans doute fatal aux espoirs de Berlin d'emporter la direction de la Banque centrale européenne.
Il va quitter dès le 30 avril le poste qui lui permettait de siéger au conseil des gouverneurs de la BCE alors que son mandat, entamé en 2004, courait jusque fin mars 2012, a annoncé la chancellerie allemande.
"Sa succession sera annoncée au cours de la semaine prochaine", conclut ce communiqué très sec, dans lequel ne figure aucune formule consacrée louant le travail du président de la Bundesbank.
M. Weber, sur lequel la chancelière Angela Merkel avait misé toutes ses cartes, avait cueilli les dirigeants allemands à froid en signifiant mardi soir à ses collègues de la Bundesbank qu'il ne briguerait pas de nouveau mandat. Laissant entendre par la même occasion qu'il abandonnait l'idée d'être porté à la tête de la BCE.
Dans les ministères allemands, la nouvelle, répercutée par la presse, avait fait l'effet d'un coup de tonnerre et était même qualifiée de "tragique" par un observateur.
Depuis c'était le silence, même si M. Weber a annoncé plusieurs fois vouloir s'exprimer avant de se rétracter, sans doute sous la pression de la chancellerie, elle-même restée muette.
Cette communication désastreuse a laissé pantois les analystes économiques, alors que sur fond de crise de la dette en zone euro les marchés réagissent de manière épidermique à tout facteur d'incertitude.
"Ce n'est pas le genre de situation que les marchés veulent avoir d'ici la fin du mandat de M. Trichet", le 31 octobre, juge ainsi Carsten Brzeski d'ING.
Pour Berlin, mettre cet ancien professeur en économie qui se qualifie volontiers lui-même de "conservateur" aux commandes de la BCE, c'était garantir la stabilité de l'euro et une lutte sans faille contre l'inflation, qui reste un repoussoir pour les Allemands depuis la grande crise de 1923.
Il faisait d'ailleurs figure de favori avant que ses prises de position tranchées et notamment ses attaques répétées contre le programme de rachats d'obligations publiques lancé par la BCE au printemps dernier n'inquiètent ses partenaires de la zone euro.
La France notamment n'a pas caché son manque d'enthousiasme pour ce candidat.
Face à ces réticences, le chef de la Bundesbank réclamait un soutien plus marqué de Mme Merkel, qui n'est pas venu.
Sa sortie de mardi était sans doute destinée à la faire sortir de sa réserve, analyse le Handelsblatt, avant de constater que c'est sa disgrâce qu'il a obtenue.
Quant à l'Allemagne, même si selon le ministre des Finances Wolfgang Schäuble, elle "n'a jamais dit qu'elle avait un candidat pour la BCE", elle se retrouve désormais bien démunie pour concourir à ce poste important.
"Selon Bruxelles, l'Allemagne dispose de peu de responsables monétaires avec le bon profil", notait le quotidien allemand Handelsblatt jeudi.
L'Italie n'a d'ailleurs pas tardé à s'engouffrer dans la brèche pour vanter la candidature du gouverneur de la Banque d'Italie Mario Draghi, un nom souvent cité pour succéder à M. Trichet.
"Nous pensons que c'est une excellente candidature et elle sera soutenue par le gouvernement italien", a assuré jeudi le ministre de l'Economie Giulio Tremonti.
Les tractations officielles n'ont toutefois pas encore commencé, le nom du successeur de M. Trichet ne devant initialement émerger qu'au printemps, voir au début de l'été même si la question sera évoquée en coulisses dès le sommet européen de mars.
Au vu du contexte, "les dirigeants européens ne devraient pas faire trop longtemps durer le processus", estime l'économiste d'ING.