La Banque centrale européenne (BCE) a exprimé de "sérieuses inquiétudes" sur les conséquences du projet de restructuration du secteur bancaire irlandais sur ses propres finances, alors qu'elle prête largement aux banques du pays.
L'institution financière, dont le siège se situe à Francfort (ouest), a réclamé que rien dans cette réforme "n'affecte les opérations ou les droits de la Banque centrale (irlandaise) ou de la Banque centrale européenne, ou d'aucune autre banque centrale" au sein de l'Eurosystème, selon un point de vue destiné au gouvernement irlandais, et publié sur son site internet.
Le projet de loi de "stabilisation des institutions de crédit", annoncé la semaine dernière par l'Irlande, vise à étendre temporairement les pouvoirs du gouvernement, afin de faciliter la recapitalisation et la réorganisation du secteur financier.
Cela devrait conduire Dublin, qui a déjà pris le contrôle depuis l'an dernier de plusieurs banques privées ou mutualistes (Anglo Irish Bank, INBS et EBS), à nationaliser la plupart des établissements irlandais encore indépendants, dont Allied Irish Banks (AIB) et Bank of Ireland.
Tout en saluant ce projet, qui étend les pouvoirs du gouvernement irlandais afin de résoudre sa crise financière, la BCE met en garde ses responsables contre le fait que ces pouvoirs élargis "interfèrent significativement avec les droits de propriété des actionnaires et créanciers" des instituts financiers irlandais.
Et de réclamer "la clarification (dans la loi finale, ndlr) que les droits de la Banque centrale et de la BCE, comme créanciers de tout institut, ne seront pas affectés".
La BCE souhaite aussi que la future loi ne remette pas en cause les règles sur la qualité requise des titres apportés en garantie lors de l'octroi de prêts par elle-même et les autres banques centrales de la zone euro.
Dublin a tenté lundi de rassurer l'institution financière.
Notant le "rôle central" de la BCE pour assurer le succès du plan de restructuration des banques, un porte-parole du ministère des Finances a jugé "inconcevable que le ministre puisse prendre des décisions particulières ou procéder à des transferts d'actifs sans le soutien de la banque centrale".
"Il est vraiment difficile d'imaginer comment de telles mesures pourraient être conçues et mises en oeuvre sans une implication et une proche collaboration de la banque centrale", a ajouté ce porte-parole dans un communiqué.
Début octobre, la BCE avait dévoilé de nouvelles dispositions concernant ses opérations de refinancement, qui durcissent certaines conditions d'accès des banques de la zone euro à ses crédits. Elle restreignait notamment certaines des garanties offertes par les banques pour pouvoir bénéficier de ses crédits, et en particulier les titres adossés à des actifs (ABS), dont le nom est étroitement lié à la crise des "subprime".